Et si Marine Le Pen ou Éric Zemmour n’avaient pas leurs 500 signatures ?

MARINE LE PEN ZEMMOUR

Que n’entendons-nous pas, ces derniers jours ! « Ce n’est pas possible, ils (Le Pen et Zemmour) les auront, leurs signatures, c’est du chiqué ! Ils jouent à se faire peur, à nous faire peur. Ils jouent la montée des tensions, comme Poutine ! D’ailleurs, le candidat du Front national a toujours eu ses signatures, etc. » Sur ce dernier point, c’est faux : en 1981, année où le nombre de parrainages nécessaires passa de 100 à 500, Jean-Marie Le Pen ne fut pas en capacité de se présenter. Mais à l’époque, le Front national ne pesait pas ce qu’il pèse aujourd’hui, même en perte de vitesse.

Il n’empêche qu’à l’heure où nous écrivons ces lignes, le compte n’y est pas, ni pour Zemmour qui, pourtant, la semaine dernière, affirmait l’avoir, ni pour Le Pen. Cette dernière joue (si on peut appeler cela un jeu) la totale transparence en annonçant, ce lundi, qu’il lui manquait 50 parrainages et que ce serait un véritable « scandale démocratique », si cela arrivait. 50 ? C’est beaucoup et c’est rien, dans un pays qui compte 42.000 élus pouvant donner cette signature.

Et donc, si le 4 mars soir Marine Le Pen ou Éric Zemmour n’avait pas ces 500 signatures ?

Première hypothèse : l’un ou l’autre. Plus de 15 % du corps électoral privé d'élection : du jamais-vu dans une démocratie digne de ce nom.

Mécaniquement, même s’il y aurait sans doute des « pertes en ligne », l’un ou l’autre récupérerait une grande partie du capital de son ancien concurrent et, par ailleurs, un grand nombre d’électeurs déçus irait rejoindre la trop grande cohorte des abstentionnistes. Où se situerait le curseur entre ralliés à l'un ou l'autre et nouveaux abstentionnistes ? Difficile à dire, aujourd'hui. Ce qui est certain, c’est que Valérie Pécresse, tout aussi mécaniquement, pourrait définitivement dire adieu à ses chances de qualification pour le second tour, Le Pen ou Zemmour lui passant largement devant. Durant les quelques jours restant avant la clôture des dépôts au Conseil constitutionnel, les LR devraient y réfléchir un instant. À moins qu’ils aient déjà fait le deuil, in petto, de la qualification de leur candidate. Lorsqu’on voit avec quel enthousiasme elle est soutenue par sa « famille politique »…

Seconde hypothèse : l’un et l’autre. Autrement dit, plus de 30 % du corps électoral privé de candidat : une honte pour un pays qui se permet de donner des leçons de démocratie au monde entier.

Pécresse récupérerait sans doute une bonne partie de l’électorat de Zemmour et peut-être une partie de celui de Le Pen, la détestation de Macron, sur qui serait rejeté, justement ou injustement, la faute de cette élimination des candidats du camp national à l'élection reine. Mais l’abstention connaîtrait probablement un taux jusqu’alors inconnu. Il n’est pas impossible, d’ailleurs, que dans une réaction épidermique (le peuple a parfois de ces réactions imprévisibles qu'aucun ordinateur ou technocrate ne peut prévoir !), une partie – la plus populaire -, par dépit, se reporte sur Mélenchon (s’il a ses 500 signatures…). Au point de passer devant Pécresse ? Allez savoir !

Dans tous les cas, Macron serait sans doute réélu. Sa légitimité serait plus que sérieusement entamée. Alors, les élections législatives de juin pourraient ne pas être la promenade militaire de 2017 pour ses troupes. Le peuple, c’est comme l’eau, lorsqu’on le contraint et qu’on veut lui faire emprunter un lit qui n’est pas le sien, il finit par se rebiffer, se venger, parfois terriblement ! Et l’on évoque là une vengeance démocratique, bien gentille et comme il faut : dans les urnes. Pas certain, dans ce cas, que Macron ait alors la majorité. Bien évidemment, on n’ose pas évoquer, ici, le pire à côté duquel le mouvement des gilets jaunes passerait pour un mouvement de boy-scouts ou de non-violents.

On pourrait, bien évidemment, imaginer que Mélenchon, lui aussi, n'ait pas ses signatures. Tant qu'à faire ! Une chose est certaine : cela ne tirerait pas Hidalgo de sa médiocrité...

Les régimes à bout de souffle s’effondrent toujours après une crise longue, profonde, larvée. Il suffit parfois d'un grain de sable, d'un incident tout bête et tout s’enchaîne et tout s’effondre. L’absence des candidats du « camp national » à cette élection, qui n'aurait rien d'un incident tout bête, pourrait tout précipiter.

