Deux jours après l’élection d’Orbán, l’Union européenne veut lui couper les vivres

Qu'a donc fait la Hongrie, au-delà de ces accusations, pour mériter cet acharnement, alors que le pays traverse, comme ses voisins, une crise économique de plus en plus grave à cause de la guerre en Ukraine ?
Ursula von der Leyen

La vie est décidément pleine de coïncidences surprenantes. Viktor Orbán vient tout juste d'être reconduit pour un quatrième mandat, avec une majorité de sièges au Parlement, contre la plupart des prévisions des instituts de sondage qui pariaient sur la revanche d'une opposition unie. Et voici que, deux jours après ce tonitruant démenti infligé aux experts autoproclamés des valeurs européennes, la Commission de Bruxelles vient d'annoncer qu'elle lançait une procédure destinée à priver la Hongrie des fonds européens, pour cause de « suspicion de corruption ». Ursula von der Leyen l'a annoncé, ce mardi, et a dit se féliciter de cette nouvelle. Le mécanisme européen, dit de « conditionnalité », adopté par les 27 pays membres en janvier 2021, n'avait encore jamais été déclenché. Il stipule que la Commission peut suspendre le versement des crédits européens si des violations de l'État de droit portant atteinte aux finances européennes sont constatées. Une lettre de mise en demeure aurait été envoyée, ce mardi, au gouvernement hongrois. Elle signe le début d'une procédure qui devrait prendre entre six et neuf mois.

Que reproche-t-on, au juste, au gouvernement de Budapest ? Apparemment rien que de très banal, si l'on ose écrire : des problèmes de conflits d'intérêts, une certaine opacité dans la passation de marchés publics ainsi que d'éventuelles occurrences de corruption.

La Hongrie est-elle un cas isolé ? Pas vraiment, si l'on en juge par le nombre de pays européens dont la classe politique a fait l'objet de ce genre d'accusations. Rien qu'en France, tenez, la liste des parlementaires et des ministres ayant fait l'objet de mises en examen de la même sorte entre 2017 et 2022 est proprement vertigineuse. On dit que le président de l'Assemblée nationale lui-même...

Mais alors, qu'a donc fait la Hongrie, au-delà de ces accusations, pour mériter cet acharnement, alors que le pays traverse, comme ses voisins, une crise économique de plus en plus grave à cause de la guerre en Ukraine ? Eh bien, c'est un pays nationaliste, une « démocratie illibérale », selon la formule désormais célébrissime du journaliste américain Farid Zakaria. En d'autres termes, le peuple souverain de Hongrie a élu Orbán pour qu'il applique des mesures jugées non démocratiques par la Commission européenne. Du refus d'accueillir des migrants à la mise en œuvre d'une politique familiale conséquente, en passant par la lutte contre les lobbies de l'Open Society Foundation de George Soros, la Hongrie a multiplié les fautes, aux yeux de l'Union européenne. Le conseil de classe bruxellois décide donc, dans une logique compréhensible à défaut d'être acceptable, de lui taper sur les doigts.

Assez de fausse naïveté : ce qui dérange l'Europe, c'est que l'un de ses satellites sorte du rang, comme hier au sein du pacte de Varsovie. La Hongrie, la Pologne et leurs associées, génies du mal du groupe de Visegrád, n'auraient-elles quitté l'Union soviétique, lieu de la pensée unique, des décisions d'appareil, de la tracasserie administrative et de la persécution des dissidents, que pour tomber dans le piège d'une autre union dictatoriale ? Les faits incitent fortement à le penser. N'avons-nous, vieux peuples atlantistes, que cette grisaille totalitaire, qui évoque une sorte d'Albanie de cauchemar, à offrir à des pays qui, depuis plus de mille ans, ont pris à notre place les coups des Mongols, du djihad médiéval, et jusqu'aux chars russes ? Ce serait triste - et un peu défaitiste - de l'admettre.

