Diabolisation du RN : difficile, dans l’enseignement, d’échapper aux diktats

Lycée Eugène Delacroix Drancy

Pourquoi le Rassemblement national n'a-t-il pas suivi sa courbe ascendante après un premier tour triomphal, bien qu'il ait finalement obtenu davantage de sièges ? La raison principale semble en être la diabolisation à marche forcée qui s'est de nouveau mise en route. Passe encore que des dirigeants politiques utilisent cette vieille ficelle pour empêcher leurs adversaires d'arriver au pouvoir : c'est, somme toute, de bonne guerre, même si c'est intellectuellement malhonnête. Mais quand toute la société civile s'y met (organisations syndicales, médias, personnalités du spectacle et du sport), il y a de quoi s'interroger.

C'est particulièrement vrai dans le monde de l'enseignement, malgré les progrès du vote RN dans ce milieu : au premier tour des législatives, un enseignant sur cinq a, selon les sondages, voté pour les candidats RN ; en 2012, ils n'étaient que 3 %. La majorité des syndicats se sont activement engagés contre ce qu'ils appellent « l'extrême droite », ce qui n'est guère étonnant, compte tenu de leur culture de gauche. Mais des associations, apparemment plus neutres, leur ont emboîté le pas et se sont montrées tout aussi caricaturales. Pas sûr que tous leurs adhérents partagent leur ostracisme.

Ainsi, l’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public a appelé à faire « barrage à l'extrême droite », considérant que « l’arrivée au pouvoir des candidats d’extrême droite et de leurs alliés est un danger majeur pour la République, pour la démocratie et pour les droits humains ». Même son de cloche de la part de l'Association des professeurs d'histoire et géographie, qui ne passe pas pour une organisation gauchiste : elle appelle aussi à voter contre le RN, déclarant représenter « une association interdite sous Vichy » et être « viscéralement attachée à la défense des valeurs et des principes de la République, en particulier à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme ». En matière d'antisémitisme, il y aurait peut-être d'autres coupables à désigner plus justement !

À l'opposé, les rares syndicats ou associations qui n'ont pas pris parti dans le débat électoral sont quasi soupçonnés d'un silence complice, au nom du principe sartrien – qui relève de l'intimidation et du terrorisme intellectuel – selon lequel « se taire, ce n’est pas être muet, c’est refuser de parler, donc parler encore… ». Ils ont laissé – quel crime abominable ! – leurs adhérents déterminer leurs choix en tant que citoyens, sans leur indiquer la voie à suivre ni se prêter à des jugements sommaires. Il est vrai qu'il est paradoxal de représenter des professeurs, censés être des intellectuels qui réfléchissent, et de leur donner des directives, comme on le ferait pour des enfants.

Au-delà du noyautage par une gauche militante de ces diverses organisations, le plus grave est sans doute qu'elles estiment, le plus sérieusement du monde, être en devoir de dénoncer le « péril de l'extrême droite » et qu'elles ont la certitude d'avoir raison. Elles répètent à l'envi des lieux communs sans se soucier de leur exactitude. Non par manque de jugement critique, dont elles savent faire preuve sur d'autres sujets, mais parce qu'elles sont trop imbibées des préjugés de la bien-pensance pour pouvoir conserver une réflexion totalement libre. L'on n'empêchera jamais que des organisations partisanes aient des partis pris, mais on peut regretter que des élites responsables tombent dans les mêmes travers.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 15/07/2024 à 12:14.
Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

34 commentaires

  1. Si l’on vous diabolise, c’est justement parce que vous n’êtes pas le diable. Sans vouloir donner des conseils au RN, il me semble que se verser des seaux de cendre sur la tête, en permanence, pour exprimer, face à la gauche, que vous n’êtes pas ou plus ce qu’elle pense de vous est parfaitement inutile. Le seul fait que vous ayez une vision différente de la leur, quant au devenir de notre pays, vous place automatiquement dans le camp du mal. En effet, la gauche est le camp du bien, elle en est persuadée. Autant rester fièrement vous même, sûr de vos convictions.

  2. « Quand toute la société civile s’y met , organisations syndicales , médias , personnalités du spectacle et du sport … il y a de quoi s’interroger. » – S’interroger ? Pour moi la réponse est simple et claire : Le « R.N » progresse tant qu’il prône : Plus de Pouvoir d’Achat – Plus de Sécurité – Plus de Police – Moins d’Immigration – Avancement de l’age de la Retraite – Justice plus sévère … etc . Mais dès qu’il agite les sujets comme : Postes sensibles inaccessibles aux binationaux – Fin du regroupement familial – Fin du droit du sol – Fin de l’assistanat débridé , vous vous apercevez qu’une immense partie de l’électorat est déjà « corrompue » par les Politiques socialisantes persistantes depuis plusieurs décennies . Dès lors , se sentant menacée , elle ne vote naturellement plus pour le « R.N » ! Ainsi raisonne le « Peuple » – Winston Churchill , qui n’était pas tout à fait « Peuple » ne déclarait t’il pas : « La vertu inhérente au socialisme consiste en une égale répartition de la misère » ?

