« Désarmer l’empire Bolloré » : Quand des libraires censurent les livres

© Capture d’écran LCP
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« Boycottons Bolloré ! » C’est l’appel lancé par un groupe de 80 libraires, dans une tribune publiée par le site d’extrême gauche Contre Attaque. Très inquiets du récent rachat d’Hachette par le groupe du milliardaire breton, ces commerçants tirent la sonnette d’alarme. « La puissance du groupe Bolloré est tentaculaire, écrivent-ils. Son principe est de distiller racisme, sexisme et repli nationaliste, d’amener quotidiennement la peur de ce qui n’est pas assez blanc, assez riche, assez hétérosexuel, assez cisgenre. Tout cela est planifié et organisé. » Et les signataires de s’indigner du « basculement » de la maison Fayard, qui « sort en fanfare » le livre de Jordan Bardella, alors que le monde de l’édition se refusait jusqu’à présent à produire des ouvrages « d’un parti fondé par d’anciens nazis et toujours promoteur d’une fascisation de la société ». Eh oui, ma bonne dame, le cordon sanitaire, c’est vraiment plus ce que c’était.

Afin de lutter contre cette « entreprise de conquête hégémonique de nos imaginaires », une campagne d’action intitulée « Désarmer l’empire Bolloré » a ainsi vu le jour, en juillet 2024, à l’appel de collectifs écologistes, décoloniaux, syndicaux, féministes et antifascistes. Que du beau monde, quoi. C’est dans ce cadre militant que s’inscrit la tribune des 80 libraires. « Plus que le livre de Bardella, c’est tout le système Bolloré qu’il faut pouvoir appréhender et faire chuter », appellent-ils.

Une censure assumée

Pour parvenir à leurs fins, les courageux libraires promettent d’user de « tous les moyens nécessaires ». Y compris la violence physique ? Le collectif ne le dit pas. En revanche, le boycott, lui, est pleinement assumé. C’est là toute l’hypocrisie de la manœuvre : il s’agirait, pour ces libraires, de « sauver le pluralisme dans l’édition »… en censurant les livres qui leur déplaisent ! Cherchez l’erreur. Non contente de saluer l’interdiction de la campagne d’affichage du livre de Jordan Bardella dans les gares et stations de métro, la tribune appelle à aller encore plus loin. Elle invite les commerçants à retirer de la vente « tout ou partie des livres » qu’ils jugeraient politiquement incorrects et à s’opposer aux « forces réactionnaires » en organisant des « journées sans Bolloré, voire, en le boycottant ».

https://twitter.com/ContreAttaque_/status/1812758572645646658

Les auteurs eux-mêmes sont appelés à quitter les structures détenues par le groupe Bolloré. « Bien sûr, il ne s’agit pas de dire que tous les auteurs et autrices qui publient chez Hachette sont d’extrême droite […] Néanmoins, le contexte nous impose de voir cette évidence : ces livres financent et arment, souvent bien malgré eux, une entreprise qui vise à nous détruire. » Ceux qui continueraient malgré tout à travailler avec le groupe Hachette deviendraient « les petites mains receleuses et logistiques » de l’extrême droite. En gros, des fachos par association.

Se dire antifasciste...

Il est intéressant de noter que ces libraires, qui se présentent comme les défenseurs du Bien et du Juste, ont décidé de publier leur tribune sur le site Contre Attaque. Ce site n’est autre que la réincarnation du média Nantes révoltée dont les autorités avaient proposé la dissolution en 2022… Tiens, tiens. Alors ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin avait en effet accusé le collectif d’extrême gauche d’être à l’origine de violences survenues lors d’une manifestation dite « antifasciste », le 21 janvier 2022. Dans le genre démocrate et respectueux du sacro-saint « État de droit », on peut faire mieux.

