[EDITO] Faudrait peut-être voir à prendre une décision !

macron

Ça y est, on a franchi la barre des cinquante jours. Cinquante et un jours, exactement, ce 4 septembre, que le gouvernement est démissionnaire. Un record, sous la Ve, et même sous cette malheureuse IVe tant décriée ! La IVe, parlons-en, justement. Certes, vingt-deux gouvernements en douze ans, mais, au moins, le président de la République qui inaugurait les chrysanthèmes ne mettait pas deux mois pour nommer un président du Conseil (c’est ainsi qu’on appelait, à l’époque, le Premier ministre).

Macron, inventeur du quinquennat à deux ans

Et, « petit détail » qui échappe à beaucoup aujourd’hui, la prochaine élection du président de la République au suffrage universel ne venait pas polariser, pour ne pas dire polluer, le débat politique, puisque le chef de l’État, élu par les parlementaires, comptait alors pour des prunes. Ne nous racontons pas d’histoires et n’essayons pas de la refaire, mais sous la IVe, par exemple, un Laurent Wauquiez, fort de son « groupe charnière » à la Chambre, serait entré au gouvernement, n’ayant pas le souci de la prochaine présidentielle. Nous ne disons pas que c’était mieux sous la IVe mais, aujourd’hui, cette Ve finissante semble cumuler les tares de la Ve et de la IVe. Et on dit « merci qui » ? Merci, Emmanuel Macron qui, donc, a fait pire que Jacques Chirac. Ce dernier avait inventé le septennat à deux ans en décidant la dissolution de 1997. Macron, lui, a fait beaucoup mieux : il a inventé le quinquennat à deux ans avec sa dissolution, du genre coup d’un soir du 9 juin. Car ne nous y trompons pas : malgré toutes les tentatives du magicien de l’Élysée pour faire entrer un rond dans un carré – ou le contraire, c’est vous qui voyez -, le temps d’un Emmanuel Macron omnipotent est terminé, révolu. Tout le monde l’a bien compris. Sauf lui, peut-être. C’est bien là le problème.

Cinquante et un jours, donc, et toujours pas de Premier ministre nommé. On s’attendait à ce que la fumée soit blanche, ce mercredi. Et puis, non. Peut-être après la fin des Jeux paralympiques, nous murmure-t-on. Me direz-vous, au point où on en est... Comme on a « pété » les scores de nos Républiques, on se console maintenant en allant voir ailleurs : en Belgique, par exemple. C’est ce que faisait Le Monde, ce 4 septembre. Pour le déficit, on peut faire pareil : allez voir du côté de la Grèce ou, mieux, dans un charmant pays d’Amérique du Sud, il y a une trentaine d’années, par exemple. On se console comme on peut et comme on veut.

Le RN, faiseur de rois ?

Résumons très rapidement ces derniers jours : on nous a d’abord fait lambiner sur un éventuel « profil technique ». Un oiseau rare venu du CESE, dont le profil militant s’avérait un véritable épouvantail. Puis, on a ressorti l’option Bernard Cazeneuve et son chien de faïence Xavier Bertrand. Et c’est là que les choses deviennent intéressantes. Ce chien de faïence, le RN lui garde un chien de sa chienne : consulté téléphoniquement par Emmanuel Macron, Marine Le Pen a sorti la carte « censure ». Des années à se faire insulter, mépriser, par l’assureur de Saint-Quentin ne prédisposent pas à l’indulgence. Ainsi, le RN, évacué de manière éhontée, en juillet dernier, des responsabilités au sein de l’Assemblée nationale, devient en quelque sorte faiseur de « rois » de cette partie de poker qui n'en finit pas. « Roi » : un bien grand mot pour un personnage qui risque fort de ne pas avoir trop le temps de prendre de mauvaises habitudes à l’hôtel de Matignon... Idem pour Cazeneuve : « censure ». On retient de Cazeneuve son élégance vestimentaire, mais on a vite oublié ses déclarations d’une grande violence verbale à l’Assemblée, lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, à l’égard de Marine Le Pen qui, alors, était bien seule au sein de l’Hémicycle.

Ce mercredi soir, on en vient à se dire que l’option Castets, finalement, avait peut-être du bon. Macron l’aurait nommée et aurait convoqué en session extraordinaire l’Assemblée. L’option serait aujourd’hui réglée, purgée et les choses seraient plus claires de ce côté-là. Censurée, la directrice des finances et des achats de la mairie de Paris aurait remballé ses augmentations d’impôt et l’appel à manifester de l'extrême gauche passerait pour de la sédition. Mais non. Le maître des horloges a cru arrêter les aiguilles du temps. Il ne réussira qu’à casser le ressort.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

86 commentaires

    • A votre question « A-t-on vraiment besoin d’un gouvernement ? » en disant « que nos politocards ne servent à rien », je réponds oui. Exactement de la même manière qu’on a besoin d’un boulanger pour faire le pain, d’un facteur pour distribuer le courrier et d’un médecin pour vous soigner. Sans gouvernement (de n’importe quel bord), la France est à l’arrêt voire à la dérive.

  1. La IVe, certains semblent en avoir toujours le goût, qui réclament la proportionnelle aux législatives: le meilleur moyen pour voler leur vote aux Français, le règne des alliances et combines minoritaires qui deviennent majorité au nez et à la barbe de la (vraie) majorité. On ne s’étonnera pas que Renaissance la veuille pour se refaire de sa déroute, mais on peut être très surpris que le RN en veuille, car c’est l’entourloupe qui le laminera éternellement, avec de perpétuelles alliances « barrages ». Peut-être vaut-il mieux, pour commencer, supprimer le scrutin à deux tours: comme dans beaucoup de pays, un seul tour, les Français choisissent, et c’est tout, pas de « combinazione ». C’est plus simple et moins hasardeux.

