Et pourquoi pas le plan de table pour Noël ? Et si l’on arrêtait de nous infantiliser ?

table

Autrefois, lorsqu’on se trouvait confronté à une situation absurde, on disait « en perdre son latin ». Plus raccord avec son époque, le Premier ministre, confronté à l’absurdité des décisions qu’il annonce jour après jour, n’en perd plus son latin mais ses lunettes…

Une fois retrouvées sur son nez, Jean Castex a annoncé, jeudi, la stratégie pour les temps à venir. D’abord, point essentiel, le nombre de convives pour Noël : pas plus de six, sans compter les enfants. Encore un peu et l’on va nous donner la recette de la bûche et la façon idoine de peler les marrons et farcir la dinde.

Pour se faire pardonner de s’immiscer dans le passe-plat, le Premier ministre a assuré être dans la bonne moyenne européenne : « La plupart de nos voisins européens ont fixé un nombre maximum de convives à réunir pour ces réveillons, allant de six à dix personnes, hors enfants, selon les pays. » Il n’y a donc pas lieu de râler. Et de l’autre côté de l’Atlantique, c’est pire encore.

Ainsi nos amis québécois sont-ils carrément interdits de rassemblement. Leur Premier ministre François Legault, qui tenait lui aussi sa conférence de presse jeudi, a annoncé des mesures plus restrictives que prévu : initialement autorisés à se retrouver entre le 24 et le 27 décembre, avec au plus 10 personnes, les Québécois sont maintenant priés de rester seuls chez eux.

C’est surtout la peur du voisin américain qui inquiète les Canadiens. « Quand on regarde, entre autres, tout ce qui se passe aux États-Unis, ce qu’on nous dit, c’est que les trois prochains mois vont être les pires de la pandémie. […] on n’est pas très loin des États-Unis. Donc, on ne peut pas penser qu’on est sur une planète différente », a dit François Legault. Pourtant, il voulait plus que tout « que les gens aient de l’espoir » et « peut-être régler certains problèmes de santé mentale ». Ben oui, parce qu’il ne vous aura pas échappé que la grande dépression nous guette…

À ce propos, RTL recevait, ce vendredi matin, la psychologue Marie de Hennezel. Engagée depuis des décennies dans les questions de fin de vie, elle publie aujourd’hui L'Adieu interdit (Éditions Plon) où elle dénonce les conditions réellement inhumaines qui ont été et sont de nouveau imposées aux personnes âgées durant le confinement.

Interrogée par Alba Ventura, elle n’a pas mâché ses mots : « C’est la peur qui a eu raison de l’humain », et d’en pointer les conséquences infiniment plus mortifères que le virus. « Du jour au lendemain, on a été obligé de séquestrer dans leur chambre des personnes âgées qui n’ont eu comme seul contact que le soignant qui pouvait passer de temps en temps, et tout d’un coup, tout ce qui faisait leur joie de vivre a été arrêté », dit-elle. Surtout, les familles « n’ont pas pu venir accompagner quelqu’un qui était mourant, et qui ne mourait pas seulement de la Covid mais aussi de solitude, de chagrin ». Or, ce sont ces proches, des personnes « qui ont des deuils impossibles à faire », qui peuplent aujourd’hui les cabinets médicaux.

La raison est que « nous sommes dans une société qui dénie la mort », dit-elle, une société où « les personnes âgées sont dans une grande solitude parce qu’on ne peut pas dialoguer avec elles autour de cette question qui est forcément dans leur tête ».

Choquée par l’emploi des mots « papy et mamie » dans la bouche du Pr Salomon, Marie de Hennezel s’indigne : « Il y a, dans le discours politique, aujourd’hui, une infantilisation qui, encore une fois, est un des ingrédients de la dépression des Français. »

« Je crois que le gouvernement n’a pas du tout mesuré les effets délétères du confinement », dit la thérapeute, mais elle en constate déjà les ravages : des personnes qui faisaient tout pour rester autonomes sont aujourd’hui en plein glissement. On estime ainsi que, dans les mois qui viennent, il pourrait y avoir « au moins 30 % de plus de personnes en perte d’autonomie ».

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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