[ÉDITO] Industrie française : Montebourg annonce une « boucherie »

Capture d'écran Marianne
Capture d'écran Marianne

Dans ces colonnes, il a largement été question, ces derniers temps, de la dette, du déficit public, notamment avec la séquence d’autosatisfaction de Bruno Le Maire devant la commission des finances du Sénat. Le projet de loi de finances de fin de gestion 2024 (PLFG) prévoit donc un déficit public de 178,2 milliards d'euros qui va creuser un peu plus la dette publique. C’est colossal ! Quand on sait que 83 % de cette dette publique est du fait de l’État ou d’organismes qui en dépendent, et, pour 9 %, des administrations de Sécurité sociale – les 8 % restants relevant des collectivités locales, qui ne s’endettent que pour investir et non pour fonctionner -, on est pris de vertige.

Un PIB « stimulé » par les JO...

178,2 milliards de déficit : cela devrait représenter, en 2024, 6,1 % du produit intérieur brut (PIB) français. D’autant plus colossal et inquiétant que ce PIB ne progresse que mollement. Rappelons-le, le PIB mesure l’activité économique du pays. Or, cette croissance du PIB devrait être de 1,1 %, en 2024 : pas de quoi pavoiser. Et si l’on se risque à lire les fiches de l’INSEE, on apprend ceci : « Le produit intérieur brut (PIB) en volume accélère modérément au troisième trimestre : il progresse ainsi de 0,4 %, après +0,2 % au deuxième trimestre, stimulé par les Jeux olympiques et paralympiques de Paris. » On peut se réjouir, en première approche, d’une sorte d’effet d’aubaine JO, mais cela n'échappera pas aux personnes sensées que les JO ne sont pas la vraie vie – n’en déplaise à Emmanuel Macron -, que c’est terminé et que cette stimulation olympique ne peut avoir des effets durables sur l’activité économique d’une puissance comme la France.

Une « maison France » qui achète plus qu'elle ne vend 

L’activité économique, parlons-en aussi à travers l'évocation de notre balance commerciale. Si l’on en croit les données des douanes françaises, « au troisième trimestre, le solde commercial de la France se détériore de 0,6 milliard d’euros par rapport au deuxième trimestre 2024 et atteint -22,3 milliards d’euros ». Nos exportations ont baissé de 3 % au troisième trimestre pour atteindre 147,2 milliards d’euros, quand nos importations se sont élevées à 169,4 milliards d’euros. On tourne la chose comme on veut, la maison France achète plus qu’elle ne vend. Colbert, que certains veulent déboulonner, doit se retourner dans sa tombe !

Record de faillites : « une boucherie »

La maison France, justement ! Ce 11 novembre soir se terminait le 12e Salon du Made in France, porte de Versailles à Paris. Durant cette manifestation emblématique, un tout aussi emblématique défenseur du « Made in France », l’ancien ministre du Redressement productif sous Hollande, Arnaud Montebourg, reconverti dans la production de miel, a dressé un tableau horrifique de la situation de l’industrie française. « Regardez ce qui nous arrive… L’automobile française […] les boîtes les plus saines ont leur cash qui est en train de fondre. On sait qu’on va perdre 40.000 emplois dans les mois qui viennent. On va entendre parler de Valeo, de Michelin, mais dessous, c’est une boucherie. »

Et Montebourg d’évoquer un « record de faillites devant les tribunaux de commerce », devant un Roland Lescure, ministre il y a encore peu de l’Industrie et de l’Énergie, médusé. Un phénomène, d'ailleurs, qu’on ne découvre pas ce matin. Fin août dernier, déjà, Éric Heyer, analyste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), déclarait à Public Sénat : « Ce mur des faillites est annoncé depuis longtemps. » En juillet 2024, on avait déjà dépassé les 63.000 entreprises défaillantes depuis le début de l’année. Une hausse de 20 % sur un an. Énorme ! Et lorsque l’on sait que ces défaillances augmentent deux fois plus vite chez les petites et moyennes entreprises – celles qui irriguent « nos territoires », pour reprendre la formule adorée des technocrates parisiens -, on a de quoi être inquiet.

 

 

Mais écoutons encore Arnaud Montebourg, qui veut en finir avec « l'intégration juridico-politique [au sein de l'UE] à coups de batte de baseball sur la tête des nations européennes ». « Ça ne marche pas ! », estime-t-il. Ce record de faillites, d'ailleurs, il est dû à quoi, selon lui ? « L’électricité en est la première cause. Pourquoi ? Parce qu’on a obéi aux règles stupides du marché européen que défendait M. Lescure quand il était au gouvernement. » Un Lescure, plus médusé que jamais sur son radeau de la Macronie en plein naufrage. Et Montebourg, iconoclaste, d’appuyer là où ça fait mal : « Parce qu’on a la religion de la loi européenne… » Question subsidiaire : a-t-on le droit de changer de religion ? Sans pour autant vouloir détruire le temple, il serait peut-être grand temps de se convertir… au réel. Trump - on aime ou on n’aime pas, ce n’est pas le sujet – va sans doute nous y obliger.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

70 commentaires

  1. Hé oui , a force de matraquer l’industrie et l’agriculture française avec de normes abusives et stupide, alors que l’on accepte les produits étrangers d’Amérique du sud et de Chine qui ne respectent absolument pas ces normes, On ne risque pas de s’en sortir. Une solution : si l’on veux appliquer des normes en France , il n’y a qu’a taxer les produits d’ailleurs qui ne respectent pas ces normes. Ainsi, le déficit sera vite comblé , et la France s’en portera que mieux.

