Édouard Philippe dans la présidentielle de 2027 : est-ce bien raisonnable ?

© Capture écran TF1
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Jouer à contretemps, voilà qui fonctionne bien en jazz ; un peu moins en politique. Ainsi Édouard Philippe vient-il d’annoncer sa candidature à l’élection présidentielle de 2027. Pour continuer de filer la métaphore musicale, il y aurait comme un problème de tempo, si ce n’est de décence.

En effet, il n’aura échappé à personne que l’Élysée n’en finit plus de désespérément chercher un candidat en CDD pour Matignon, que l'Assemblée nationale est « ingouvernable » et que la France ne se porte pas au mieux. Bref, l’initiative de l’ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron est à peu près aussi opportune que celle du gentleman s'inquiétant, sur le pont du Titanic, de ne pas avoir assez de glaçons dans son whisky alors que le fameux navire fonce droit sur l’iceberg.

C’est au Point que notre homme délivre donc le scoop en question. L’occasion, pour lui, de nous livrer ces immortelles réflexions : « Il y a une forme de péril démocratique, qui tient au fait qu’un grand nombre d’électeurs RN doivent avoir le sentiment qu’ils n’ont pas gagné l’élection législative en raison d’une union contre-nature entre des gens qui ne sont d’accord sur rien. » Sans blague !

Obsédé par le Rassemblement national

Et d’ensuite assurer : « Lorsque j’ai expliqué les raisons pour lesquelles ma ligne au second tour [des mêmes élections législative, NDLR] était "ni RN ni LFI", c’est notamment ça que j’avais en tête. » Mais au-delà du « ni-ni », le problème d’Édouard Philippe serait plutôt le « qui-qui », soit celui de savoir « qui », à droite, est en mesure de relever le gant.

Coincé entre Wauquiez et Ciotti ?

Laurent Wauquiez ne trouve évidemment pas grâce à ses yeux : « C’est parfois un peu compliqué de saisir les positions de la droite républicaine. Laurent Wauquiez a dit, le premier jour de son mandat : "Pas de discussions !" Et le lendemain, il a proposé un pacte législatif qui impose de discuter avec les autres forces du bloc central. » Pour résumer, Laurent Wauquiez ne saurait donc plus trop bien où il habite. Mais ne serait-ce pas, aussi, le cas du nouveau prétendant à la magistrature suprême ? Éric Ciotti, lui, au moins, n’a plus ce genre de soucis, ayant décidé de reconstruire la droite à proximité du Rassemblement national. Trois hommes pour se partager les décombres de cette droite naguère donnée pour être de gouvernement, voilà qui en fait au moins deux de trop.

En attendant, Édouard Philippe affirme que s’il arrivait à l’Élysée, sa priorité consisterait à restaurer à la fois autorité et comptes publics. Ce serait effectivement bien le moins. Son autre objectif ? Battre Marine Le Pen en 2027. Sa martingale ? « Je me prépare pour proposer des choses aux Français. Ce que je proposerai sera massif. Les Français décideront. » Quelle ambition ! Surtout pour un homme ayant « appris, ces dernières années », qu’il « fallait être soi-même ». Quelle originalité ! Un manuel de développement personnel n’aurait pas mieux dit.

De l’art de faire l’unanimité contre lui

En attendant, ce vrai-faux événement suscite bien des réactions, entre sourires navrés et consternation généralisée.

François Patriat, sénateur de Renaissance, le parti présidentiel : « Édouard Philippe fait preuve d’individualisme alors que l’urgence, c’est de trouver une stabilité. »

Pour Sandrine Rousseau, députée écologiste, l’ancien Premier ministre « ne pense qu’à lui ». Quant à Aurélie Trouvé, l’une de ses consœurs mélenchonistes à l’Assemblée, elle juge que cette annonce est, « au mieux indécente, au pire une insulte aux Français […], Édouard Philippe "n’aspire qu’à poursuivre et aggraver" la politique d’Emmanuel Macron ». Dans un registre plus lyrique, Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, note : « Cette annonce n’est pas facilitante pour comprendre ce qu’il se passe et cela ne répond pas aux attentes des travailleurs et des travailleuses. »

De son côté, la députée RN Edwige Diaz résume : « Je trouve que cette annonce est indécente, au moment où la France est en crise et plongée par Emmanuel Macron dans un bourbier, on a quelqu’un qui vient nous parler de ses ambitions personnelles. » Pas faux. Tout comme cette parlementaire a le mérite de rappeler : « Quand je pense Édouard Philippe, je pense réforme des retraites, je pense 80 km/h, je pense taxe sur les carburants, je pense gilets jaunes. » Encore moins faux.

In fine, on se demande bien quelle mouche a pu piquer le maire du Havre, tant le timing de cette annonce paraît hasardeux. Mais ce ne serait pas la première fois qu’un éminent membre du cercle de la raison serait surpris en flagrant délit de déraison. À moins que Philippe ne se dise que Macron n'ira pas au terme de sa croisière présidentielle...

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

56 commentaires

  1. Edouard Philippe, pour moi c’est du Macron Jumeau . même politique , pour l’immigration, hausse des impôts déguisée , promesses non tenues – comme nombre de pseudos candidats, il veut l’être pour l’histoire, pour lui . Et que ferait il pour résorber le déficit ? prendre l’argent que les français ont épargné ? quel destin nous prépareit-il , je ne voterais par pour lui .

