Enquête TIMMS : la France, lanterne rouge en mathématiques ?

@Antoine Dautry/Unsplash
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Le ministère de l'Éducation nationale vient de présenter à la presse les résultats de l'enquête TIMSS [Trends in International Mathematics and Science Study/Tendances dans l'étude des mathématiques et des sciences, NDLR], organisée tous les quatre ans, avec pour objectif de « [mesurer] le niveau des connaissances scolaires des élèves de CM1 et de 4e en mathématiques et en sciences » et d'« interpréter les différences entre les systèmes éducatifs pour améliorer l’enseignement et l’apprentissage ». Le verdict est sans appel : la France est presque la lanterne rouge.

En mathématiques, les élèves français sont avant-derniers, loin derrière des pays aussi divers que la Corée et le Japon, la Lituanie, la Turquie, le Royaume-Uni, la Pologne, l'Irlande ou la Roumanie. On apprend aussi que « l’écart de performance entre les filles et les garçons se creuse en faveur des garçons », ce qui conduit le journal Le Monde à titrer : « En mathématiques, les résultats des filles plombés par les stéréotypes de genre ».

On connaissait déjà les ravages des stéréotypes de genre dans les cours de récréation ; voilà qu'ils contaminent aussi les mathématiques. Les filles intégreraient l'idée qu’elles ne sont « pas faites pour les sciences ». Les enseignants seraient eux-mêmes influencés par leurs préjugés sur les genres et évalueraient différemment les élèves filles et garçons. Enfin, les parents associeraient les mathématiques à la réussite masculine. Il y a sans doute un peu de vrai dans tout cela, il existe peut-être une forme d'autocensure chez les filles. Mais mettre en avant cette explication, c'est omettre de s'interroger sur les véritables raisons des lacunes d'une grande partie des élèves, filles et garçons.

Ce ne sont pas seulement les mathématiques ni, plus généralement, les sciences, c'est tout l'enseignement où les élèves français se distinguent globalement par leur médiocrité. Les raisons en sont multiples. Citons-en quelques-unes sans prétendre être exhaustif.

Nivellement par le bas

La massification de l'enseignement, couronnée par l'instauration du collège unique, a abouti au nivellement par le bas. Les trois filières qui existaient précédemment, loin d'être ségrégatives, permettaient de tirer vers le haut les plus méritants. Depuis cette faute originelle, les diverses réformes et les aménagements successifs n'ont fait qu'accentuer le mal. S'est ajoutée, ces dernières années, l'arrivée de nombreux élèves maîtrisant mal, voire pas du tout, la langue française. Tous ces élèves mis ensemble, notamment dans certains quartiers, il est pratiquement impossible d'assurer un enseignement de qualité, quelle que soit la prouesse des enseignants.

Parallèlement, le niveau de recrutement des professeurs des écoles s'est dégradé dans des académies peu attractives. On est loin des instituteurs que les plus anciens de nos lecteurs ont connus, qui brillaient par leur culture polyvalente. En outre, l'enseignement se disperse dans toutes sortes d'activités au lieu de se concentrer sur les objectifs fondamentaux : lire, écrire, compter. Quand des élèves arrivent en sixième sans savoir lire ni écrire correctement, comment pourraient-ils progresser en français ou en mathématiques et dans toutes les autres matières ?

Le pire est peut-être que nos gouvernants s'accommodent facilement de cette médiocrité générale. Ils ne sont pas loin de penser, comme Big Brother, que « l'ignorance, c'est la force ». Ils considèrent, dans une conception néo-libérale qu'on retrouve chez eux en matière sociétale, que l'école est au service du marché et que, pour faire fonctionner l'économie, il suffit de former une minorité de sachants et une masse d'exécutants dociles. Ils font de beaux discours sur l'égalité, l'acquisition de compétences, la réussite de tous, mais, dans la pratique, ils se satisfont d'une école médiocre, dispensant un savoir médiocre, formant des élèves médiocres... pour les enfants des autres.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

7 commentaires

  1. Il ne faut pas toujours voir le verre à moitié vide, nous ne pouvons que progresser, c’est déjà un point positif. Le deuxième point positif, c’est que nos nullards en mathématiques pourront toujours finir ministre du budget … un poste qui consiste à dépenser sans compter.

