[EDITO] Euthanasie à l’Assemblée : réveillez-vous, c’est notre civilisation qu’on assassine

terreur peur mort faucheuse

L'examen du projet de loi sur la fin de vie a débuté ce lundi 27 mai à l'Assemblée nationale. Il sera question d’aide active à mourir, de suicide assisté, d'euthanasie. C’est Mozart qu’on assassine : ce titre d’un vieux bouquin - que l’on ne trouve plus que, corné, dans les vieilles maisons de famille - sied parfaitement à la situation.

Parce que chaque vie humaine est une petite symphonie dont on a tenté d’être à la fois le compositeur et le chef d’orchestre. Une partition plus ou moins réussie, pas toujours harmonieuse, parfois plus Contrastes de Béla Bartók que Flûte enchantée.

Dans leur naïveté, ils ne voient pas le biais de la question

Parce que pour une raison étrange, comme un concert de musique classique, ce débat ne semble pas intéresser la France populaire. Comme tous les sujets sociétaux, il est réservé à une certaines élite, celle que l’on trouvait au XIXe autour de la table dominicale dans les châteaux de province : le curé, le député, le hobereau, le médecin, le maître d’école. Pour en parler, il faut être un expert pointu, un intellectuel capable de philosopher. Les quelques opposants à cette loi sont confinés dans les colonnes du Figaro et de La Croix, c'est si feutré ; il ne manque que la tasse de thé. Comment a-t-on pu convaincre Monsieur et Madame Tout-le-Monde de se désintéresser de leur propre décès ? Veulent-ils mourir dans la dignité ? La réponse est oui. Dans leur naïveté, ils ne voient pas le biais de la question. De fait, qui voudrait trépasser dans la honte et la déchéance ?

Parce que Mozart, dans l’imaginaire collectif, est l’acmé de notre civilisation. Or, c’est la pierre centrale qui en est retirée, son premier commandement : « Tu ne tueras pas. » Elle avait déjà été descellée avec l’avortement. Cinquante ans plus tard, la boucle est bouclée. Pour l’IVG, on disait que ce vote allait ouvrir une boîte de Pandore. Cette fois la boîte de Pandore gît, béante, avant même que la loi ne soit passée. La commission de l’Assemblée l’a déjà éventrée. Si l’amendement créant le délit d’entrave au suicide assisté déposé par l’insoumise Caroline Fiat (sanction d’un an de prison et de 15.000 euros d’amende) est voté, il ne faudrait pas qu’il soit rétroactif : les pompiers qui ont plongé, sauvant in extremis des candidats au suicide, vont devoir rendre leur décoration, leur lettre de félicitations, passer devant le tribunal et faire, in fine, un chèque. La prochaine fois, ils passeront leur chemin. Ou bien sauteront, mais cette fois pour tenir sous l’eau la tête du malheureux le temps nécessaire. C’est le concept de « secourisme à l’envers », expliqué dans l’avant-projet de loi sur la fin de vie.

Oubliés l’expiation, l’oblation, la contrition, le pardon

Parce que ce roman de Cesbron, C'est Mozart qu'on assassine, c’est celui des boomers par excellence. Paru en 1966, il a été vendu à plus d’un million d’exemplaires. Il raconte les tribulations d’un enfant du divorce. La société commence à bouger. Avec les boomers, elle fait « boum ! », pffuit... pulvérisée. Ma vie, mon choix. Quand ils étaient en âge de procréer, ils ont fait légaliser l’avortement ; maintenant qu’ils se rapprochent dangereusement de la fin et que leur part (énorme) du corps électoral fait les rois, et donc les lois, c’est l’euthanasie. Oubliés l’expiation, l’oblation, la contrition, le pardon qu’on leur a enseignés jadis au caté (ils sont la dernière génération), qui donnaient à la fin de vie son utilité. Fragilisés par les « affaires », les curés osent à peine parler. Au Boomeristan, on veut mourir comme on a vécu : si je veux, quand je veux. Leur viatique est idéologique.

