En Irlande aussi, un patriote peut-être interdit de postuler à la présidence

Un vent de panique semble souffler sur la classe politique irlandaise, dominée par les centristes proches des milieux d’affaires et la gauche, qui partagent une même vision européiste et immigrationniste.

Un poids plume qui effraie les poids lourds

Le responsable de leurs tourments soudains n’est pourtant qu’un simple sportif, un certain Conor McGregor (Conchúr Antóin Mac Gréagóir, en gaélique irlandais), ancien champion de MMA (arts martiaux mixtes). Mais, s’il n’a concouru qu’en catégorie poids plume, sa candidature à l’élection présidentielle, qui devrait se tenir d’ici au 11 novembre prochain, glace le sang des poids lourds de la politique irlandaise, dans une campagne électorale qui se tend avant même d’avoir débuté.

URGENT : Le Parlement irlandais prévoit d’INTERDIRE à Conor McGregor de se présenter à la prochaine élection présidentielle en Irlande en raison de ses opinions anti-immigration. pic.twitter.com/aexFiE0wFs

— Trump Fact News (@Trump_Fact_News) March 30, 2025

Cette candidature pour le moins atypique est devenue une affaire nationale, lors de la venue de Conor McGregor aux États-Unis, à l’occasion des festivités pour la fête nationale irlandaise. Comme l’a rapporté la chaîne américaine Fox News, le champion de MMA y a été chaleureusement reçu par Donald Trump, à peine une semaine après le Premier ministre irlandais, accueilli, lui, plutôt froidement dans le Bureau ovale. Le président américain avait en effet clairement fait comprendre à Micheál Martin qu’il comptait bien « rééquilibrer » les relations économiques entre les deux pays, bien trop favorables à l’Irlande à ses yeux.

Le bon accueil dont a bénéficié Conor McGregor s’explique, justement, par son opposition forte à la politique menée par le pouvoir irlandais, notamment en matière d’immigration. Le candidat a ainsi rappelé que l'Irlande est contrainte : elle « doit mettre pleinement en œuvre le pacte de l'UE sur la migration d'ici le 12 juin 2026 ». Or, explique Conor McGregor, pour rendre ainsi officiel et légal le basculement de l’Irlande dans une politique pro-immigration, « plusieurs textes législatifs doivent être adoptés par les deux Chambres de l'Oireachtas (Parlement irlandais) - ensuite signé par le Président ». Qui d'autre « s'opposera alors au gouvernement et à ce projet de loi ? », s’interroge-t-il… « Je le ferai. »

Le combattant Conor McGregor, candidat à la présidence de l'Irlande, affirme que le pacte migratoire de l'UE « mènera à la ruine du peuple indigène d'Irlande ». pic.twitter.com/HQptRmcEOx

— Trump Fact News (@Trump_Fact_News) March 28, 2025

Ces quelques mots ont suffi à déclencher une vague de violente réprobation parmi les parlementaires, depuis le centre droit jusqu’à la gauche, vague largement relayée par la presse progressiste irlandaise et européenne dont les attaques ont fusé tous azimuts. Euronews, qui a sans doute bien perçu l’anti-européisme de Conor McGregor, a été parmi les premiers à chercher à le diaboliser et n’a pas hésité à rappeler qu’il avait été « jugé responsable, l'année dernière, d'avoir violé et frappé une femme à Dublin et a fait face à d'autres allégations d'agression sexuelle en Espagne et en France », omettant juste de préciser qu’il conteste les faits et a fait appel de cette décision. La chaîne bruxellophile a ensuite relayé Micheál Martin, selon qui Conor McGregor « ne parle pas au nom du peuple irlandais sous quelque forme que ce soit », avant de faire appel aux tristement célèbres organismes de vérification (fact-checking) pour affirmer qu’il était « peu probable que Conor McGregor puisse se présenter à la présidence irlandaise ».

« Misogyne et voyou » ?

Ce pronostic fait référence aux règles électorales irlandaises qui veulent qu’un candidat à la présidentielle doive obtenir le vote favorable d’au moins vingt membres de l'Oireachtas ou une majorité dans quatre Parlements locaux pour pouvoir se présenter. Les médias progressistes se sont engouffrés dans cette brèche. À Londres, Sky News a fait une liste à la Prévert de commentaires à sens unique, traitant notamment l’ancien champion de « misogyne et voyou » ou encore « inapte ». Étonnant, tout de même, qu'un candidat puisse faire si peur si ses chances sont nulles... À moins que l'on ne cherche surtout à intimider les élus locaux afin d'éviter qu'il ne recueille leur suffrage et devienne éligible ?

La presse irlandaise, elle aussi, hésite entre propos insultants et disqualification. L’Irish Times assure qu'il a questionné près de 949 élus locaux et qu’aucun des 187 répondants ne souhaite voter en faveur de Conor McGregor. Là encore, en renfort de ces quelques chiffres, une suite de propos peu amènes à l’encontre du candidat, tous minutieusement choisis dans les formations ayant tout à redouter de son succès.

La violence des attaques, la volonté de diabolisation, l’absence quasi systématique d’une argumentation de fond et l’implication des milieux européistes (ici Euronews) et, dans certains cas, des tribunaux rappellent, sur la forme tout au moins, des procédés déjà observés pour influer sur les élections à venir, notamment en Roumanie, en Pologne, en Hongrie et même en France. Voilà qui commence à faire beaucoup. L’inéligibilité de Marine Le Pen ne fait que confirmer un phénomène qui interroge autant qu’il inquiète.

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