Alors, tout simplement, chapeau à Viktor Orbán qui, pour un quatrième mandat consécutif, va devoir se battre pour conserver sa dignité et son indépendance, au sein d'une Union qui ne veut pas voir dépasser les têtes. Honneur à nos frères d'Europe orientale, qui ont vertement répondu aux mesures prises par l'Union européenne, les « bureaucrates de Bruxelles », comme les a appelés Orbán dans son discours de victoire. La Hongrie, à peine rescapée du communisme, s'était endormie sur le matelas de la « fin de l'Histoire », elle se réveille dans le lit de Procuste. Ce n'est pas vraiment à notre honneur.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 07/04/2022 à 20:46.
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Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

119 commentaires

  1. Robinson

    L’ EU voudrait être une Fédération , à l’image des USA . Il est bien dommage qu’on ne parle pas des divergences extrêmes qui existent entre les différents états des soit-disant ÉTATS-UNIS ; le modèle n’est vraiment pas probant . L’UE devrait être une confédération et là , tous les peuples y trouveraient leur compte .

  2. Von der Leyen et la Commission européenne qui sont eux-mêmes impliqués dans des scandales de conflits d’intérêts, et eux sans aucun contrôle démocratique, se permettent de vouloir sanctionner Orban largement élu démocratiquement pour corruption ? Alors que le parlement européen et à fortiori la commission son sous l’emprises de lobbys des plus corruptibles avec des parlementaires bien souvent eux-mêmes réellement corrompus, reprochent à Orban se qu’ils tolèrent largement dans bien d’autres pays.

  3. La Hongrie devrait quitter l’UE et s’allier avec la Russie. Cela offrirait aux Hongrois un bien meilleur avenir.

  4. Si Marine Le Pen est élue, La France va aussi être mise au ban de l’EU?
    Pourtant l’EU entretient d’excellents rapports avec des pays aussi démocratiques que le Qatar, l’Arabie Saoudite, le Pakistan etc….

  5. Pour paraphraser le divin Biden au sujet de Poutine, on pourrait, aussi finement que lui, dire que Von der Leyen ne devrait plus pouvoir diriger l’UE.

  6. Orban est anti-woke ! Comment voulez-vous que ça puisse convenir à Biden, donc à la nomenklatura européiste, in fine. Où irions-nous, disent-ils, si chaque chien se plaint de la longueur de sa laisse ou d’un collier trop serré !
    Et puis, cerise sur le gâteau, ce qu’on ne donnera plus à Orban, pourtant dans l’UE, compensera ce qu’on donne à ses voisins ukrainiens, pourtant hors de l’UE.

  7. A quand les chars Européens à Budapest ? Les Hongrois ont accueilli des centaines de milliers de réfugiés Ukrainiens. Il faut le leur faire payer, comme à la Pologne et la situation ne risque pas de s’arranger, car Orban, qui ne peut pas se passer de gaz Russe (comme les Allemands) a décidé de le payer en roubles, et les Américains (qui n’ont besoin de rien) ont décidé que ce n’était pas bien.

  8. La dictature européenne ne supporte pas que la voix des peuples ne soient pas en accord avec sa manière de penser. Une élection démocratique ne convient pas à madame von der leyen qui ne cesse de violer les traites européens.. Malheureusement pour l’Ukraine mais je pense que cette crise a mis en évidence toute l’incapacité des instances européennes et l’amateurisme de ses dirigeants. qui prennent et ont pris des décisions privées de bon sens et contraires à nos intérêts. Ce sont des putschistes

  9. C’est bien là « la main mise », Open bar, de la franc maçonnerie Mondialiste avec les Illuminati à leur tête, et leur soldats frères et soeurs disciplinés pour à terme la Gouvernance Mondiale avec la confiscation des milliards pour asseoir leur Pouvoir; les Etats ne devant plus exister….et nous peuple de France si on ne réagit pas ce 10 avril avec Z nous passerons à la trappe, bientôt injectés multiples obligées et autres contraintes nouvelles. Hongrie chrétienne, voila leur ennemi.

  10. et si la Hongrie envahissait l’Ukraine ,pour récupéré les terre hongroise de l’ukraine. Que ferais l’U.E. et l’otanr?

  11. devinez pour qui roule !Madame Von Der Leyen , pour qui travail son mari ? pour Pfizer, pour qui travail son fils ? pour Mckinsey , trop de conflits d’intérêts dans cette EU a tous les nivaux a quand le frexiit assez de tous ces commissaires qui decident pour les peuples !b

  12. Orban veut rétablir la souveraineté de son pays. Il en a la possibilité grace à l’article 50 de la constitution européenne. Or si la Hongrie quitte l’UE après la GB , d’autres voudront le faire, ce sera un effet domino qui signera la fin de l’Europe . D’où les sanctions pour l’en empêcher.

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