Emmanuel Macron au pays des Serbes

Capture d'écran présidence de la République
Capture d'écran présidence de la République

La visite devait être prévue depuis un certain temps, mais avouons que ça tombe drôlement bien : Emmanuel Macron se rend en Serbie pour deux jours, laissant le gouvernement démissionnaire gérer « les affaires courantes » et le petit monde politique français se dépatouiller avec, en suspens, la question de la nomination du prochain Premier ministre. Une visite en retour de celle que fit, le 8 avril dernier, le président serbe Aleksandar Vučić. L’occasion, pour le chef de l’État, d’aller faire un petit tour dans ce qu’il est convenu d’appeler le « domaine réservé » du président de la République, notion qui n’est en rien constitutionnelle mais qui est entrée dans les mœurs de la Ve République. Avouons que, pour l’instant – c’est-à-dire depuis sept ans qu’il est à l’Élysée -, Macron n’a pas vraiment fait des étincelles « à l’international ». Cette visite sera-t-elle l’occasion, pour lui, de se rattraper ?

Achat de Rafale par la Serbie ?

Déjà, on évoque l’achat, par la république de Serbie, de douze de nos Rafale. Un contrat de trois milliards d’euros qui ferait un peu de bien à notre balance commerciale, à notre industrie de défense et, par la même occasion, redorerait le blason d’un Président qui devra bientôt ranger sagement sa planche de surf olympique. « La Serbie fait le choix stratégique de coopérer avec un pays européen [pour moderniser son armée] », se félicite-t-on, dans l’entourage d’Emmanuel Macron, rapporte le site Euractiv. On aimerait que ce choix stratégique de coopérer avec un pays européen soit aussi celui des pays membres de l’Union ! Belgique, Pays-Bas, Italie ou encore Pologne n’ont-ils pas préféré, ces dernières années, se tourner vers les États-Unis plutôt que vers la France pour renouveler leur flotte d’avions de chasse ? Valérie Hayer ânonnait à longueur de campagne européenne ce fameux « besoin d’Europe ». Visiblement, certains États membres n’ont pas besoin de la France lorsqu’il s’agit de complaire au cousin d’Amérique…

La Serbie dans l'UE ?

Le choix de la Serbie et de son président, le très vilain Vučić, qualifié de « national-populiste » par Libération, élu dès le premier tour en 2017 et réélu aussi dès le premier tour en 2022 (on parle de fraudes), vise probablement à influencer la France pour qu’elle agisse en faveur de son admission au sein de l’Union européenne. Rappelons que la Serbie est candidate depuis 2013 à l’intégration, mais la Commission, dans son rapport de 2023, qualifie les progrès de la Serbie dans sa lutte contre la corruption et la criminalité organisée de « limités ». En la matière, l’Union européenne parle d’or. Et puis, « les cas de menaces, d’intimidations, de discours haineux et de violence à l’égard des journalistes restent préoccupants », note aussi l’exécutif européen. Il faudra qu’un jour, on se penche sérieusement sur la définition de la haine. Alors, les gentils humanistes critiqueront sans doute les affaires que la France fait avec la Serbie (on préférerait peut-être qu’elle remplace ses vieux Mig par des Mig tout neufs ?), mais il ne faut pas être naïf. L’Allemagne, qui s’y connaît aussi en affaires et en realpolitik, dépêchait, en juillet dernier, le chancelier Scholz à Belgrade pour appuyer l’ouverture, à l’ouest de la Serbie, d’une mine de lithium dont l’industrie automobile allemande a tant besoin, au grand dam des écologistes…

Et le Kosovo ?

Bien sûr, on imagine qu’il sera question aussi du Kosovo. Si la France de Sarkozy se précipita derrière les États-Unis pour reconnaître, en 2008, l’indépendance de cette province serbe, peuplée majoritairement d’Albanais (ceux qui nient le phénomène de « Grand Remplacement » devraient s’intéresser à l’Histoire du Kosovo depuis 80 ans…), il faut bien reconnaître que la France, ces derniers mois, s’est attachée à défendre la minorité serbe vivant au nord du Kosovo et qui refuse de se soumettre au pouvoir albanais de Pristina.

Relancer le dialogue avec la Russie ?

Enfin, on peut rêver un peu. Et si cette rencontre franco-serbe, au-delà du jeu d’influence dans les Balkans entre l’Allemagne, la France mais aussi la Turquie, entre autres, était l’occasion pour la France de relancer le dialogue avec la Russie, dont la Serbie est très proche, afin de tenter de sortir de l’impasse meurtrière du conflit russo-ukrainien ? Il est vrai que c’est peut-être demander beaucoup à Emmanuel Macron qui, pour l’instant, excelle plutôt dans sa capacité à créer des impasses au national que d’ouvrir des autoroutes à l'international…

Cela dit, la France – c’est-à-dire nos gouvernants, démissionnaires ou à venir – serait bien inspirée de se plonger dans l’Histoire. Le 9 octobre prochain, on commémorera les 90 ans de l’assassinat, à Marseille, du roi Alexandre de Yougoslavie et de Louis Barthou, ministre des Affaires étrangères français. La IIIe République, si décriée aujourd’hui, avait une politique étrangère avec une vision stratégique, elle. Derrière ce renforcement de l’amitié franco-yougoslave (ou plutôt franco-serbe, scellée au cours de la Grande Guerre), dont ce voyage royal était le but, Barthou voyait plus loin : il projetait carrément un « pacte oriental » qui aurait réuni la France, le Royaume-Uni, l'URSS, la Pologne, la Yougoslavie et même l'Italie de Mussolini ! Cela, afin de contrer la montée en puissance de Hitler. Aujourd’hui, les circonstances géopolitiques sont tout autres, bien évidemment. Mais, jusqu’à présent, depuis que Macron est au pouvoir, a-t-on eu l’ombre de l’esquisse d’une ébauche de vision, à part le « toujours plus d’Europe » ?