  2. Le dernier lapin sorti du chapeau de ce jour , M. Barnier, l’homme du consensus , un homme posé, etc… toute cette rhétorique que l’on entend sur Cnews (émission de M. Cabannes) ; or du même cru que M. Barnier je puis vous dire qu’il draine derrière lui quelques casseroles et non des moindres (renseignez vous auprès des habitants de la région d’Albertville en Savoie sur les conséquences d’une implantation d’une usine d’incinération des déchets ), alors pas de propos élogieux sans faire le bilan de ce monsieur.

  3. Macron ommnipotent est fini pour la bonne raison que le PM arrivera avec son programme (ex. le pacte législatif des LR) et que si Macron lui mets des bâtons dans les roues, il démissionne. Le critère de censurabilité n’est qu’une vessie qui n’éclaire rien.

  4. E.Macron en puissant « Jupiter » ne peut que se réjouir de ses consultations de différents personnages destinés à choisir un Premier Ministre ,en parfaite harmonie avec une Assemblée Nationale …Le plus clivant est l’interrogation téléphonique avec Marine Le Pen ,rompant « l’arc Républicain » de G.Attal …

    • Je ne crois pas. Les responsabilités dans la situation actuelle sont parfaitement établies, ce qui n’empêche pourtant pas la presse de demander au RN d’être « responsable ». Pourquoi le serait-il, n’étant justement responsable en rien de l’impasse? Ignoré lors des postes à l’Assemblée, ostracisé comme « non républicain », l’avantage est que le RN ne doit strictement rien à personne et ainsi pourra participer à loisir à toute censure déposée, pour griller Macron à plus ou moins petit feu et le pousser à la démission au moment opportun. Le RN n’aurait rien à gagner à être « responsable », car on ne lui en sera nullement reconnaissant.

    • Absolument pas d’accord. Si le RN commettait l’énorme erreur d’avaliser la nomination de Xavier Bertrand à Matignon, alors ce serait un parti de lâches qui s’aplatit devant un de ses plus virulents ennemis qui a eu les insultes et mots plus durs contre lui.
      D’autre part, ce serait gravement trahir la confiance et la décision souveraine de ses 11 millions d’électeurs français qui ont voté pour le RN en rejet de Macron, et pour s’opposer fermement à la politique mortifère de son régime en place. Ce serait en outre rentrer dans les rangs, courber l’échine et devenir le vil et servile larbin si ce n’est le complice de la politique de Macron que le RN prétend combattre depuis des années.
      Non, si le RN a du cran et si c’est un vrai parti respectueux de la France, des Français, de la République et de la Constitution, alors il doit voter la destitution de Macron dans le cadre de la proposition déposée par les 80 députés de gauche au titre de l’art. 68, et qui est plus que justifiée tant le président a trompé le peuple français.
      Même si cette destitution n’a aucune chance d’aboutir par impossibilité mathématique de réunir les 347 voix nécessaires à l’assemblée (3/5°), Le RN doit marquer le coup, et il doit montrer qu’il est opposé à l’actuel exécutif. Cela permettra d’ouvrir le débat à l’assemblée devant toute la Nation française sur le coup d’Etat institutionnel de Macron pour s’accrocher au pouvoir alors qu’il a perdu la législative qu’il a provoquée par sa folle dissolution en « lançant sa grenade dégoupillée entre les jambes de l’opposition ».
      Au total, le RN doit se montrer un vrai parti d’opposition, et capable de prendre ses responsabilités face à l’arbitraire et de gouverner notre pays.

  5. Si l’on peut reprocher beaucoup de chose au locataire actuel de l’Elysée, on ne peut toutefois pas oublier son machiavélisme. Confier la gestion de la France à l’Europe pourrait très bien faire parti de son plan et l’absence de gouvernement serait une bonne excuse. Mais tout plan à sa faille quand un évènement inattendu survient.

  6. Au point où est arrivé Macron par sa propre faute, son arrogance, son mépris de tous et de tous, il est sa propre victime !
    C’est délicieux !
    Personne ne veut de la patate chaude pour Matignon !
    Les nominés qu’on jette en pâture « pour voir si ? », ne sont pas idiots, ils mettent la barre très haute pour accepter, ils ont bien raison !
    Ils ont raison, parce qu’ils savent que Macron déteste qu’on lui fasse de l’ombre !
    Aujourd’hui, « Macron c’est ou décision impossible, ou démission possible. »
    Quoiqu’il en soit, le grand perdant, c’est Macron !
    Macron a une fois de plus joué avec le feu, cette fois il s’y est brûlé !

    • En effet, il y a quelque chose de voluptueux à l’idée de penser que Macron dorme mal. Quant à la « patate chaude », qui en veut vraiment, et avec quelle équipe de compromis, un ministre à Droite, un à Gauche, et pourquoi? Pour dix mois, c’est à dire pour ne rien ou si peu faire, en ayant à gérer un déficit budgétaire catastrophique, pire qu’annoncé? Pour sauver Macron de ce qui pourrait bien être la crise qui le forcerait à la démission? Quel est l’intérêt aujourd’hui de sauver Macron?

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