Désengagement des États-Unis de l’OTAN : L. Sarkozy a raison, à condition que…

À condition que cette « opportunité monumentale » ne se transforme pas en grande braderie du patrimoine national.
canon caesar

Louis Sarkozy a du talent ; il a de qui tenir. Ses interventions sur le plateau de Darius Rochebin ne manquent d’ailleurs pas d’intérêt. La dernière en date, ce mercredi 19 mars, tournait autour de l’éventualité d’un désengagement des États-Unis de l’OTAN. « Est-ce que l’Europe se retrouvera seule face à ses adversaires ? J'espère que le retrait américain va se concrétiser, notamment pour la France… », lance celui à qui on prête des ambitions politiques. Les choses ne sont peut-être pas si simples que ça et nous n’y sommes pas encore, même si NBC News a évoqué, ces jours-ci, l’idée que les États-Unis pourraient abandonner le commandement suprême de l’OTAN (SACEUR). Ce serait une première depuis que l’Alliance atlantique existe et un signal fort : les soldats américains n’obéissent qu’à des Américains. Quid, alors, des 100.000 soldats américains basés en Europe dans le cadre de l’OTAN ? Mais partons de cette hypothèse d'un désengagement qu'on souhaiterait plus ordonné que celui d'Afghanistan... Le fils de celui qui, en 2009, ramena la France dans le commandement intégré de l’OTAN nous explique pourquoi cela serait bon pour la France : « Il y a ici une opportunité monumentale pour notre pays de jouer un rôle, diplomatique, politique, militaire en Europe bien plus conséquent… »

 

Une panoplie complète... ou presque

Effectivement, cela se défend. La France : son siège permanent au Conseil de sécurité, à condition de ne pas le brader, ni même de le partager avec qui que ce soit. Sa dissuasion nucléaire, à condition d’en rester totalement maître. Son armée, à condition d’être commandée par des Français ! Une armée, certes qualifiée de « bonsaï » (de tout, mais en petite quantité), mais dotée d’une expérience opérationnelle solide, de la capacité (rare) à être nation-cadre dans un engagement multinational. Sait-on, par exemple, que la France arme un état-major multinational, implanté à Lille, le CRR-Fr (Corps de réaction rapide-France), capable de commander un corps d'armée otanien en opération ? On pourrait ajouter notre base industrielle et technologique de défense (BIDT), qui irait mieux si nos « amis » européens n’achetaient pas américain. Oui, au sein de l’Union européenne, la France est la seule nation a disposer d’une telle panoplie militaire et militaro-industrielle.

Il en a d’ailleurs coûté beaucoup, à notre pays

Beaucoup de sang, d’abord : l’expérience opérationnelle accumulée depuis des décennies a son lot de sacrifiés sur l’autel de la patrie. Aucune nation d’Europe, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, n’a été engagée comme la France à travers le monde. La liste serait trop longue à faire ici. Le Royaume-Uni doit venir derrière. Rien que depuis 1963, c’est 774 militaires qui sont morts au service de la France dans les différentes opérations extérieures. C’est beaucoup, pour un pays « en paix ».

Il en a coûté et il en coûte aussi beaucoup de matière grise et de sueur. Ingéniosité, habileté de nos ingénieurs, techniciens et ouvriers pour imaginer, concevoir, fabriquer et maintenir nos armements, nucléaires ou conventionnels, nos avions, nos bateaux de guerre, les infrastructures pour les accueillir.

Il en a coûté et il en coûte évidemment beaucoup d’argent. Des milliards et des milliards d’anciens francs, de nouveaux francs puis d’euros, à des générations de contribuables. On se souvient des leçons de morale financière qu’Angela Merkel faisait, naguère, à la France à propos de son déficit. Pendant ce temps, Mme Merkel se blottissait gentiment sous le parapluie américain.

Patrimoine inestimable

Tout cela constitue, évidemment, un patrimoine inestimable dont chaque Français est en partie dépositaire. Patrimoine inaliénable, aussi. Tout du moins en principe : comment ne pas se poser de questions lorsqu’un Emmanuel Macron lance, pratiquement à la cantonade, qu’il a « décidé d'ouvrir le débat stratégique sur la protection par notre dissuasion de nos alliés du continent européen ». Patrimoine inestimable mais cependant quantifiable. Notamment lorsqu’il s’agit de peser dans la balance des discussions entre États sur ce qu’ils peuvent faire ensemble pour se défendre face à des menaces communes.

Maintenant, pour que cette « opportunité monumentale » (pour reprendre les mots de Louis Sarkozy) ne se transforme pas en grande braderie du patrimoine national français, il faut peut-être quelqu’un d’autre, à l’Élysée, qu’un ancien spécialiste des fusions-acquisitions dans une banque d'affaires…

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

73 commentaires

  1. Les US, c’est comme d’habitude! Ils interviennent partout dans le monde puis s’en vont quand ils voient que la partie tourne en leur défaveur ou qu’on les prie de rentrer chez eux. « US go home » …comme l’a fait de Gaulle.

  2. L’OTAN de l’ère Trump est plus que moribonde, notre intérêt aujourd’hui est de sortir de l’Otan, sous commandement Trumpiste Américain, d’autres alliances bilatérales seraient plus judicieuses, avec le Canada, l’Australie, l’Inde, , en Europe, avec la Grande-Bretagne, la Pologne, Ukraine, tout en revoyant et repensant à une nouvelle zone économique, il faut en finir avec l’ UE de l’emprise Von Der Layen.

  3. marrantes les saillies fielleuses des anti sarkozystes du RN à propos du « fils de » lorsqu’ils fustigent Louis… et moi, dans la famille le Pen, je demande la fille… puis la petite fille…Ah oui, mais c’est sans doute pas pareil!

  4. Depuis 80 ans la France et les Français ont du tout accepter et toujours tout subir pour ne plus jamais rencontrer la guerre… On leur promettait tout…ils ont connu furtivement le bonheur (les 30 glorieuses) puis ensuite tout a basculé progressivement avec des gouvernements qui les abandonnaient. Ils se sont pourtant accroché…
    Et voilà, Il a fallu que l’Ukraine arrive dans le paysage Macron pour balancer 8 décennies en l’air et mette en danger tous nos sacrifices… au cours de ces années, la France a subit des humiliations, des attaques, des injustices, elle a été dépouillée d’une grande partie de son patrimoine industriel, agricole, culturel tout ca pour soit disant « préserver la paix » en Europe et aujourd’hui on risquerait de se trouver en guerre à cause de Macron/Zelensky qui veulent nous entrainer dans leur délire ? et si on ne voulait pas? on nous a demandé?

  5. « Beaucoup de sang, d’abord : l’expérience opérationnelle accumulée depuis des décennies a son lot de sacrifiés sur l’autel de la patrie ». Non!, malheureusement, et c’est ne rien enlever à leur courage, ces militaires ne sont pas morts pour la patrie, la France, mais pour des causes obscures, des politiques changeantes, des buts inconnus ou mal définis ou alors, très certainement, pour la finance internationale qui mène le monde.

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