Éducation : les limites de la méthode Blanquer
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Pas un jour sans que le nouveau ministre de l’Éducation nationale ne fasse une annonce : rythmes scolaires, bac, réforme du collège, redoublement, classes de CP, etc. En même pas deux semaines, il a brassé quasiment tous les sujets importants de son ministère ! Et recueilli, pour l'essentiel, l'assentiment général. D'abord, parce que l'opinion et les spécialistes lui reconnaissent une compétence indéniable. Il a gravi tous les échelons du ministère. C'est un homme du sérail qui a fait ses preuves. Ensuite parce que ses remarques sont frappées au coin du bon sens.
Mais surtout parce qu'il arrive après les ministres les plus idéologues que la gauche nous ait donnés depuis 1981, MM. Hamon, Peillon et Mme Vallaud-Belkacem. Ministres qui avaient réussi à mettre en colère tout le monde : droite et gauche, parents et enseignants, par leur action destructrice et surtout autoritaire. Après un tel quinquennat, tout nouveau locataire aurait connu un état de grâce comparable. « De toute façon, ça peut pas être pire », entend-on aussi bien en salle des profs qu'à la sortie des écoles.
Mais la méthode « pragmatique » revendiquée par M. Blanquer, si elle est effectivement bienvenue, va vite trouver ses limites. S'il est heureux que le nouveau ministre ne veuille pas accoler son nom à une nouvelle loi - et on reconnaît là l'homme de cabinet prudent qui a observé tant de noms de ministres de l’Éducation devenus la cible de la rue -, il n'en reste pas moins que la méthode des aménagements à la marge, des dérogations ici ou là, des adaptations aux régions, aux établissements ne peut durer qu'un temps. Cela correspond bien au « en même temps » macronien. Mais, dans le domaine de l'éducation, cet « en même temps » ne saurait apporter de solution durable. Au mieux, il se traduira par de l'immobilisme, c'est-à-dire par une décadence continuée. Au pire par de la confusion généralisée.
Il suffira de prendre deux exemples. Sur les rythmes scolaires, la liberté laissée aux écoles et aux communes va vite engendrer des confusions et des inégalités entre territoires, entre écoles, entre familles. Même chose sur les aménagements proposés à la réforme des collèges, déjà appliquée de façon très disparate, par le décret publié ce dimanche 18 juin : entre les notes et les compétences ici et là, entre le rétablissement de filières performantes et élitistes et le maintien de dispositifs égalitaires et peu formateurs comme les EPI, l'absence de choix et de cadrage vraiment national se révélera délétère pour tous, élèves et enseignants. À ne vouloir fâcher personne, ni les idéologues de la réforme ni ses opposants, il risque à terme de mécontenter tout le monde.
Un jour, il faudra vraiment remettre de l'ordre et de la simplicité dans cette maison dévastée qu'est l’Éducation nationale. De l'ordre dans les établissements, dans les classes, dans les programmes, dans les exigences, dans les parcours, dans les procédures. Pour que l’Éducation nationale redevienne tout simplement « nationale », avec tout ce que cela implique de cohérence, d'efficacité, de priorité réellement donnée aux fondamentaux. Et cela ne se fera pas par des dérogations à la dernière dérogation... Mais par de vraies réformes de structure, par la fin du collège unique et du lycée, lui aussi devenu, sans qu'on le dise, « lycée unique », sans qu'il forme vraiment des jeunes destinés à devenir des étudiants performants.
M. Blanquer, trop bon connaisseur de cette institution qu'il a contribué à façonner telle qu'elle est, ne sera peut-être pas l'homme de la situation. Certes, dans une période où tous ses acteurs ont besoin de souffler et de bénéficier d'une pause de calinothérapie, il est sans doute l'homme idoine pour accompagner une institution malade. Mais certainement pas le bon médecin pour la remettre vraiment sur pied.
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