Emmanuelle Ménard : « La loi anti-fessée est une mise sous tutelle des parents et les déresponsabilise »
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Après le vote du Sénat, la « loi anti-fessée », visant à interdire les « violences éducatives ordinaires », est définitivement adoptée en France.
Réaction d'Emmanuelle Ménard au micro de Boulevard Voltaire.
Hier, le Sénat a voté la loi appliquant l’interdiction de la fessée. Quelles sont les conséquences de cette loi ?
Les conséquences sont plus symboliques qu’autre chose. C’est une inscription au civil.
Avec cette loi, on inscrit noir sur blanc dans le Code civil que l’autorité parentale s’exercera sans violences physiques comme psychologiques. Cet article sera lu au moment des cérémonies de mariage.
Aucune sanction n’est prévue en cas de violences physiques ou psychologiques. Le problème réside dans ce que l’on met derrière les mots. Tout le monde est, évidemment, contre les maltraitances sur les enfants. Personne ne revendique ce genre de choses.
La loi parle des violences physiques, psychologiques, des humiliations et de l’interdiction de hausser le ton sur son enfant. Ça va très loin. La loi anti-fessée est une généralité.
Mettre son enfant au coin quand il a fait une bêtise, pour certains enfants, peut être considéré comme une humiliation. En revanche, pour d’autres, cet acte est vécu tout à fait normalement. Mettre son enfant au coin, est-ce une humiliation ?
La vie privée des Français, et celle des parents en particulier, subit une espèce de mise sous tutelle permanente.
Il va être difficile de vérifier que les parents ne donnent pas de fessées à leurs enfants. Comment les politiques vont-ils veiller à la bonne application de cette loi ?
C’est impossible de veiller à l’application de la loi, sauf à inciter à la dénonciation.
C’est la mise en œuvre du numéro pour les enfants battus. Si vous vous apercevez que l’enfant de votre voisin est un enfant maltraité et battu par ses parents, il est tout à fait normal que vous soyez vigilant et que vous alertiez les services sociaux. Il est absolument impossible de surveiller ou de vérifier la bonne application de cette loi.
On va vous dire que les services sociaux savent faire la différence. D’accord, les services sociaux savent faire la différence entre un vrai et un réel mauvais traitement et le reste. On ne peut plus taper sur la couche de son enfant qui a fait une bêtise. On ne peut plus lui donner une petite tape sur la main. On ne peut plus le mettre au coin. On ne peut plus le gronder en élevant la voix.
En fonction de l’interprétation que vous mettez et de l’enfant avec qui vous vivez, il n’y a pas de réponse unique. Cette loi généralise des choses qu’il ne faudrait pas généraliser.
Pourrait-on craindre d’autres lois qui vont encore s’immiscer dans la sphère familiale ?
On veut de plus en plus régenter la vie des Français. On crée une espèce de déresponsabilisation permanente des Français. Dans un autre ordre d’idée, nous allons examiner dans l’Hémicycle, à partir de cet après-midi, la loi sur la lutte contre les propos haineux sur Internet. L’intention est excellente. Personne n’est opposé à lutter contre les propos haineux sur Internet. Je pense que tout le monde condamne la haine sur Internet. Mais c’est la façon de le faire qui pose problème.
Quand vous avez un propos haineux, la plate-forme qui abrite ce propos est obligée de le supprimer sous 48 heures, sous peine de devoir payer une amende importante.
C’est, normalement, au juge de décider si un propos est litigieux ou non. Là, ce ne sera plus au juge d’en décider. Il y a déjà un problème d’éthique. Ce n’est pas à une plate-forme de décider si un propos est répréhensible ou non. On privatise complètement la Justice. Cela me semble être un problème.
Je pense qu’il faudrait plutôt une campagne de sensibilisation auprès des internautes pour rappeler en permanence que les propos violents sont interdits. Il faut d’abord sensibiliser les gens avant de réprimer de cette façon-là.
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