  3. Le magistère « moral » de la gauche s’exerce partout : dans l’enseignement, à l’Université, dans les médias, les séries télévisées et le cinéma, la Justice, le show biz, les sydicats, les associations, et une bonne partie de l’administration. « La raison principale semble en être la diabolisation à marche forcée qui s’est de nouveau mise en route ». La dédiabolisation serait elle une impasse ? Il ne peut y avoir de victoire sans remise en cause profonde de ce magistère et au contraire tout accomodement avec ses prescriptions ne peut mener qu’à l’échec.

  4. Faut-il s’en étonner ? Depuis 40 ans, la droite mole a abandonné le magister moral à la gauche, se soumettant lâchement à ses dictats… Encore aujourd’hui, malgré les drames qui se succèdent dans le pays, les Crepol, et autres attaques racistes, ils persistent dans leur complicité infâme…

  5. Élu délégué une année en CHSCT, j’ai découvert les réunions d’une demi heure pour entériner une décision et le reste du temps au « rade » comme ils l’appelaient pour refaire le monde et traiter les autres ( tout un apm à picoler) et les patrons « d’enc…. ».
    J’ai déchiré ma carte au bout d’une année.

  6. à l’école on leur bourre la tête depuis la maternelle , plus tard dans leurs leçons woke, écolo, gauchos, donc ces gosses qu’on a remontés à bloc pensent qu’il leur faut agir pour leur futur. un enfant est manipulable et s’il n’y a pas derrière des parents pour leur remettre les pendules à l’heure, on en arrive à ce résultat. Il ne faut pas s’étonner ………….

    • Vous avez raison ! Je le vois avec mes petites filles, 13 et 8 ans : les parents remettent les pendules à l’heure tout en leur expliquant qu’il leur faut naviguer dans le milieu scolaire, sans se « faire remarquer » par des propos « non autorisés ». Plus de libre arbitre.. plus que cette foutue pensée unique ! Il ne faut pas mollir !

  7. il n’est pas besoin de vitupérer ( même si çà soulage) contre cette bronca aberrante et mensongère à l’encontre du Rn, tout ceux et celles qui ont voté dans ce sens vont le regretter amèrement sous peu, parce que le retour du boom rang sera très violent et inévitable –

  8. L’education nationale est vraiment le ministère le plus sclérosé. Le problème est que ce sont les profs qui sont en charge d’éduquer nos enfants. Si ces derniers se souciaient plus de leur métier que de politique tout irait mieux. Qu’ils arrêtent donc de se plaindre et de participer aux marches blanches qu’ils ont au final initiées avec leur mentalité.

  9. Cher monsieur Kerlouan, pour avoir enseigné en médecine pendant plus de 30 ans, je n’appellerai pas les enseignants des lycées une élite, loin s’en faut.

    • Je suis de votre avis. Lors d’une formation que je faisais à des IDE et AS, je devais aborder l’éthique médicale. J’ai demandé qui pouvait me donner une définition de ce mot : un air ébahi ( non ce n’était ps le nom d’un joueur de foot ou d’une lanceuse d’alerte!). Une stagiaire lève le doigt et me dit : « je sais ce que c’est, mon père en a tué deux sur le chien dimanche! »
      Je passe sur l’ignorance même des mots particuliers à leur métier, tels « douleur nociceptive, neurogène »… Personne ne sait ce qu’est un glossaire…. J’en passe et les meilleurs. Cela ne m’étonne pas de constater qu’à notre époque, il puisse y avoir des polémiques sur la réalité d’un ARNm, et de l’existence de re-transcriptase!

  10. Qu’ils s’entrainent entre eux ,rien d’etonnant mais le pire c’est qu’ils endoctrinnent leurs élèves futurs citoyens
    Le classement PISA l’a bien défini « Les élèves Françaissemblent avoir des difficultés à avoir une vision globale d’un texte, ce qui est attribué à un enseignement trop lineaire et trop analytique des textes en cours de Français dont le sens est ETABLI PAR AVANCE PAR LE PROFESSEUR ! »

  11. Les menaces de mort d’élèves envers des professeurs sont intolérables mais lors de prochaines menaces nous pourrons leur rappeler que le responsable ce n’est pas le RN mais les soutiens de ceux pour qui ils ont voté.

  12. Vous dites :  » mais on peut regretter que des élites responsables tombent dans les mêmes travers. » Je me permets de corriger cette phrase : incapables de réfléchir et de penser par eux mêmes , aveugles au point de ne pas constater le déclin de l’éducation , responsables ils sont , mais ce ne sont surement pas des  » élites  » .

  13. Profs de philosophie ou histoire géographie…
    Finalement avec eux , on finit a sciences pipo et l’ena l’école nationale des amateurs.

    Loin des véritables grandes écoles d’ingénieurs.

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