Le brouhaha de la campagne des européennes couvre l’examen de loi sur l’euthanasie. C’est tout bénéfice pour Emmanuel Macron qui donne l’impression d’agir. Quant aux autres candidats, toute opposition trop bruyante pourrait leur valoir quelques points aux élections, eu égard à la popularité de l’euthanasie dans l’opinion. C’est Mozart qu’on assassine. Sans son Requiem - « Requiem aeternam dona eis » (« Accordez-leur le repos éternel ») -, car plus personne ne croit au repos éternel.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

44 commentaires

  1. « Si l’amendement créant le délit d’entrave au suicide assisté déposé par l’insoumise Caroline Fiat (sanction d’un an de prison et de 15.000 euros d’amende) est voté, il ne faudrait pas qu’il soit rétroactif « ____ Je l’espère parce que moi, pendant mes 14 à 15 ans d’accompagnement en Soins Palliatifs (mon métier = prise en charge de la douleur physique, morale, psychologique et spirituelle), j’ai eu beaucoup de patients qui voulaient mourir et qui, à 99,99% après un traitement efficace contre la douleur (fait avec l’aide efficace de mon collègue médecin géronto-psy), une écoute et un gros câlin, n’avaient absolument plus envie de quitter la vie!

  2. Non et non à l’euthanasie. Assassinat programmé et voulu .je veux partir à mon heure et quand le ciel le décidera et non pas par la volonté de certains…..ce sont eux qui deVraient recevoir cette piqure finale …

  3. On aurait pu, dans une société éclairée, rêver que le débat sur ce thème soit confié à des philosophes, des anthropologues, des penseurs, et aussi des hommes d’Eglise, des scientifiques et des médecins. Non, on fait voter une loi par des députés, aux valeurs morales indécises, à l’intelligence incertaine et surtout préoccupés par le fait de savoir si leur vote peut être favorable à une réélection.
    Alors soit, mais que leur vote soit nominatif. Et que ceux qui auront approuvé le texte de « fin de vie » soient amenés, à tour de rôle, à effectuer l’injection létale à chaque fois qu’un volontaire se sera légalement déclaré. Afin que pour une fois, ils soient vraiment responsables de leur choix, qui n’engage d’habitude que les autres citoyens.

  4. Il y a une chose que je ne comprends pas: qui a détricoté le texte initial pour en faire presque une incitation à mourir ? On dirait que la gauche LFiste fait la pluie et le beau temps à l’assemblée et la droite et le RN baissent la tête continuellement. Bon, quoi qu’il en soit, on comprend bien que la société occidentale bienpensante et droit de l’hommiste n’a plus qu’un seul projet à nous proposer : la mort (constitutionalisation de l’avortement et aide à mourir). Il y a la mort physique mais ils sont très actifs également avec notre mort sociale (sauf pour les dégénérés) notre mort économique, la mort de notre liberté, la mort de notre souveraineté et la mort de la famille. Et pourtant, les français continuent de voter pour la même caste, aux ordres, pro UE et atlantiste.

  5. L’objectif de cette loi, c’est le rêve d’attali et de macron: « moins de vieux, moins de retraites à payer », juste un calcul financier !

    • C’est comme la loi sur l’avortement, c’est un sujet délicat qui doit être traité avec beaucoup de précautions et d’intelligence. Nos élus sont-ils à la hauteur du sujet ? On peut avoir quelques doutes quand on voit les hurluberlus qui siègent a l’AN. Malheureusement, le pire est à craindre.

