Emmanuel Macron et le « tee-shirt LBD » : démagogie, cynisme ou enfantillage ?

Capture d'écran Twitter J-R. Baudot
Capture d'écran Twitter J-R. Baudot

Brigitte va encore gronder son Emmanuel : il est incorrigible ! Voilà qu'au Festival de la bande dessinée d'Angoulême, il s'est fait prendre en photo, aux côtés du dessinateur Jul, tenant un tee-shirt représentant la mascotte du Festival, un pansement maculé de sang sur l'œil, avec la légende « LBD 2020 ». S'est-il laissé piéger ? L'a-t-il fait consciemment ? Dans les deux cas, c'est indigne de la fonction qu'il occupe.

Libération a enquêté sur l'authenticité de ce cliché. Il a bien été pris ce jeudi 30 janvier, à 15 h 25. Un témoin assure que le Président a vu de quoi parlait le dessin et qu'il a posé avec le tee-shirt en connaissance de cause. Alors, pourquoi a-t-il accepté de se prêter à ce jeu ? Il devait bien se douter que la photo ferait le tour des rédactions et susciterait des réactions indignées.

Elles n'ont pas manqué : Éric Ciotti a dénoncé « un outil de propagande anti-police qui n'a rien à faire entre les mains du président de la République », tandis que Jean-Luc Mélenchon déclare que « le Président banalise les violences policières ». Quant aux syndicats de policiers, ils se sont insurgés contre ce que l'un d'entre eux appelle « le pire signal dans le contexte actuel de chaos ».

Qu'il l'ait fait volontairement ou qu'il se soit laissé surprendre, Emmanuel Macron a jugé bon de s'expliquer après coup. Interrogé par BFM TV, il a justifié son geste par la défense de la liberté d'expression : « Nous sommes un pays libre, démocratique, qui aime l’insolence et donc il y a eu ce travail qui a été fait avec un tee-shirt. » Tout en exprimant son désaccord avec le dessinateur Jul et en récusant le terme de « violences policières ». Des explications qui ne convainquent pas. Son sourire crispé sur la photo donne l'impression d'un enfant qui se rend compte qu'il fait une bêtise au moment où il la commet.

On aurait pu penser que notre Président réfléchirait davantage aux conséquences de ses actes ou qu'un membre de sa garde rapprochée l'empêcherait de faire le clown publiquement. Car ce spectacle était tout aussi inconvenant à l'égard des policiers qu'à l'égard des manifestants qui ont perdu un œil après un tir de LBD. Il est surtout indigne de la fonction de président de la République. On imagine mal l'un de ses prédécesseurs se mettant dans une telle situation. François Hollande, peut-être , le « Président normal » ?

Le problème, c'est que Macron n'en est pas à son coup d'essai en matière de mauvais goût. On se souvient comment, en septembre 2018, il avait posé avec deux jeunes de Saint-Martin, l'un torse nu, l'autre faisant un doigt d'honneur. Il avait balayé la polémique naissante en expliquant que les deux jeunes présents sur la photo avaient aidé une jeune fille handicapée à se déplacer pour le rencontrer : « Ils ont été capables de faire ça car je les ai regardés avec confiance, je les ai respectés, c'est ça, la République. »

En l'occurrence, à Angoulême, il n'a respecté ni les policiers, ni les victimes de LBD, ni - ce qui est encore plus grave - la fonction présidentielle.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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