Éduc’ Nat’ recherche professeurs désespérément

professeur

Pap Ndiaye a présenté, ce mardi 20 juin, son plan pour remplacer les enseignants « du jour au lendemain ». Un laborieux montage qui permettra de remplacer un prof d’anglais par un prof d’histoire qui fera cours… d’histoire. Un remplacement qui n’en est pas un et dans lequel les syndicats enseignants voient une astreinte déguisée.

Les rectorats recherchent désespérément des professeurs. La rapidité de réponse est incroyable, pour une administration : j’ai déposé en ligne mon dossier de candidature pour être professeur de français-latin un lundi, on m’a rappelé dans la demi-heure pour me fixer un entretien le vendredi, et le mardi d’après, j’avais la réponse… positive.

Si le rectorat de X est logé dans de grands bâtiments en meulière, les entretiens ont lieu dans un préfabriqué tellement vieux qu’il en est presque pétrifié. Dans l’entrée, une prise dénudée, un lino qui n’en est pas à sa première rentrée, une machine à café pour laquelle il faut apporter son mug à des fins de préservation de la planète (ils auraient dû le préciser sur la convocation). Au mur, la « Charte de la laïcité à l’école » et des affiches vantant l’accompagnement des professeurs en difficulté.

Une inspectrice jeune et affable vient me chercher. Assez vite, je précise que je ne veux pas enseigner en REP (réseau d’éducation prioritaire) pas plus qu’en REP+. (Quand on sait que Samuel Paty enseignait dans un collège qui n’était pas classé REP, imaginez ce qu’est un REP et tentez de concevoir un REP en pire : un REP+.) « Mais pourquoi ? », me demande l’inspectrice avec, dans ses yeux noisette, toute l’ingénuité du monde. J’avance qu’il faut à ces postes des professeurs particulièrement expérimentés. Réponse : « Il se trouve que c’est en REP que nous avons besoin de professeurs. Et sachez que les élèves seront riches de ce que vous leur apporterez. » Qu'en termes galants ces choses-là sont mises… Et de sortir un argument propre à me séduire : « D’ailleurs, il y a des classes de latin en REP. » Admettons. Wesh wesh, t’abuses Linacati, espèce de bâtard, jusqu’à quand tu vas nous casser les c… ? Mon inspectrice revient à la charge : « Ce souhait de ne pas enseigner en REP est rédhibitoire ? » Oui, il l’est. Elle le note en bas de sa feuille.

En fin d’entretien je l’interroge sur le salaire. J’ai dit un gros mot. L’inspectrice ne peut pas, ou ne veut pas, ou ne doit pas m’indiquer le salaire en question – comme il est pourtant d’usage quand on propose un emploi – car c’est un entretien pédagogique, et uniquement, me précise-t-elle. Il y a deux tabous, dans l’Éducation nationale : l’insécurité des professeurs et leur paye. Est-ce parce que l’une est trop élevée et l’autre trop basse ? Renseignement pris par ailleurs, le salaire de contractuel commence à 1.640 euros nets si vous avez une licence. Trois cents euros au-dessus du SMIC, auxquels s’ajoute une petite prime en REP, une grosse prime en REP+. À ce tarif-là, toujours moins de gladiateurs acceptent de descendre dans l’arène pédagogique.

Samuel Martin
Samuel Martin
Journaliste

Vos commentaires

27 commentaires

  1. Une de mes petites-filles a évoqué dernièrement son désir d’être enseignante; cela a été plus fort que moi: « oui, ma chérie, c’est un beau métier, mais tu sais, avec les ministre de l’EN que nous voyons défiler depuis plusieurs décennies, soit tu changes d’avis, soit tu vas exercer à l’étranger!

  2. Les syndicats de L’EN sont réputés être les plus puissants de France. Que font-ils à part favoriser les affectations de leurs membres.
    Il est plus correct de parler de revenu plutôt que de salaire. Qu’en est-il dans l’EN ?

  3. J’ai enseigné en REP+++. En 1981, j’enseignais la mécanique dans le collège technique des mines de fer de Mauritanie et en 1985, je formais des moniteurs techniques à l’Office National des ports du Cameroun. Pas un français parmi les jeunes ou adultes élèves. Et pourtant, très peu d’incivilités. Et oui, faute d’aides sociales, ils sont nombreux à vouloir apprendre un métier pour pouvoir se nourrir. Les REP, quel échec, car c’est en France qu’ils deviennent « turbulents ». Vu notre taux de chômage, nous n’avons pas vraiment besoin de main d’œuvre étrangère et nous ferions mieux de les former chez eux.
    Les économies africaines sont à 80% rurales et pourtant il n’y a pas un seul lycée agricole digne de ce nom en Afrique.
    Dramane Haidara Organisation Internationale du Travail