    • Il y a toujours eu des euthanasies, des personnes qui ont aidé à mourir ou qui se sont données la mort sans demander à autrui de tuer ce qui est très lourd à porter. La loi ouvre aux dérives : fin des soins palliatifs, génocides des vieux des handicapés des psychiatrisés …considérés à charge, puis ce sera les ados mal dans leur peau ou leur genre, les victimes d’agression qui ne s’en guérissent pas ( faits connus) etc….rien ne sera fait pour aider une personne à traverser une épreuve. Finie la compassion, la sollicitude, la fraternité, la vraie celle qui se manifeste dans la souffrance…bref c’est l’Amour qu’on tue et l’humanité… Être humain

  6. Encore une lubie macronienne qui va encore se retourner contre lui, si seulement elle pouvait aussi être prémonitoire…
    Il s’est déjà mis les autorités religieuses sur le dos avec un NON catégorique de l’Église !
    Punition, Macron a demandé à Monseigneur Ulrich, archevêque de Paris, que dis-je « a demandé », il lui a notifié son désir de prononcer un discours dans la cathédrale Notre-Dame lors de Grande Messe d’inauguration de celle-ci.
    La réponse de l’archevêque a été toute aussi tranchée, NON !
    Suggestion : vous pouvez le prononcer sur le parvis après la messe inaugurale.
    À force de se mêler de tout, de vouloir laisser sa marque sur tout, Macron ne se fait que des ennemis partout.

    • Néanmoins , à la prochaine élection notre clergé appellera à voter pour les mêmes ,piégés qu’ils sont par quelques affaires et surtout par les médias et la « reductio ad hitlerum ».

      • Le clergé catholique français n’intervient pas dans les élections.
        Le recteur de la grande mosquée de Paris oui !

  7. Enlever la vie était réservé à Dieu et aux bourreaux, les bourreaux ont disparu après la loi Badinter sur l’abolition de la peine de mort en 1981. Bizarrement, les représentants du peuple (mais le représentent-ils vraiment ?) sont plus réticents à ôter la vie d’un criminel que celle d’un malade ou d’un vieillard jugé encombrant. Peut-être est-ce là la solution au vieillissement de la population proposée par nos élus. On me rétorquera que c’est le progrès, que la société change. Peut-être. Il existe des situations très complexes où un patient demande à mourir, et un débat doit être ouvert sur la question, mais ce qui est en train de se décider est autre chose, cela traduit certainement la dérive profonde d’une société sans âme et sans spiritualité.

  8. Cette proposition de loi est abjecte, tout comme la loi Veil concernant l’avortement et qui se suffisait à elle-même, la loi Leonetti se suffisait aussi à elle-même ! Ce projet de loi est une sorte de loi économique car moins de retraite à payer, moins de coût pour la sécurité sociale etc…. Développer les soins palliatifs coûteraient trop cher, on préfère « éliminer » ! Drôle de façon d’aimer son prochain, si j’avais un proche atteint d’une maladie incurable, je ferais tout pour l’aider jusqu’au bout en lui apportant tout mon Amour, c’est le plus bel acte qu’on puisse lui donner ! Si le délit d’entrave est de plus voté, je plains les soignants qui devront pratiquer ce geste fatal ! On « criminalise » légalement ! Le serment dr’Hippocrate est bafoué ! On a supprimé la peine de mort (ce qui est une bonne chose)s, mais on a constitutionnalisé l’IVG , et on légalise l’euthanasie ! C’est un gouvernement qui prône la mort. En « tuant » Dieu, on a tué l’Homme
    Et voila où cela nous a mené, nous mène : une société de déshumanisation, une société en voie de perdition

  9. Grande porte ouverte aux dérives. Ce n’est plus seulement le grand remplacement c’est la conférence sur la solution finale du problème senior blanc.

  10. Institutionnaliser l’assassinat des vieux. Faudrait-il prévoir un garde du corps pour mourir en paix? Car nous y allons tous.

    • Je ne sais pas. Moi, j’ai fait mes directives anticipées chez le notaire (donc équivalentes à un testament et répertoriées comme telles) où il est écrit, entre autres, qu’en cas de doute de ma personne de confiance, sur le pourquoi de mon décès, elle portera pliante pour meurtre.

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