Du RN aux LR, comment Éric Zemmour oblige les partis à réviser leur stratégie…
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Pour les commentateurs politiques en mal de clichés, cela s’appelle « faire bouger les lignes » ou « turbuler le système »… Il est vrai qu’en la matière, l’arrivée d’Éric Zemmour dans le jeu politicien et son envolée sondagière deviennent le dernier sujet à la mode dans les dîners politico-mondains. En 2014, le politologue Pascal Perrineau affirmait que « le Front national était en position d’astre noir. Il attire, il aimante la limaille des protestataires et des déçus. » À l’approche de l’échéance présidentielle de l’année prochaine, ce rôle semble désormais dévolu au polémiste en question.
Car, pour « turbuler », ça « turbule ». Marine Le Pen, même si cela ne figurait pas forcément dans ses plans initiaux, est obligée de se repositionner ; elle qui, avant même l’échéance du premier tour, a peut-être commis l’erreur consistant à mener une campagne de second tour, rassembleuse et rassurante. Bref, la voilà désormais tenue de se radicaliser afin de n’être point doublée sur sa droite par notre trublion, même si elle conserve l’antériorité de la lutte contre l’immigration de masse et l’insécurité galopante. Mais avoir eu raison avant tout le monde n’est pas forcément un viatique pour le succès ; son père en sait quelque chose.
Une telle redistribution des cartes n’arrange guère plus les affaires de LR et de ses candidats, adoubés ou non par le parti. La preuve en est cette invraisemblable course à l’échalote dans laquelle s’engouffrent Xavier Bertrand, Valérie Pécresse et même le très lisse Michel Barnier ; c’est dire.
Pour le premier, Xavier Bertrand, même si estimant qu'« Éric Zemmour est un diviseur » tenant « des propos monstrueux », entend instituer « un référendum sur la politique migratoire », affirmant sur BFM TV, le 13 septembre : « Je demanderai aux Français s’ils sont d’accord pour que, chaque année, le Parlement dise, dans un débat totalement transparent, combien d’étrangers nous sommes en mesure d’accueillir et d’intégrer. »
Pour la seconde, c’est un peu la même chose, mais en plus violent, Valérie Pécresse entendant « stopper l’immigration incontrôlée », tout « en changeant la Constitution », à l’instar d’une Marine Le Pen qui propose d’y inclure le principe de « préférence nationale ».
Quant au dernier, Michel Barnier, plus second couteau que troisième homme, il propose un « bouclier constitutionnel » permettant à la France, en matière d’immigration, de faire l’impasse sur les textes européens. Et dire que c’est le technocrate européiste Michel Barnier qui pourrait bientôt planter le dernier clou du cercueil de ces organismes supranationaux dont on ne sait plus trop bien à quoi ils servent, si ce n’est à desservir les peuples européens. Quelle ironie…
Si l’on résume, et quels que soient les degrés divers de sincérité de tel ou tel, voilà qui ressemble de plus en plus à un jeu, façon « Cours après moi que je t’attrape » : Marine Le Pen qui s’inquiète d’être talonnée par Éric Zemmour. Xavier Bertrand qui en rajoute. Valérie Pécresse qui se débarrasse de ses oripeaux d’Anne Hidalgo de droite. Et Michel Barnier qui ne sait plus trop bien où il en est.
Pour tout arranger, Éric Zemmour convie l’Histoire de France dans la compétition, avec son audacieuse réhabilitation du maréchal Pétain, au point d’être taxé de « négationniste » par le toujours pétulant garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti.
Seulement voilà, s’il était plus qu’aisé de pratiquer la fameuse « réduction ad hitlérum » avec Jean-Marie Le Pen, ça risque de devenir compliqué avec un Éric Zemmour pour les raisons familiales, religieuses et ethniques qu’on sait. D’ici avril 2022, on ne risque donc pas de s’ennuyer…
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