[EDITO] Augmenter les impôts ? Quand les Français refuseront de payer…

Capture d'écran
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Les services du Premier ministre tentent encore d’éteindre l’incendie. Alors que la Macronie se vante de n’avoir pas augmenté les impôts des Français, l'entourage de Michel Barnier doit démentir les propos de Gérald Darmanin et assurer, tardivement et avec des mots choisis, que la fiscalité record dans le monde libre supportée par les habitants de l’Hexagone ne s’alourdira pas davantage. La popularité toute neuve du Premier ministre connait là son premier achoppement.

Et pour cause. Les gouvernements successifs dansent sur le volcan en pleine activité du ras-le-bol fiscal. En 2023, notre taux de prélèvements obligatoires s’établissait à 43,2 % du PIB, selon l’INSEE, contre 39,2 % dans le reste de la zone euro et 27 % (en 2021) aux États-Unis ! Contacté par BV, le constitutionnaliste Frédéric Rouvillois, auteur de nombreux livres politiques, le rappelle : le feu couve. « Les bonnets rouges et les gilets jaunes relevaient bien du ras-le-bol fiscal, explique-t-il. En l’occurrence, du refus de payer l’essence ou les radars très cher à cause de l’importance des taxes, dont une partie revient à l’État. » Le poids d'un État obèse et impotent sur les sujets régaliens (sécurité, immigration, justice, entre autres) excède les Français. « Le mouvement Poujade à la fin des années 1950, c’était cela aussi », rappelle Frédéric Rouvillois. La mécanique du plus d'État et plus d'impôts semble toucher ses limites. En témoigne la fragilité de ce concept central : le consentement à l’impôt. « Le consentement à l’impôt des Français, c’est le pilier du principe parlementaire et de l’annualité de l’impôt, de la loi de finance annuelle », note Frédéric Rouvillois. Celle qui sera débattue dans quelques semaines dans un contexte inédit et chaotique.

« raslebolomètre »

Le consentement à l’impôt est si vital pour l’État qu'il est discrètement suivi par les autorités. La Cour des comptes le mesure via un sondage réalisé par Harris Interactive pour le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), avec l’appui du Centre de recherche en économie et statistique (CREST). La deuxième édition de ce « raslebolomètre », datée du 30 janvier dernier, tire la sonnette d’alarme. Bien sûr, trois Français sur quatre pensent que leurs impôts sont trop élevés. Logique et pas faux, dans un des pays les plus taxés du monde libre. Sept Français sur dix pensent qu’ils payent trop d’impôts. Logique aussi. Mais d’autres critères alarmants bondissent : en 2023, 75,9 % des sondés considèrent que les cotisations sociales sont trop élevées en France. Ils n’étaient que 60 % de cet avis en 2021, soit un bond supérieur à 15 points en deux ans. Autre signe, le pourcentage des Français satisfaits de l’utilisation de leurs impôts ou de leurs cotisations sociales chute de près de quatre points à 32,1 % (plutôt satisfaits et très satisfaits). Encore un signe d’exaspération : 45 % des Français souhaitent réduire les missions dont l’État a la charge. Enfin, les Français interrogés sont plus de 80 % à être convaincus que l’État dépense trop pour certaines missions et pas assez pour d’autres. En clair, qu'il gaspille et ne joue pas son rôle.

Trente milliards d'économies

Le consentement à l’impôt « est lié au pouvoir, explique Frédéric Rouvillois. Un pouvoir qui n’est pas despotique ou ultra-violent doit avoir l’assentiment des citoyens. » Des citoyens aujourd’hui excédés. L’immigration coûte 35 à 40 milliards d'euros chaque année à la France, selon l'Observatoire de l'immigration et de la démographie. Les économies à la fois possibles, indispensables et urgentes existent. « Les chiffres montrent que l’on court tout droit vers une crise de la dette si l’on ne change pas de trajectoire », écrit l’iFRAP. Ces économies, la fondation spécialiste de l'analyse des politiques publiques dirigée par Agnès Verdier-Molinié les chiffre à… 30 milliards d’euros pour la seule année 2025 ! L'iFRAP rappelle, à toutes fins utiles, que la Commission européenne « a ouvert, le 19 juin dernier, une procédure pour déficit public excessif contre la France qui peut conduire à des sanctions financières, notamment une amende de 3 à 5 milliards d'euros ». Et que la France, aux mains de ceux qui donnent tant de leçons d’économie à leurs adversaires depuis 2017, « est devenue la lanterne rouge de l’Europe ». Notre déficit pourrait atteindre 5,6 % du PIB, l’an prochain.

