[ÉDITO] TVA et auto-entrepreneurs : arrêtez d’enquiquiner les braves gens
Après les ZFE (pour les voitures), les DPE F et G (pour les passoires thermiques), voici une nouvelle PBG - Persécution des Braves Gens, puisque les acronymes sont à la mode, sacrifions-y - avec, cette fois, pour cible, les auto-entrepreneurs.
Pourquoi évoquer cet abaissement du seuil de la TVA (de 75.500 à 25.000 euros de chiffre d’affaires) qui peut apparaître anecdotique à certains (surtout s’ils ne sont pas concernés) ? Parce que cette discrète mesurette, un peu mesquine, planquée dans le projet de budget qui aurait pu passer en catimini, est éminemment emblématique.
L’État cherche de l’argent partout mais refuse de s’attaquer aux grands gisements improductifs, la gabegie administrative et migratoire. Une seule solution : continuer de faire inlassablement les poches de ceux qui se retroussent les manches tous les matins pour produire, dans de grandes ou de micro-entreprises. « Tout ce qui bouge, on le taxe ; ce qui bouge encore, on le réglemente ; tout ce qui ne bouge plus, on le subventionne. » C’était la boutade ironique de Reagan à l’endroit des démocrates ; elle pourrait aujourd’hui remplacer notre devise nationale.
La TVA est est en principe neutre pour celui qui la collecte, qui se contente de la répercuter, sauf qu’elle n’est pas neutre pour le client. Pour l’auto-entrepreneur (cette mesure, selon la FNAE [Fédération nationale des auto-entrepreneurs], touchera 250.000 auto-entrepreneurs), dès lors, deux solutions, perdantes toutes les deux : soit il monte son prix pour garder intact son bénéfice, au risque de perdre ses clients, soit il baisse ses prix pour garder ses clients et sacrifie sa marge. Sans compter, en sus, la complexification de sa comptabilité.
Un statut étonnamment moderne
Le statut d’auto-entrepreneur a été créé en France en 2008 par Hervé Novelli, alors secrétaire d’État du gouvernement Fillon, dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie. Hervé Novelli protestait, d’ailleurs, vigoureusement, sur X, contre cette atteinte à son bébé : c’est un « contresens économique ! »
Le but de cette création du statut d’auto-entrepreneur était de donner un cadre souple, facile à mettre en œuvre, sans charges trop importantes ni paperasse administrative trop compliquée. L’idée était aussi de lutter contre le travail au noir en donnant une façon simple de déclarer l’activité ponctuelle ou effectuée en plus d’un travail ordinaire, ou par un retraité, un étudiant, un chômeur souhaitant remettre le pied à l’étrier, une mère de famille désireuse de travailler à son rythme, et sur le lieu de son choix. Ces dernières sont nombreuses, du reste, depuis plus de quinze ans, à avoir embrassé avec enthousiasme ce statut. Pour elle, on a même créé un néologisme : « mompreneures ». Elles gagnent rarement des mille et des cent, mais gardent ainsi une activité qui leur évite d’être sur la touche. On croyait que le but de nos gouvernements féminolâtres était, justement, de tout faire pour les garder dans le monde du travail...
Tout se fait très vite en ligne, pas besoin de l’aide d’un fonctionnaire spécialisé pour remplir des papiers compliqués. Bref, la vraie bonne idée de droite, quand la droite avait encore des idée (sur le plan économique, veux-je dire, car sur le reste, il y a longtemps qu’elle n’en en plus). Cela libère l’entrepreneuriat, c’est le libéralisme bien compris, pas celui de la mondialisation mais celui de la création.
Et depuis sa création, le succès de ce statut ne se dément pas, au contraire, avec environ 700.000 nouvelles immatriculations chaque année. Alors, évidemment, ces petites entreprises ont un plafond de chiffre d'affaires à ne pas dépasser - rehaussé par Bruno Le Maire, signalons-le au passage, c’est un bon point pour lui (et il n’y en pas tant que ça !) -, mais elles peuvent servir de tremplin, ou de test, avant de se lancer dans une entreprise classique et de plus grandes ambitions.