Mais c’est cela, aussi, l’extrême gauche : l’inversion complète des termes et des valeurs. C’est défendre le pluralisme en censurant les voix discordantes, se prévaloir de l’État de droit en promouvant des boycotts illégaux, se dire antifasciste alors qu’on ne rechigne pas à faire usage de la brutalité pour imposer ses idées.

Orwell, reviens, ils sont devenus fous !

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Jean Kast
Journaliste indépendant, culture et société

Vos commentaires

134 commentaires

  1. Que des libraires puissent être aussi étroits d’esprit pourrait avoir quelque chose de désespérant. Mais quand on connait le tropisme de nombreux intellectuels pour le totalitarisme communiste malgré toutes ses exactions il n’y a rien d’étonnant. Le milieu de la culture fait montre une fois de plus d’inculture.

  2. Boycottons ces idiots inutiles.
    Fréquentons les libraires qui conseillent, nous aident à penser et parfois contre nous, nous font découvrir des auteurs dont la lecture affirmera nos convictions ou nous fera évoluer en approfondissant notre réflexion.
    Ces pseudo-intellectuels, défenseur de l’exclusive liberté de penser comme eux sont aussi sensés que les LGBTQetc pour la Palestine.
    En réalité, cette poignée de furieux ne font que précipiter leur prochaine faillite que nul ne ne pleurera !
    Et puisqu’une bonne nouvelle ne vient jamais seule, espérons que nombre de présidents de région imiterons la présidente de la région Pays de la Loire qui coupe très significativement les subventions de ces cultureux sans talents, qui ne vivent que de l’argent public et ne produisent que des spectacles glauques.

  3. Des commissaires politiques staliniens à l’œuvre ? A quand un Goulag en France?
    Ces personnages sont répugnants de bêtise et de méchanceté.

  4. Combien de librairies en France au fait ? En comptant les « stands » du grand commerce on trouve de 20000 à 25000 points de vente. Sinon il semble que le réseau se compose de 3000 magasins, dits indépendants. Ainsi les « contestataires » représentent 2.7 % des magasins et 0.4 % des points de vente. Boycottez…boycottex….il en restera toujoursd quelque chose, n’est-ce pas.

    • C’est évident, 80 libraires dans toute la France, c’est quoi? Un pipi de chat dans l’océan. Ce serait intéressant et utile de donner les coordonnées de ces pseudo libraires.

  5. Perso j’appelle pas « libraires » des gens qui me disent ce que je dois lire ou pas. J’appelle ça des inquisiteurs.

  6. Je suppose également que le personnel du groupe Bolloré, dont une partie doit très probablement voter « extrême gauche » est prête à quitter son emploi, en vue d’être en pleine adéquation avec ses idées politiques? Excellent thème de méditation pour ces gens-là!

  7. On peut être libraire et étroit d’esprit, hélas aucune profession n’échappe à ce travers. Sont-ils pour cela des imbéciles? la réponse est oui sans aucune hésitation ; quand on exerce ce métier, on a des devoirs. Ils est hélas vrai que la notion de devoir ne fait plus guère partie du vocabulaire d’une partie croissante de la population française, Notre président en est actuellement un exemple flagrant et quelque peu désespérant pour ceux qui aiment notre pays.

  8. un libraire c est un commerçant s il ne veut vendre ce qui correspond ases idées :il change de métier personne ne le retient

  9. Desproges disait, avec son humour grinçant : « Comment reconnaître l’ennemi ? C’est simple : l’ennemi est con : il croit que c’est nous l’ennemi, alors que c’est lui ! ». C’est la même chose avec les antifa. L’antifa est con : il croit que c’est nous le fasciste, alors que c’est lui ! Et ce n’est même pas de l’humour : c’est la triste vérité !

  10. Tout peut se dire aujourd’hui, n’est-ce pas Ces censeurs de gauche ont évidemment le droit de s’exprimer au nom de la liberté d’expression.

  11. Donnez les noms et les adresses de ces 80 libraires pour nous permettre de les éviter (j’hésite à employer le mot « censurer »).

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