  2. Perso, ce qui m’a coulé, en maths, c’est qu’en rentrant au lycée, des lettres (x,y,a, b, delta etc…) ont fait leur apparition.Ça m’a complètement perturbé, et j’ai laché prise au fur et mesure qu’on avançait dans le programme.
    Alors que j »étais bon en arytméthique (jusqu’au cm2, donc). Un train qui partait de telle heure de Paris et qui roulait à telle vitesse, croisait un train qui partait de Marseille roulant à telle vitesse se croisaient à quelle heure et où ? Là, j’étais bon. Après…..
    Par contre je connais, encore toutes mes tables de multiplication, additionne, » soustré » et divise sans pb.

  3.  » Ce ne sont pas seulement les mathématiques ni, plus généralement, les sciences, c’est tout l’enseignement où les élèves français se distinguent globalement par leur médiocrité  » : la faute à qui ? A tous ces gouvernements qui depuis 40 ans sabotent l’école . Le meilleur pour les enfants des élus , écoles privées , et pour le peuple la médiocrité . De plus comme vous le soulignez , ce sont ces enfants qui ne maitrisent même pas la langue et qui tirent les notres vers le bas . Il est vrai aussi que le niveau des enseignants et la vocation ne sont plus ce qu’ils étaient .

  4. Non Monsieur Kerlouan. L’économie libérale de marché, c’est à dire de son vrai nom le capitalisme, a besoin d’humains bien formés ! Des humains bien formés pour concevoir et créer les nouvelles technologies que nous retrouverons plus tard sur le marché, mais également des humains bien formés qui occuperont des postes à salaires élevés qui en feront des consommateurs dont on aura envie de prendre soin. Le capitalisme hait la médiocrité et la paresse ! Son objectif n’est pas l’égalité et encore moins l’égalitarisme ! Son objectif est la réussite pour tous en fonction de ses moyens et de ses aspirations.
    Et non, il n’existe aucun parti politique libéral en France ! Le terme néo-libéral a été inventé par une gauche paresseuse pour discréditer le capitalisme. Or il n’y a rien de « nouveau » dans son fonctionnement, sinon une accélération dans la capacité d’échanger des marchandises et des capitaux. N’oubliez jamais que Rome et la Chine commerçaient déjà aux travers des routes de la soie !
    Si ce que vous dites était exact, ce qui n’est pas le cas, comment expliqueriez-vous que les économies les performantes, USA, Europe du Nord, Asie du Sud-Est, sont également les économies qui disposent des systèmes scolaires les plus performants et où on laisse les parents choisir l’école de leur enfant? Singapour en est le parfait exemple. J’entends d’ici les argumentateurs à deux balles s’écrier qu’on ne peut pas comparer une cité-état avec un « grand » pays comme la France ! Alors quid de la Chine ou de l’Inde ?
    Et les Etats-Unis ? Eux ils baissent dans les classements ! C’est exact. Mais ce pays, tout comme la France voit affluer des millions d’étrangers analphabètes et/où qui ne comprennent pas l’Anglais. Autrement dit, certaines poches de pauvreté font baisser la moyenne. Trump a d’ailleurs des idées très intéressantes sur le sujet.
    Je vais vous faire une confidence. Le problème n’est pas le capitalisme. Le problème c’est le contenu des programmes.

  5. Tout ce que vous écrivez est vrai mais il y a pire encore : la médiocrité s’infiltre maintenant dans le corps enseignant et parmi les personnels de direction où il n’est pas rare de voir des fautes de français aussi énormes que la sympathie que ces professionnels de la pédagogie portent aux idées wokistes.

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