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

29 commentaires

  1. Mon Colonel, ne soyez pas méchant vis-à-vis de notre « Chef des Armées »… Il a une vision. C’est sûr! Certes ce n’est pas la vôtre, certes elle n’est pas non plus gaullienne, mais elle est focalisée sur l’heure de sa prochaine ligne de coke, ou le prochain chemsex à l’Elysée. Tant qu’il obéira au doigt et à l’œil à ses commanditaires mondialistes et à sa chère von der Layen, les machines Dominion et Mac Kinsey travailleront pour lui…

  2. Vous pensez vraiment que la Serbie a acheté des avions à la France? Non, on leur a prêté de l’argent (que l’on a pas) pour qu’ils achètent nos avions comme avec Egypte par exemple.

  3. Les serbes ont pu apprécier l’excellence des avions français, lorsque ils ont bombardé Belgrade au nom de l’Otan!

    • Oui, les serbes seraient-ils en train de s’agenouiller pour rentrer dans l’UE après que s’être fait voler le Kosovo et avoir pris des bombes pendant ? Ils feraient mieux de postuler pour les Brics. Vucic est finalement très décevant à moins que cette transaction cache autre chose.

  4. Il voyage à nos frais, et échappe ainsi au peuple français et à ses obligations. En arrêtant DUROV, il vient de plomber tout un secteur d’économie et financier. Les Emirats ont gelé l’achat des mirages… Acheter ce vieux coucou alors qu’il y a des super Sukoy de 5 ème génération qui lui serait fourni par son compère de toujours la Russie. Les Serbes sont un peuple Slave qui a été dépouillé, bombardé par l’UE et les mirages devaient plomber le ciel de Belgrade! Comment font-ils pour recevoir Macron? Dur d’être politique! Est-ce que c’est juste pour éviter de reprendre une ration de bombes sur la tronche? selon le principe: etre avec ou contre?

  5. depuis 2017 il a crée des problèmes et quand ils sont là il fuit à l’étranger, un grand classique de ce personnage, la France n’est pas sa priorité, aller chez les serbes vendre des rafales, pendant que les Emirats annulent leur commande de ces mêmes avions, tout comme l’Australie avait annulé les sous-marins sans que le tot de l’Elysées ne réagisse, la commande éventuelle de la Serbie sera validée par les Etas-Unis ou pas ?

  6. Mais c’est bien sûr ! Macron c’est notre tintin national…macron au Liban,Macron en Israël, Macron au Brésil,Macron à bamako,Macron en Amérique etc etc..voile sa vie est une BD des années 50 …a nos frais..

  7. Au fait, qu’est -il donc allé faire en Serbie ? Expliquer comment diriger un pays sans y instaurer une dette abyssale ? Démontrer comment on dirige un pays sans y laisser se développer une délinquance et une barbarie indescriptible ? Expliquer comment faire régner l’harmonie dans son pays ? … On aimerait quand même savoir ; malheureusement on s’attend surtout à voir ce machiavel dénigrer encore davantage la France et les Français, comme il a l’habitude de le faire lorsqu’il se ballade à l’étranger … et surtout comme si ce n’était pas lui le responsable de cette situation délétère en France.

  8. Très drôle .samedi manifestations prévues pour la démission du soldat de plomb et comme par hasard car je ne crois pas aux coïncidences…le mini chef fuit à l’étranger …c’est cela la trouille ..rions ce matin .

  9. Que va-t-on- nous faire croire ? Que Macron va redorer son blason cabossé par 7 ans de pouvoir sans concessions avec la ruine de la France pour résultats ? NON. Va-t-on nous faire croire qu’il est à l’origine de l’achat des Rafales ? NON. Nous prend-on pour des canards sauvages (pour rester poli) ? Hélas la réponse est OUI.

  10. Les serbes n’ont pas oublié le rôle des USA contre leur Nation, ni de celui de l’UE. Il est donc normal et très facile pour Macron de vendre des rafales , il ne doit en tirer aucun avantage politique

    • On voit que vous n’en avez pas vendu beaucoup car ce n’est pas si facile que cela, d’autant que Macron n’y est pour rien, il ne sait rien faire sauf amener la pagaille, et que cet achat repose sur les qualités de l’appareil comme sur la compétitivité des gens de son constructeur. Macron est en Serbie surtout pour ne pas être en France alors que des manifestations se dessinent tout prochainement.

  11. A Sport Passion : admettons que les joueurs d’une équipe de football ou de rugby soient amenés à voter pour choisir un entraîneur et que ceux-ci élisent un entraîneur de basketball,il est évident que les résultats sportifs seront très mauvais.Les électeurs français ont élu soit disant un Mozart de la finance disait-on,le problème c’est que ce « Mozart » ne connait ni le solfège ni ne sait jouer d’un instrument.

  12. En matière de corruption, de criminalité, on devrait balayer devant notre porte.
    Pendant que notre petit bonhomme de président se balade, notre maison brûle, la Nouvelle-Calédonie, Mayotte c’est la chaos. J’espère que le jour viendra où il devra rendre des comptes.

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