[EDITO] Discours de politique générale de Gabriel Attal : vous n’avez rien raté

ATTAL

Ça y est, c’est fait. Gabriel Attal a prononcé son discours de politique générale : cette espèce de grand oral, de figure imposée de notre Ve République qui en a vu d’autres en soixante-cinq ans. Ce matin, en milieu de matinée, l’auteur de ces lignes faisait une petite halte au bistrot du village. Des retraités attendaient sagement l’heure de l’apéro, un plombier faisait une pause avant de retourner sur le chantier ou se prendre la tête avec la paperasse qui s’entasse sur le coin du bureau. Une question traverse alors l’esprit de celui qui va devoir, dans quelques heures, se coltiner le discours du Premier ministre pour préparer cet édito : combien de ces braves gens attendent vraiment quelque chose de cet exercice ? Sans vouloir être irrespectueux envers le Premier ministre, sans doute pas grand monde. Un retraité ou deux, peut-être, qui, dans l’après-midi, hésitent entre une crapette au club des anciens ou une séance de sieste devant La Chaîne parlementaire. On ne vous fera pas ici le catalogue des annonces faites par le chef de gouvernement, ce serait trop fastidieux. On retiendra simplement quelques punchlines, comme on dit aujourd’hui dans cet univers de la com’ qu’est devenu le monde politique.

« Désmicardiser » la France

D’abord, Gabriel Attal veut « désmicardiser » la France. Très bien. La formule restera peut-être, mais comment ne pas voir là le constat d’échec des politiques conduites depuis des décennies en France, et notamment par Emmanuel Macron depuis bientôt sept ans. La France se prolétarise. Alors, Gabriel Attal veut « faire en sorte que ceux qui vont travailler puissent vivre de leur travail ». Fort bien. C’est un peu le principe du travail, « à la base », non ? La semaine dernière, Marie Delarue évoquait le « grand déclassement » des classes moyennes. Ce déclassement est une réalité dont les classes moyennes ont pleinement conscience, puisqu’elles sont majoritairement convaincues que leurs enfants vivront moins bien qu’elles. Mais il n’y a pas que le salaire qui smicardise la France. Aller travailler, cela veut dire se déplacer, souvent loin de chez soi, donc des frais de route, des taxes, etc. Travailler est une chose, mais il faut aussi se loger. L’accroissement des normes, notamment environnementales, aggrave la crise immobilière et se loger décemment va devenir un luxe. Alors, Attal veut créer « un choc d’offre » pour « déverrouiller » le secteur du logement. Cela passera, notamment, par la simplification des normes (la révision des diagnostics de performance énergétique). À suivre.

Agriculture : des preuves d'amour ?

Mais c’est sur la crise agricole qu’on attendait Gabriel Attal. Une belle déclaration d’amour pour « nos agriculteurs, nos pêcheurs, qui travaillent matin, midi et soir pour nous nourrir », notre agriculture qui « est notre force et notre fierté aussi ». Ce n’est pas du Sully, mais c’est pas mal. Mais nos pêcheurs et agriculteurs resteront sans doute sur leur faim pour les preuves d’amour. La suppression de dix normes françaises suffira-t-elle ? Car Gabriel Attal sait très bien que la solution n’est qu’en partie en France, que les leviers sont à Bruxelles. Alors, certes, c’est beau d’entendre un Premier ministre déclarer : « Je le dis ici solennellement, il doit y avoir une exception agricole française. » On connaissait l’exception culturelle française, jolie façon de dire « préférence nationale » ; on aura donc l’exception agricole française. Comment traduit-on ça en langage technocratique de Bruxelles ? On demande à voir ce qu'Emmanuel Macron obtiendra...

L'identité, maintenant

Pour finir, on saluera le clin d’œil appuyé à droite de Gabriel Attal : « Dans un monde où tout s'accélère et se transforme, je refuse que notre identité puisse se diluer ou se dissoudre. » On applaudit. Mais l’identité de la France (si c'est bien de celle-ci qu'il a voulu parler), c’est quoi, au juste, pour Gabriel Attal ? Après la dévitalisation d’une loi Immigration qui n’était pourtant pas bien méchante, dévitalisation dont se réjouissent Emmanuel Macron et son gouvernement, que compte faire le Premier ministre pour que cette identité ne se dilue pas dans le grand tout ? Quand on voit que dans le même discours, il a annoncé qu’il compte traiter la question de l’AME par voie réglementaire, donc en contournant le Parlement, on comprend qu’on n’est peut-être pas à la hauteur des enjeux et qu'on va continuer comme avant.

