Est-ce si simple de taxer les riches ?

impôts

Une idée revient à intervalles réguliers : il faudrait taxer les riches afin de combler nos déficits. M. Bayrou vient de se faire le chantre de cette solution au grand dam de LREM, qui se refuse à augmenter les impôts. « Faire rendre gorge aux riches » est très populaire. En fait, en caricaturant, les Français sont d’accord pour que l’État taxe tous ceux qui gagnent plus qu’eux. Le riche, c’est toujours l’autre. Un smicard va affirmer qu’on est dans les catégories très aisées à partir de 3.000 euros par mois, tandis que ceux qui gagnent cette somme placent la barre à 10.000 euros. M. Bayrou, en estimant qu’on appartient aux classes moyennes à 4.000 euros par mois (en couple), a provoqué un tollé.

Les statisticiens considèrent qu’une personne seule est pauvre en dessous de 800 euros par mois, appartient à la classe populaire entre 800 et 1.300 euros, à la classe moyenne entre 1.300 et 2.300 euros, aisée entre 2.300 et 3.155 euros et est riche au-delà. Pour les couples sans enfant, on est pauvre en dessous de 1.550 euros, dans la classe moyenne entre 2.500 et 4.500 euros et riche au-dessus de 6.200 euros. Enfin, un couple avec deux enfants est pauvre en dessous de 2.000 euros, dans la classe moyenne entre 3.400 et 5.800 euros et riche au-dessus de 8.200 euros. Il faut avoir à l’esprit que, selon l’INSEE, la moyenne des revenus, en France, n’est que de 1.610 euros par mois et de 2.336 euros par les emplois à plein temps (hors emplois aidés).

Imaginez qu’on décide de s’en prendre aux 1 % des Français les plus riches (7 % des revenus, 30 % du patrimoine), de saisir la moitié de leur patrimoine : l’État récupérera des actions, des placements financiers, des logements qui deviendront invendables, la population capable de les acheter ayant été rackettée. Si on confisque la villa de vacances d’un « riche » sur la Côte d’Azur, qui pourra l’acquérir, puisqu’on aura frappé au portefeuille tous ceux qui avaient, autrefois, les moyens de l’acheter ? De même, si on prend la moitié de la fortune colossale d’Elon Musk, on ne fera main basse que sur des actions de Tesla™. Si on essaye de les vendre, leur prix va s’effondrer et être divisé par 100 ; elles ne sont à un niveau élevé que parce qu’elles ne sont pas sur le marché. Finalement, en confisquant une partie des biens d’Elon Musk, on saisirait du vent !

On peut, bien sûr, s’attaquer aux revenus des « riches ». Entre 1945 et 1980, les tranches les plus élevées de l’impôt sur le revenu atteignaient 90 % dans tous les pays du monde. L’arrivée au pouvoir de Reagan et de Mme Thatcher a sonné le glas de ces taux élevés. Désormais, le maximum est souvent de 45 %. Si un pays s’avisait de revenir au taux de 90 %, la sanction serait immédiate : ces riches prendraient la poudre d’escampette et sa fiscalité serait perdante, car les « riches » ne dépenseraient plus de TVA dans ce pays.

En France, on a mis en place une timide surtaxe qui concerne 42.000 contribuables. Elle n’a rapporté que 369 millions d’euros, en 2019, contre 569 millions, à sa création en 2011. Très insuffisant pour combler le déficit et, pourtant, on est au maximum de ce qu’on peut faire. Alors que si on prélevait 1.000 euros par an sur ceux qui gagnent plus de 2.000 euros par mois (environ 20 % des Français), on récolterait 6,4 milliards. Voilà pourquoi on s’attaquera toujours aux classes moyennes et non aux très riches !

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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