L’auto-entrepreneuriat, dans sa conception, est même assez moderne, car il correspond à un style de vie plébiscité dans notre société, notamment par les jeunes : être son propre patron, être maître de la gestion de son temps, télé-travailler et ne pas être coincé par un engagement trop contraignant.
Mais dans le nom même d’auto-entrepreneur - qui a ,du reste, été transformé en micro-entreprise, contre l’avis d'Hervé Novelli -, il y a les germes de la liberté (auto) et de la production (entreprise), toutes choses secrètement abhorrées en France.
Avantages amoindris
On essaie, d’ailleurs, d’en amoindrir les avantages - sous couvert de meilleure couverture sociale -, depuis un certain temps. L’évolution du taux global de cotisation a déjà augmenté : il passera, en trois ans, de 21 % (2023) à 26 % (2026), et il y a désormais, depuis 2015, une CFE (cotisation foncière des entreprise) à compter de la 2e année et à partir de 5.000 euros de chiffre d'affaires), même si votre local est votre maison (les auto-entrepreneurs, souvent, travaillent à domicile), pour laquelle vous payez déjà une taxe foncière. Seule une poignée de professions en sont exonérées, comme artiste-peintre… très peu. Pour les autres, c’est une double imposition, mais en France, on en a l’habitude : de l’assiette de l’impôt sur le revenu, on ne déduit pas les taxes foncières, d’habitation, les impôts sur la succession ni un forfait pour la TVA, n’est-ce pas ? En toute logique, ce devrait pourtant être le cas.
Comme pour noyer son chien, on l’accuse d’avoir la rage, on dénigre volontiers le statut d’auto-entrepreneur : sa couverture insuffisante, son caractère précaire, son lien de client à fournisseur moins contraignant pour le premier que d’employeur à salarié. Mais, précisément, c’est ce qui fait son succès : le dénaturer, ce serait le tuer.
Dans un entretien, il y a quelques mois, Hervé Novelli avait confié avoir eu le sentiment que des ministres d’Emmanuel Macron n’aimaient pas ce statut et cherchaient même à le faire disparaître progressivement.
Mais si on tue à petit feu le statut des auto-entrepreneurs, ces derniers ne travailleront plus et il faudra les aider, par de l’aide sociale. Qu’à cela ne tienne, le raisonnement est le même pour le petit propriétaire que l’on asphyxie : son destin est de finir en logement social et on ne commencera à l’aimer et le plaindre qu’à ce moment-là. Et tout cela, évidemment, sera rémunéré par la TVA ainsi collectée… jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus, que la source soit tarie. Et que l’on trouve une autre idée de PBG.
Mise à jour à 20h30 : Au journal télévisé de France 2, Éric Lombard annonce la suspension temporaire de cette mesure. "Nous avons entendu les demandes des entrepreneurs", dit-il, il y aura donc des "concertations". Boulevard Voltaire suivra cela avec intérêt.
4 commentaires
S »en prendre aux braves gens,c’est cool,s »en prendre aux voyous ,c’est risqué.
Au milieu des années 80, il y a donc 40 ans Mitterrand disait: « Trop d’impôt tue l’impôt »! Cela arrivera un jour ou l’autre! A force de ponctionner une part grandissante, la gâteau rétrécira! Bien que n’étant pas un aigle, j’ai compris cela! Comment se fait-il que des gens bardés de dtplomes, passés par de grandes écoles dont lENA, soient incapables de comprendre? A moins qu’ils ont compris mais que le but recherché est d’appauvrir par la spoliation de plus en plus de gens? Klaus Schwab, le vieux gourou du WEF (Forum économique mondial) a dit ; « Vous ne posséderez plus rien et vous serez heureux »! Je suis peut-être complotiste, et si la ruine du pays en tuant l’économie et la spoliation fiscale des français n’étaient pas le moyen de parvenir à dépouiller les Français? Que ce soit l’objectif inavoué du pouvoir ou non, nous en prenons le chemin.
Bel article! Tout ca est bien vrai ! Juste un bémol.. les petits propriétaires qui ne peuvent plus payer..n’auront sans doute pas droit aux logements sociaux ils sont réservés…
N’est ce pas le 6 fevrier que la République fait tirer sur le peuple ?