  2. Ayant une formation en gestion, j’ai appris que la mondialisation, qu’on l’aime ou pas, est un fait ! Tout comme les éléments naturels (pluie, froid, neige, gel, etc) ou les saisons sont des fait pour les paysans. Depuis des millénaires les paysans ont appris à faire avec et à utiliser ces éléments à leur profit. De même, le commerce entre nations existe pour la simple et bonne raison qu’aucune nation ne dispose chez elle de toutes les ressources dont elle a besoin. Par exemple, si les Français excellent dans la construction d’avions et d’installations nucléaires, en revanche ils ne possèdent pas les gisements pétroliers qui leur permettraient de faire rouler leur voiture ou de faire fonctionner leurs usines. Par conséquent ce n’est pas la mondialisation qui est le problème comme le croient les gens de la droite souverainiste façon BV ou de la gauche souverainiste façon Montebourg -Chevènement. Le problème c’est nous !!! Nous voulons garder un système de protection sociale hypertrophié qui va constituer autant de charges qui va rendre les produits Français non concurrentiels sur un marché ouvert. Si on ajoute à cela le zèle normatif résultant de la nouvelle religion escrolo, nous sommes en train de détruire « joyeusement » et notre agriculture et notre industrie, tous seuls comme des grands !

  3. Il faut reconnaître tout de même à M. Montebourg qu’il est le seul homme politique à vraiment travailler, à s’être lancé dans le privé et à se battre pour faire vivre quelque chose. Ils ne sont pas si nombreux dans ce cas pour que cela mérite d’être souligné.

  4. Une question pour les escrologistes : les bombes en Ukraine sont-elles bio ? Pas de gaz de combustion toxiques, pas de particules fines ??? Quant aux bipèdes décimés, la réponse est logique : un corps humain est totalement biodégradables….

  5. Un certain Claude Allègre, alors ministre de l’Éducation Nationale, parlait de « dégraisser le mammouth ». Vouloir réformer l’état Français tel il est constitué aujourd’hui, revient à vouloir transformer un diplodocus obèse en une svelte gazelle. Un défi que peu de personnalités politiques, issues du diplodocus sus-cité, sont prêtes à relever.

  6. Si l’on suit le raisonnement de mr Montebourg, la dégringolade est loin d’être finie: le « Mercosur » qui nous est annoncé et qui va nous être imposé va détruire tout notre agro-alimentaire. Je me souviens de mes profs lorsque j’étais en 4° ou en 3° (milieu des années 70) qui nous prophétisaient un monde « heureux » ou la France aurait une « industrie » essentiellement tertiaire. Le tertiaire, grâce à l’informatique, est parti en Inde ou aux Philippines et il ne nous reste que nos yeux….Le bon sens a quitté la France avec le décès de mr Pompidou.

  7. Il fallait être aveugle pour ne pas voir les fermetures de nos entreprises. Elles ne tenaient que par un faible coût de l’énergie, mais nos politiques se sont alignés sur l’Allemagne pour torpiller notre principal atout. Nous sommes dirigés par des traîtres et ceux qui participent à leur réélection sont les complices.

  8. Montebourg est comme le bon vin. Plus il vieillit,… et plus il s’améliore ! N’oublions pas que, de la même façon que Benoit XVI avait été viré pour faire la place à François, Montebourg a, lui aussi, été viré pour faire la place à Macron (qui en a profité pour vendre Alstom à ses copains).

  9. « les boîtes les plus saines ont leur cash qui est en train de fondre. On sait qu’on va perdre 40.000 emplois dans les mois qui viennent. On va entendre parler de Valeo, de Michelin, mais dessous, c’est une boucherie. »

    Cela ne sera pas le cas des industries d’armement française! Il est vrai, ceci payé par les français (ou plutôt l’état, car, il parait que c’est gratuit lorsque c’est l’état qui paye, selon l’un de nos anciens présidents)

    En effet, « La France a l’intention d’achever les livraisons prévues de 600 bombes de précision AASM à l’Ukraine d’ici fin 2024. Ces livraisons ont été confirmées par le compte officiel du ministère français des Armées, qui a également annoncé l’expansion de la production de ces bombes pour répondre aux besoins des forces aériennes françaises et ukrainiennes. La production devrait atteindre plus de 1200 unités d’ici 2025 . » (selon Aviapro.)

    Et ensuite, Bouygues sera ravi lorsqu’il lui faudra reconstruire tout ce qui a été détruit, si on a la visite d’un Sarmat!

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