Espoir de paix ? Zelensky ne parle plus de victoire mais de « fin de la guerre »

Capture d'écran novyny live
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Mutatis mutandis, c'est un peu comme pour le budget de rigueur Barnier. Il fait grincer bien des dents mais tout le monde sait, in petto (et surtout ceux qui nous ont mis dans ce pétrin de la dette), que c'est ça - ou quelque chose du même genre - ou la faillite. Un moindre mal dicté par la réalité. Pour la guerre - car là, il s'agit de vies humaines et de familles brisées pour toujours -, c'est encore plus vrai et la phrase de Benjamin Franklin (« Il n’y a jamais eu de bonne guerre ni de mauvaise paix »), que l'on n'entendait plus que pour Gaza, refait discrètement surface pour l'Ukraine aussi.

Pour la première fois, ce vendredi, le président ukrainien Zelensky a abandonné sa rhétorique jusqu'au-boutiste de victoire : « L’Ukraine […] veut une fin juste et rapide de cette guerre […] je voudrais voir cela pas plus tard que l’année prochaine, [en] 2025 ». Derrière la périphrase diplomatique, on entr'aperçoit le mot « paix ». Signe de l'importance de ce tournant : il a prononcé ces mots historiques à Berlin, après un entretien avec le chancelier Scholz, premier soutien européen à l'Ukraine. Le chancelier, lui, a bien prononcé le mot magique. Il y a tout juste un mois, du reste, ce même chancelier allemand ne déclarait-il pas : « Je crois que le moment est venu de discuter de la manière dont nous pouvons sortir de cette situation de guerre plus rapidement que nous ne le pensons actuellement ». Aujourd'hui, on est dans la même logique. Même si c'était pour rappeler les exigences du camp occidental : « Nous n’accepterons pas de paix dictée par la Russie », et même si le président ukrainien a démenti toute discussion sur un cessez-le-feu. La formule de la paix-diktat est peut-être un peu malheureuse dans la bouche d'un chancelier allemand. Mais ces déclarations constituent un indéniable progrès vers un horizon de paix.

D'autres signes témoignent de cette inflexion vers plus de réalisme du président ukrainien. Sur le terrain, la Russie continue à grignoter le Donbass. La question de la réduction du soutien occidental pèse aussi, avec l'incertitude de l'élection américaine et le désengagement prévu de l'Allemagne, malgré les déclarations formelles de soutien. Ce tournant pacifiste, amorcé depuis plusieurs mois, prend une nouvelle résonance avec un tournant comparable que l'on constate dans la couverture médiatique du conflit, où la ligne belliqueuse se fait bien plus discrète. Ainsi cet article d'Alexandre Lévy dans Courrier international qui, rendant compte de la vision russe, révèle que Zelensky serait porteur, à côté de son « plan de victoire », d'un plan B prévoyant des cessations de territoires ukrainiens en échange d'une adhésion à l'OTAN de cette nouvelle Ukraine. Le tout est évidemment présenté comme inquiétant la Russie. Mais c'est un changement notoire dans la rhétorique médiatique occidentale.

Ce retour au réel est puissamment encouragé par deux diplomates américains chevronnés, Richard Haass et Charles Kupchan, respectivement conseillers de Bush et d'Obama, à qui L'express a ouvert ses colonnes, le 6 octobre dernier, et qui « appellent les Occidentaux à admettre "l’inconfortable réalité" sur l’Ukraine et à changer rapidement de stratégie ». Et à cesser le discours jusqu'au-boutiste de la victoire qu'ils avaient jusqu'à présent servi à leurs propres peuples. Concrètement, ils envisagent une solution à la coréenne ou à la chypriote : « Un armistice est en vigueur depuis 1953 entre les deux Corées, mais le "statut final" n’est toujours pas résolu. Le cas de Chypre est également intéressant. Depuis le début des années 1970, il n’y a pas de règlement juridique ni de "paix" à proprement parler, mais les armes se sont tues, les gens vivent leurs vies, vaquent à leurs occupations. Là encore, c’est une situation provisoire, injuste aux yeux de beaucoup, mais mieux que l’alternative, à savoir la guerre ».

On sait aussi que le retrait ukrainien sur le terrain se fait avec des pertes russes considérables, comme le révèle une enquête du Figaro. Un article qui ne dit rien des propres pertes ukrainiennes. Ce que l'on sait, en revanche, c'est que les désertions se multiplient, côté ukrainien : 15.000 en un an.