Avant de songer à augmenter les impôts - ce dont rêve le NFP -, le Républicain Michel Barnier devrait se pencher sur les dépenses folles de la maison France. Avant que les Français ne se rebiffent !

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

51 commentaires

  1. Le problème de ces « élites » est qu’il n’y a pas de contrôles, et bien entendu, pas plus de sanctions. La fameuse cours des comptes est sans pouvoir et elle fonctionne avec des politicards recyclés. Il est nécessaire de créer régulièrement des audits réalisé par des cabinets privés et que les sanctions tombent sans failles.

  2. A la lecture des avis émis sur le sujet, je vois qu’il reste en France des personnes responsables et sensées. Peu, mais il en reste. Je suggérerais à BV de faire un livre blanc de tous ces avis et de les adresser à Barnier et tous ceux que bon nombre considèrent comme à peu près responsables.

  3. Lorsque Macron a fait sa première campagne en 2017, j’avais dis que cet homme était dangereux. Je m’étais fait agonir. La suite a confirmé mon avis d’alors. Là, avec Barnier, je dis que cet homme est aux ordres de l’Europe, et de ce fait n’améliorera rien, au contraire, si tant est qu’on puisse ramener à la vie un noyé après 3 jours dans l’eau. Hadrien Lemur a parfaitement décrit la situation. Nous allons assister à une fuite de capitaux et d’industriels qui en ont assez de se faire plumer par ces politiques. Je pourrais craindre que ça se termine dans la rue, mais c’est sans compter sur la couardise congénitale des français.

  4. Charles Gave nous a révélé qu’il y avait 60 milliards de fraude à la Sécurité Sociale (il a été mis au placard pour le faire taire…), il y a 75 millions de Cartes Vitales pour 68 million d’habitants, on continue à verser, dans pays du Magreb, sans vérifications, des retraites à des gens qui sont plus que centenaires… On a les moyens de déverser des milliards sur l’Ukraine pour entretenir une guerre qui s’éternise, on remet gracieusement la dette à des pays Africains… les députés et sénateurs se sont, en douce, profitant de la pandemie, augmentés mensuellement de 500 et 700 Euros chacun, le Président explose, le budget de l’Élysée… Et pour trouver 20 milliards, il faudrait faire les poches des Francais ? Mais quand donc le peuple va-t-il se révolter ? Macron a fait de la France une république bananière.

  5. Je me demande si cette menace d’augmentation d’impôts n’a pas été lâchée volontairement pour rendre plus acceptable des coupes drastiques dans les dépenses sociales et administratives, les subventions, le licenciement de fonctionnaires, la baisse des dotations aux étrangers, des fermetures dans l’enseignement supérieur, etc. C’est malheureux mais il faut que les français sentent une menace directe pour leur porte-monnaie pour qu’ils s’inquiètent des comptes de l’état et acceptent la rigueur sur les dépenses publiques…

  6. Ici même à BV, Monsieur Jamet ; à qui je porte le respect qui lui est dû ; avait qualifié les 8 premiers jours de Barnier comme « un parcours sans faute »…
    J’avais alors réagi lui répondant, qu’on ne pouvait pas juger du succès d’un parcours, en l’occurrence celui de Barnier, sur une période aussi courte.
    Aurai-je donc eu raison ?
    Force est de constater que en même pas 3 jours ajoutés aux 8, le beau parcours de Barnier a déjà pris du plomb dans l’aile, annonçant « une augmentation des impôts ».
    Ce n’est pas très malin ça, surtout alors que le gouvernement n’est même pas encore né.
    De plus, cette décision risque de refroidir plus d’un concurrent nominé ou non, tel un Darmanin qui a déjà réagi et dit que dans ces conditions il n’y participerait pas.
    Selon CNews 7 français sur 10 souhaite(raie)nt que Barnier fasse appel à des « personnalités de gauche* » pour entrer au gouvernement.
    Je crains fort que ceux-ci déclinent également l’offre, toujours à cause de cette augmentation d’impôt, alors qu’ils ont prouvé par le passé que la méthode ne leur était pas étrangère.
    Barnier fera-t-il un clin d’œil à Valls qui attend toujours qu’on fasse appel à son expertise ?
    * j’aime beaucoup « personnalités de gauche », non je plaisante là, je trouve tout-à-fait incongrue l’association de ces deux mots.

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