[ÉDITO] La patrie est en danger, la cinquième colonne est parmi nous !

La cour martiale, d'une efficacité redoutable, a déjà prononcé ses premières condamnations.
Capture d'écran
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Il faut bien se mettre une chose dans le crâne : il n’y a pas de bons et de mauvais patriotes. Non, les choses sont beaucoup plus simples que ça : d’un côté, il y a les patriotes tout court et, de l’autre, les traîtres. Point barre. Pour ces derniers, si la peine de mort existait encore, ce serait, direct, le poteau d’exécution et les douze balles dans la peau qui vont avec. C’est en gros, en forçant légèrement le trait, le « récitatif » officiel qui est en train de se développer dans le pays depuis qu’Emmanuel Macron en a appelé à la patrie, lors de son adresse aux Français de la semaine dernière. Émettre le moindre bémol quant au discours officiel élyséen sur la guerre en Ukraine relèverait tout simplement de la haute trahison. Les douze balles ne sont pas pour tout de suite. En revanche, la cour martiale, d'une efficacité redoutable, a déjà prononcé ses premières condamnations.

« L'adversaire de l'intérieur », pour ne pas dire l'ennemi

Prenez, ce lundi matin, l’éditorial de Renaud Dély, sur France Info. Le titre : « Menace russe : Emmanuel Macron face aux "adversaires de l'intérieur" ». On ne peut être plus clair. Quoique... Pour l’instant, il est question d’« adversaires », pas encore d’ennemis, mais cela ne saurait tarder. On va dire qu’on est dans l’escalade de la violence verbale et qu’il faut y aller mollo. L’ennemi de l’intérieur nous ramène inévitablement, pour qui a quelque culture historique ou souvenirs familiaux racontés le soir devant Les Dossiers de l’écran, à l’époque de la « drôle de guerre » durant l’automne 1939 et l’hiver 1939-1940, ces mois d’incertitudes qui précédèrent la grande offensive allemande et la déroute française. À l’époque, l’ennemi intérieur, c’était, entre autres, le Parti communiste français, inféodé à Moscou, pacte germano-soviétique obligeait.

Et aujourd’hui, sans évoquer ces mauvais souvenirs pour ce gentil PCF qui fait partie du fameux « arc républicain » comme chacun sait, l’ennemi - pardon, l’adversaire - de l’intérieur, c’est l’extrême droite, les Le Pen et consorts et, pour faire bon poids, LFI et Mélenchon, les deux mis dans le même sac-poubelle bien pratique des « extrêmes ». C’est aussi, et peut-être surtout, la « bollosphère », qui gagne de façon inquiétante du terrain dans la bataille médiatique française avec, en vrac les Ferrari, Praud, Hanouna et… consorts. L’ennemi intérieur, en 39-40, c’était aussi la fameuse « cinquième colonne ». Des boches déguisés en bonnes sœurs inversant les panneaux indicateurs sur les routes, des faux touristes prenant des photos pour préparer l’arrivée des colonnes ennemies, des propagateurs de fausses nouvelles pour fiche le moral à zéro d’une population déboussolée. Aujourd’hui, la cinquième colonne accomplit déjà son œuvre maléfique, pilonne sans nuance le chroniqueur de France Info : « Certes, Vladimir Poutine n’est pas sur le point d'envahir la France, mais la "cinquième colonne" de ses partisans tapis dans le pays a déjà déclenché les bombardements de fake news », bombarde Renaud Dély.

La petite armée du général Bolloré fait peur !

Quelles « fake news » ? Pour faire court, Macron profiterait de la situation internationale pour se refaire la cerise, préparer son coup d’après à Bruxelles lorsqu’il aura débarrassé le parquet ciré de l’Élysée, et il fait exprès de jouer sur les peurs des Français (toute ressemblance à une situation ayant existé, etc.). Parce que, c'est évident, en 2027, Macron va se retirer dans le Berry pour élever des moutons ! Et l’on évoque un article du JDD de ce week-end sur cette instrumentalisation de la peur qui a obligé le Palais à pondre un démenti : « La présidence de la République dément avoir employé les termes "faire peur" qui lui sont prêtés dans l’édition du jour du JDD. Il ne s’agit ni de son expression, ni de son intention. En cette période grave où, face à la menace russe, la quasi-totalité des chefs d’État et de gouvernement européens prend des mesures inédites pour assurer leur défense, chacun doit veiller au respect de la parfaite véracité des faits. » Fort bien. En tout cas, un tel démenti révèle une chose : si Macron n’a pas voulu faire peur aux Français – ce qu’il a, du reste, parfaitement réussi -, il semblerait que Macron a peur, peut-être pas des Russes, mais des chevau-légers de la petite armée du général Bolloré. C’est inquiétant, car si la peur n’évite pas le danger, elle est en général bien mauvaise conseillère !

Alors, comment ne pas s’inquiéter de la tournure prise par les choses, dans le pays ? Un Premier secrétaire du PS qui qualifie Marine Le Pen de « patriote de papier » (écho aux « Français de papiers » ?), d’« adversaire de l’intérieur », pour ne pas dire « ennemi de l’intérieur ». On imagine qu'Olivier Faure est déjà passé au magasin du corps pour essayer son treillis et ses rangers, au cas où... Émettre le moindre doute sur la politique de Macron et des européistes fait de vous, ipso facto, un « poutiniste », un « trumpiste », un traître à la patrie. La patrie, ce machin qui était devenu ringard et qu’on ressort maintenant, comme par miracle, du musée des incongruités… Faudra-t-il, aussi, enfermer dans des baraquements de fortune, gardés par des gendarmes mobiles, baïonnettes au canon, les brodequins dans la gadoue, tous ces collabos potentiels ? En n’omettant pas d’y parquer, aussi, les Morin, Fillon et Guaino qui ont, semble-t-il, aussi du souci à se faire, compte tenu de leurs récentes déclarations ne cadrant pas vraiment avec le « récitatif élyséen ». Cinquième colonne, mythe ou réalité ? Visiblement, les braves de la 7e compagnie ont leur petite idée sur le sujet. Il serait temps de revenir à la raison, alors que la guerre n'a pas commencé.

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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