Incontestablement, tous les voyants sont au rouge pour que la paix advienne, et depuis plusieurs mois.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

14 commentaires

  1. Pour mettre fin à la guerre qu’il a déclenché pour le compte des américains et de l’UE, il lui suffit de hisser le drapeau blanc et de se rendre à Poutine, non ? Il risque sa tête ? Il l’a déjà perdu dans sa folie criminelle…

  2. la réunion des faux jetons, un qui demande des armes et ensuite se dit qu’il u aurait la paix en 2025 (janvier ou décembre ?), toujours en balade loin des armes zélensky se gave des petites sauteries dans chaque pays où il passe, pendant ce temps là le peuple ukrainien se fait tuer, mais où passent les centaines de milliers de dollars donnés à l’Ukraine ? comment est constitué le nouveau gouvernement suite aux nombreuses démissions ?

  3. L’Occident, US-UE, CIA et OTAN en tête se sont fourrés dans un sacré pétrin pour soutenir, ne soyons pas hypocrites, un des régimes les plus corrompus de la Terre. Le coût de cette guerre, qui pouvait être évitée ou arrêtée, est effroyable, d’abord pour les Ukrainiens et pour les Russes, pour les Européens ensuite. La fin juste et rapide de la guerre pour l’Ukraine, ce sera dans tous les cas la défaite de la troïka US-UE-OTAN et la ruine des Européens. MMES et MM Merkel, von der Layen, Johnson, Hollande, Macron, les Peuples d’Europe vous disent merci. Merci de vous être couchés devant les intérêts US. Merci de nous avoir appauvris. Merci d’avoir poussé la Russie dans les bras de la Chine quand celle ci ne demandait qu’à être européenne (bien plus que la Turquie). Merci de nous avoir affaibli face à l’invasion migratoire que vous facilitez quand vous ne l’encouragez pas.

  4. Cette photo, ces visages aux sourires forcés ont du mal a cacher les trahisons. L’UE trahi les peuples occidentaux qui, curieusement, ne réagissent pas et qui même consentent à se résigner, qui à une injection, qui à la bienpensance. Et l’autre, Zelinski, qui envoie ses hommes mourir, non pour gagner une quelconque guerre, mais pour plaire à l’occident en perdition et qui se croit encore le maitre du monde. L’illusion et la perfidie comme seules convictions de ces chefs d’Etat répulsifs. L’UE : plusieurs grands pays qui se sont mis ensemble pour en faire un petit, un tout petit.

    • Bien vu. Illusion et perfidie pour seules convictions. « Zélinsky, qui envoie ses hommes mourir, non pour gagner une quelconque guerre, mais pour plaire à l’occident ». Plus précisément je crois pour faire « sa » guerre (déclenchée en 2014) qui un temps, quelque peu révolu aujourd’hui, plaisait beaucoup à Biden (père et fils) et à es sbires (CIA et autres) et s’en mettre plein les poches au passage.

    • C’est la première fois qu’une nation (la Russie) s’oppose aux velléités hégémoniques des USA. C’est un tournant dans la marche du monde car tout le sud s’agrège à la Russie et ça fait beaucoup, beaucoup de monde : les 3/4 de la planète. Le monde est en train de basculer vars la multipolarisation et c’est tant mieux. L’occident ne voulant pas l’accepter (alors qu’il y avait intérêt, surtout l’Europe – incroyable volonté de suicide des européens), ils n’ont que la guerre pour faire croire, encore, à leur puissance. Mais même sur ce terrain, il sont dépassés.

  5. L’Ukraine …les USA vont rééditer ce qu’ils savent faire et ont fait que ce soit au Vietnam et en Afghanistan . Vaincre le communisme ou l’islamisme c’était pour eux LA mission . Ils ont perdu ces guerres et cette Paix qu’ils voulaient instaurée car Le communisme n’a jamais été aussi fort en ASE et l’islamisme est renforcé en Afghanistan. Gageons qu’après les centaines de milliers de morts ukrainiens, les usa se retireront piteusement des frontières russes sans que la vieille Europe n’ait pas eu à trop souffrir d’une guerre americano russe .

      • Pas tout à fait d’accord. Un pont trop loin, c’était une erreur, stratégique certes, mais une erreur parce que le but de la manœuvre n’était pas discutable. L’Ukraine c’est une faute car les buts de cette guerre par procuration sont quant eux discutables et peut être même condamnables, si on veut bien avoir l’honnêteté d’en voir les causes dès les années 90 à partir des quelles l’OTAN ne cesse de s’élargir quand inversement le Pacte de Varsovie est dissous et son démarrage effectif avec le coup d’Etat de Maïdan.

  6. La paix plus que tout. Même si les douleurs et les rancœurs entre les russes et les ukrainiens seront longtemps durables, après cette guerre, comme à chaque fois que des peuples frères se sont entretués. Il faudra beaucoup de volonté de part et d’autre, pour ne pas élever les générations futures dans la haine de l’autre.

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