  2. Normal. Edouard Philippe regarde devant lui l’échiquier qui se dessine et lorgne la case qu’il voudrait occuper. Les autres, dans quelques temps, lui emboîteront le pas. En attendant que le jeu des chaises musicales commence, on peut déjà dire : « Rien ne va plus »

  3. Encore un qui est sensible aux ors de la république. Un peu trop peut-être, principalement si c’est en compagnie de communistes.

  4. En général, celui qui démarre le premier arrive bon dernier. On a eu DSK. Et, plus récemment, Alain Juppé, puis Xavier Bertrand… Tous, désormais dans les poubelles de la politique. Mais bon sang, pourquoi l’égo de ces gens les empêche d’apprendre ?
    Quant au contenu de ses propositions, comment dire, laissons parler Audiard :
    « J’en ai connu des faux-culs, mais vous êtes une synthèse. »

  5. Loin de moi l’idée de voter pour lui. Ses années de premier ministre et les décisions qu’il a prises (dont certaines sont à l’origine de la crise des Gilets Jaunes…) préfigurent ce que serait sa politique. Mais je ne m’insurge pas de sa déclaration. Il a parfaitement compris que cette situation ne peut plus durer et que Macron va bien être obligé de partir avant la fin de son mandat. Donc Philippe se positionne dans les starting-blocks. Tout le monde sais bien que Marine en sera, et Wauquier aussi. Il veut offrir à la masse des électeurs « ventre mou » qui commencent comprendre que Macron s’est fini, une solution leur permettant de continuer à croire qu’ils sauvent les meubles… Pour eux « il faut que rien ne change pour que rien ne change »… Pas à gauche, pas à droite, éternellement l’entre deux chaises et Édouard Philippe est leur prophète.

  6. Exactement! E. Philippe pose ses marques . Il a vu que macron risque d’être destitué…il se met en place pour une éventuelle élection !!! C’est clair…
    Dans tout ce beau monde chacun ne pense qu’à soi, au salaire juteux suivi d’une retraite non moins juteuse .. tous les tocards de macron sont en ligne et surtout pas pour sauver la France. Ça va! Taisez-vous ! On a compris! Nous avons besoin de.ministres qui connaissent le sujet à traiter…pas d’apprentis entourés d’aides qui, de plus, ne suffisent pas …voir Le Maire , aux finances…même pas expert comptable!

  7. ´N’oublions pas le 80 km/ h et tous les faux prétextes pour taxer les automobilistes ayant dépassé de 6 km/h sur des routes ou seuls les escargots traversent, n’oublions pas la réforme de la taxe d’habitation ou tout le poids de la fiscalité a été transféré sur le dos des propriétaires pour une soit disant justice sociale alors que simplement une grande portion des profiteurs du système ne la payait déjà pas , puisque les services fiscaux étais incapables de la recouvrir dans les citées.
    Je crois que tout ceux qui ont portés la macronie aux pouvoir , de près ou de loin devrons prendre leur part du désastre dans lequel ce président va laisser le pays , explosion de la délinquance, abandon des services public justice éducation santé, perte d
    ´Influence de la diplomatie notamment en Afrique , soutien à un pays en guerre avec qui nous n’avons aucun accord de défense ,inaction face à l’immigration de masse ect … . j’en oublie tellement leurs incompétences son manifeste au yeux des français .
    Et ces types peuvent penser que nous serons amnésiques, c’est possible au vue du résultat des législatives puisque les moutons ont tiré de toutes leurs forces le front républicain. À voir l’avenir nous le dira ?

    • Tous les panneaux de limitation de vitesse à 80 km/H étaient à peine tous fixés qu’il avait déjà contrevenu à SA règle en retournant au Havre pour s’y « reposer » ! …
      AU SECOURS ! … La « macronie » sera une « douceur » en comparaison de la « philippie » ! …

  8. Non, non et trois fois non. Pendant la crise du Covid cet homme m’a interdit d’aller me promener dans les bois à 200 m de chez moi sauf à me signer une autorisation. Pendant la même période il n’a ccessé les conférences de presse pour expliquer comment il faisait tout bien et se dédouaner à l’avance. Il était le premier ministre de la macronie, ce qu’il a l’air d’oublier. Il ne me rappelle que de mauvais souvenirs et quand il parle de restaurer l’autorité je crains que ce soit surtout le pauvre Français moyen qui en fasse les frais et qu’elle épargne ceux contre qui il faudrait qu’elle s’exerce. Pour moi c’est un Tartuffe.

  9. Comme d’hab… une annonce polémique qui fait parler (voire pleurer) dans les chaumières, ça fait diversion (une de plus) et pendant ce temps la population continue à palabrer sur des bêtises pendant qu’ils avancent leurs pions dans l’ombre.

  10. Vous ne vous en êtes pas encore aperçus les uns et les autres , Édouard Philippe est « benêt » , dans le « cercle » ils le savent tous !

  11. 3 ans premier ministre, le bilan c’est de la dette et les 80 km/h qui ont couté des millions aux collectivités…Pour moi, ce sera non à son retour !

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