En attendant, les retraités sont retournés à la crapette ou sont passés sur une autre chaîne. Demain matin, le plombier râlera toujours autant au coin du zinc.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

69 commentaires

  1. J’entends beaucoup de qualificatif pour présenter attal « jeune, beau, brillant, intelligent, gay » ne nous faisons pas avoir, nous avons déja eu la copie conforme en 2017 et on c’est fait roulé, être tout ça ne suffit pas .

  2. Des bons mots, peut-être de bonnes intentions mais il est et restera le Premier ministre de Macron dont les idées et intentions ne changeront pas et tant que l’EU ne changera pas de cap, il n’y aura aucune possibilité de réaliser ce qu’il nous promet. Ce bon discours c’était de la chimère.

  3. Il vient d un autre monde , il revendique sa fierté d être homosexuel et 1e ministre , une choix qui sera loin d être apprécié par le monde rural et encore moins par les musulmans

  4. Belles paroles sans doute, mais pour le fond ?
    J’ai cru au Karcher de Sarkozy mais j’avais tort. J’attends donc les actes maintenant

  5. « Dans un monde où tout s’accélère et se transforme, je refuse que notre identité puisse se diluer ou se dissoudre. » !! C’est pour cela que peut-être, son patron a fait expurger (par son copain « Fafa ») d’une loi sur l’immigration plus que timide les articles, a peu près positifs, qui ne lui convenaient pas !! L’identité française, pour Macron, c’est comme la culture : il y a DES cultures donc il y a DES identités. Pour lui, d’ailleurs, le nombre d’identités ne s’arrête pas à l’Europe des 27 (pour l’instant) puisqu’il inclus l’identité maghrébine et africaine, entre autres.

  6. Ah ! Si, j’ai raté quelque chose : « maintenant, en France on peut être 1er ministre et ouvertement gay »
    J’ai peur que ce soit tout ce qu’on retiendra de ce discours…

  7. On aurait dit une élève de terminale lisant un long exposé hors sujet. Le bon élève chouchou de son maître et – moment supposé d’ héroïsme’ – un coming out qui a dû bien faire ricaner dans les tracteurs et les cars de CRS.

  8. Cela fait plus de 40 ans qu’ils nous racontent des carabistouilles et ca marche , alors pourquoi s’en priver.

  9. Cher Colonel, il y a des punitions que je refuse de m’infliger, regarder le discours d’Attal en fait parti.

  10. je ne retiens de son discours que la conclusion je le cite Gabriel Attal estime « qu »être Français en 2024, c’est pouvoir être Premier ministre en assumant son homosexualité », dans un pays « qui il y a 10 ans se déchirait autour du mariage pour tous ». si c’est ça être Français la natalité n’est pas prêt de remonter.

  11. Comme l’ont souligné Alain Boer et Ségolène : le mot, mal approprié, à la mode dans ce gouvernement c’est « réarmement »… cela au mieux voudrait dire que les armureries de l’Élysée sont pleines de ressources ! Nous sommes en droit d’en douter et ce mot de va-t-en guerre ne pacifie pas l’ambiance…

  12. Ce discours , ou plutôt , cette pantomime , serait véritablement risible , si le sujet n ‘ était pas si grave , venant de gens qui ont le pouvoir depuis 7 ans .

  13. Blabla sans intérêt ce type est la copie conforme de son maitre , il a bien appris ses leçons . Qui peut encore croire un seul mot de ces élus qui mentent comme ils respirent .

  14. Très peu sur l’agricole. une absurdité totale sur les gardes obligatoires mises sur les médecins libéraux en cas de carence publique. C’était bien vague. Il n’a pas les leviers, seul Macron les tient et en UE il ne voudra rien faire.

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