Emmanuel Macron bientôt à Versailles ?
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On apprend qu’Emmanuel Macron réfléchit à l’idée de réunir le Parlement en Congrès dans les prochaines semaines. Christophe Castaner, sorte de pythie moderne en barbe de trois jours, a déclaré sur RTL ne pouvoir "ni infirmer ni confirmer", n’osant en dire plus, de peur sans doute de se faire sonner les cloches par le « Maître des horloges ». Il paraît que c’était l’une des promesses de campagne d’Emmanuel Macron : réunir, une fois l’an, les deux Assemblées en Congrès à Versailles. Une promesse plus facile à tenir que celle de l’inversion de la courbe du chômage !
Rappelons que c’est Nicolas Sarkozy qui fit changer la Constitution en 2008 afin que le président de la République puisse s’exprimer devant le Parlement. La chose n’était pas possible avant, selon la tradition républicaine de séparation des pouvoirs exécutif et législatif. Mais la reine d’Angleterre a bien son discours du trône, alors pourquoi pas lui… Notons, tout de même, que la Constitution de la Deuxième République (1848) ne permettait pas mais obligeait le Président à adresser chaque année un message à l’Assemblée – il n’y avait pas de Sénat. C’est ce que fit par deux fois, en 1850 et 1851, le Président d’alors, Louis-Napoléon Bonaparte. On connaît la suite…
Nicolas Sarkozy usa de cette prérogative, en juin 2009, pour défendre sa politique. Et il n’y revint pas. François Hollande convoqua aussi le Congrès après les attentats du 13 novembre 2015, alors même qu’il s’était opposé à cette réforme en 2008. Une déclaration entourée d’une émotion consensuelle. On connaît aussi la suite…
Donc, Emmanuel Macron, au début de son règne, voudrait réunir le Congrès pour lui "donner le cap", toujours selon la déclaration de la pythie de service. Normal, pour celui qui se veut un moderne Timonier. La gouverne à la godille, c’est fini ! Évoquera-t-il une réforme des institutions ? La proportionnelle (autre promesse) ? En dose homéopathique...
Cette réunion des deux Assemblées en Congrès sera, évidemment, l’occasion de belles images, largement commentées sur les chaînes d’information. Il y aura de la solennité, de la majesté même. Les sénateurs, s’épongeant le visage avec leurs grands mouchoirs à carreaux, dans une probable canicule propice aux pensions de réversion, regarderont ébahis les nouveaux députées et députés, marcheuses et marcheurs au teint hâlé s’engouffrer en colonne par quatre dans la désuète et néanmoins respectable salle du Congrès. Et puis, Il entrera. Il parlera. Il s’en ira. De belles images, disais-je. Jean-Pierre Raffarin, la larme à l’œil, se rappellera le jeune giscardien qu’il fut en se disant in petto : l’Autre en rêva, Celui-ci va le faire !
Mais trêve de poésie et faisons un peu d’arithmétique. Le Parlement compte 925 membres (577 députés et 348 sénateurs). Pour faire une réforme constitutionnelle par voie parlementaire - le référendum ayant été « ringardisé », comme on sait -, il faut que le texte soit d’abord adopté par chaque Assemblée, mot pour mot, puis qu’il soit approuvé par les trois cinquièmes des parlementaires réunis en Congrès.
Emmanuel Macron dispose actuellement de plus de 400 députés : 317 LREM, 45 MoDem, une quarantaine de LR « Constructifs », une dizaine de divers gauche, en particulier du PRG, sans compter quelques députés socialistes. De son côté, le Sénat est majoritairement, et par convention de manœuvre, à « droite » (143 LR et 42 UDI). Les socialistes sont une bonne centaine. Malgré la « macromania » qui frappe actuellement à gauche comme à droite, il manque probablement au Président quelques sénateurs pour constituer une majorité des trois cinquièmes. En septembre prochain, la moitié du Sénat sera renouvelée. Si nos grands électeurs succombent aussi au charme macronien, tout sera alors possible pour que le « Grand Horloger » mette les pendules à son heure institutionnelle.
Tout ? Non. Que les républicains de stricte observance se rassurent, "la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une révision", précise le dernier alinéa de l'article 89 de notre Constitution. Le sacre de Bibi n'est pas pour demain. Dommage, de bien belles images qu’aurait commentées sans modération Stéphane Bern !
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