  4. Ne dramatisez pas le manque d’enseignants. Il arrivera peut-être un moment où leur nombre aura tellement diminué que le maintien des établissements scolaires n’aura plus de véritable sens, entraînant dans leur disparition celle des établissements d’enseignement supérieur. Le ministre socialiste veut d’ores et déjà supprimer les centres de polarisation des élites afin de généraliser la médiocrité. On le comprend : qu’est-ce qui justifie que l’on favorise les plus doués dans des lycées d’élite alors qu’ils ont déjà la chance d’être naturellement mieux dotés que les autres ? Et qu’est-ce qui peut justifier que l’on maintienne l’école quand tant d’élèves obtiennent leur baccalauréat sans connaître la grammaire, ni l’orthographe, ni l’histoire, ni la géographie, ni même savoir calculer la consommation de carburant de leur voiture ? Tout bien considéré, il pourrait être plus efficace d’apprendre aux jeunes qui ne pourront s’expatrier à pêcher, à chasser (à l’arc), à tailler les silex et à faire du feu.

  5. Tous les enseignants diplômés de toutes les strates de ce que l’on appelle « l’éducation nationale » sont ils réellement en poste, ou y a t’il de nombreux détachements dans des structures qui n’ont rien à voir avec cette éducation ?

  6. Qui peut s’engager dans une affaire pareille ? Avec un salaire pareil, pour une formation de niveau licence, il faut au minimum ne pas avoir de problème de sécurité, pas de problème de transport, quelques avantages et un minimum de considération. Il est évident que rien de tout cela n’est au rendez vous dans la majorité des cas. Il est tout aussi évident que ces professeurs seront en plus soumis aux absurdités administratives du mammouth et à la pression idéologique « woke » de Monsieur le Ministre. A fuir. Tout sauf l’EN. Le privé, vite !

  7. Il ne sert à rien de vouloir éduquer des ânes (pardon pour les vrais ânes qui sont des animaux sympathiques ) en prenant des risques pour sa propre vie, le deal de stupéfiants leur apporte suffisamment pour faire vivre la famille bénéficiant déjà d’allocations super généreuses donc ils se moquent de l’école et des profs.

  8. La spirale infernale de l’Education nationale , le niveau baisse dans toutes les disciplines , les enseignants sont agressés par les élèves , par les parents des élèves , ils sont mal payés , résultat on a du mal a recruter des enseignants , on recrute des enseignants issus de ce système et qui n’ont pas le niveau pour enseigner , et c’est ainsi que le système s’enfonce depuis des années.

  9. Au vu de votre entretien on comprend bien que tout est fait pour diminuer le nombre de professeurs et que le seul souhait de ce gouvernement est de remplacer l’école par une garderie. Pauvre France.

    • Des inspecteurs, il y en a à foison. Il faut bien remercier les enseignants les plus serviles. Il y a aussi quantité de professeurs avec le titre de conseiller (en sécurité, en laïcité, en égalité des chances, en respect de la diversité, en anti-racisme, en éducation sexuelle, en toilettes dé-genrées, etc) qui ne mettent plus jamais les pieds dans une classe.
      Lire « Stupéfiant voyage à travers l’Education nationale ».

  10. Tous chef d’entreprise rencontre de graves difficultés pour recruter dans pratiquement tous les domaines même en proposant un salaire confortables malgré le nombre de chômeurs que nous avons ce qui motive les jeunes et moins jeunes d’ailleurs ce sont les loisirs ne pas attendre 64 ans pour être en retraite être arrivé avant d’être parti en somme dans l’éducation recruter des enseignants avec les conditions de travaille que l’ont connaît et des salaires de misère même avec les congés que réserve la profession relève de l’impossible et c’est bien normal ces un métier en tension en somme peut-être occupé un jour par des demandeurs d’asile allez savoir vue le niveau

    • Vous avez parfaitement raison. Vous oubliez que le « social » plus un peu de « travail au noir » suffisent largement à certains. Les immigrés qui prennent ces places pour avoir des papiers, une fois ceci obtenus et étant régularisés, beaucoup font exactement la même chose. C’est un problème sans fin tant que des solutions radicales ne seront pas mises en place.

  11. REP Régiment Etranger de Parachutistes. Encore un sigle creux de l’Administration pour éviter de dire zone d’immigration (cf quartiers sensibles, défavorisés, populaires.).
    Heureusement que N’Diaye va relever le niveau.
    Je lui suggère d’adjoindre au « professeur » pour la discipline 1/2 légionnaires.

  12. C’est connu, une entreprise en faillite a toujours du mal à recruter, surtout lorsque le dirigeant n’a aucune stratégie cohérente à proposer.

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