Curieusement, aujourd'hui, la survie de notre démocratie et peut-être de notre paix civile est entre les mains, non pas de nos parlementaires et du Président, mais dans celles de ces élus de la « proximité » que sont les maires de France. En ont-ils tous bien conscience ?

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

171 commentaires

  1. Si Zemmour n’a pas ses 500 signatures, je mettrai quand même un bulletin à son nom dans l’urne au premier tour, et aussi au deuxième.

  2. Si l’un des candidats n’a pas ses 500 signatures, l’élection risque de se faire dans la rue et pas dans les urnes.

  3. Il n’ est pas souhaitable que l’un ou l’autre n’ ait pas ses signatures. L’ abstention serait énorme mais le soulèvement populaire sûrement nul. Car le peuple ( docile à souhait depuis le covid) ne se rebiffera pas. il l’ aurait fait plus tôt !!! Ainsi la Patrie serait irrémédiablement modifiée par perte d’un candidat patriotique. Je n’ai pas connu l’ Atlantide….Pays englouti? Je connais la France qui m’ a forgée, par contre….

  4. Il semble que l’ensemble des commentateurs n’aient pas enregistré qu’ils ne sont plus dans une démocratie, pourtant les signes depuis 2017 sont évidents.

  5. Macron est le seul garant pour changer la situation mais visiblement il ne bouge pas le petit doigt ce n’est pas à son honneur, ce qui va se passer on sera dans la rue on bloquera les bureaux de votes et pire encore!.

  6. Dans l’hypothèse où Zemmour et/ou Le Pen n’obtiendrai(en)t pas leurs 500 parrainages, c’est surtout la « paix civile », évoquée à la toute fin de cet éditorial, qui, à mon sens doit représenter le souci majeur de nos décideurs politiques. Comme l’a dit fort justement MLP dans son appel aux maires, la France est une cocotte minute en ébullition. Si demain 15 voire 30% des électeurs devaient se retrouver orphelins, Macron; même réélu, aurait du souci à se faire…

  7. Si Zemmour ou LePen n »ont pas le droit de participer, je voterai en mettant dans l’enveloppe un bulletin blanc avec marqué au stylo Zemmour ou LePen. Certes mon bulletin sera invalidé mais si on est beaucoup à faire de même, l’impact médiatique sera plus grand que voter blanc ou s’abstenir

  8. Vous posez bien le problème.
    Mais j’en viens à m’interroger. Et presque souhaiter que le » Camp du mal » n’obtienne pas les signatures. Je m’explique ; s’ils obtiennent les signatures, ce sera l’éternel « barrage républicain » de tous les faux-culs qui renverront une fois de plus le camp nationaliste dans les cordes.
    Imaginez un seul instant le patacaisse si ni Marine, ni E.Z. n’obtiennent les signatures?
    Quelque fois un bon scandale peut faire davantage bouger les choses…

  9. j’aimerai que l’on publie la liste des maires frileux et antidémocrates qui ont refusé de parrainer l’un des candidats importants, nous pourrons nous en souvenir lors des prochaines élections municipales

  10. Mon colonel,
    Je pense que votre hypothèse est probable. C’est la solution que le « système » met en oeuvre cette année 2022 pour empêcher le « péril » d’extrême droite d’arriver au pouvoir. Tant pis pour la démocratie, cela serait trop risqué de demander aux électeurs de choisir.
    Certains candidats hypocrites diront leur compassion mais expliqueront que « c’est la règle du jeu » et d’autres (Hidalgo, Roussel) s’en félicite déjà.
    Que pourrons nous faire sinon pleurer ?
    Mais surtout Vive La France.

  11. quand des candidats n’ayant aucune chance d’etre élus voir meme d’etre rembourses de leurs frais affichent une plétore de parrainages on est en droit de se demander si « éliminer » ceux vraiment éligibles par ce manque de parrainage n’est pas une stratégie délibérée

    • C’est exactement ce que je pense…….. macron aurait pu intervenir et ne le fait pas, donc c’est voulu par lui et ses sbires

  12. Prenons exemple sur la Hongrie. Pour présenter sa candidature à l’un des 106 sièges de député il faut recueillir 500 signatures. Pour présenter la liste nationale de 93 membres conduite par le candidat au poste de premier ministre (le président ne joue qu’un rôle marginal) il faut avoir des candidats dans 75 circonscriptions, ce qui représente une collecte totale de près de 40 mille signatures. Pour un pays de 10 millions d’habitants.

  13. Quelle que soit la fin de ce scandale, les « zelus » recevront la monnaie de leur couardise. Les urnes ça les concerne également.

  14. Difficile de convaincre les abstentionnistes de voter dans le contexte actuel. La campagne se réduit à la comptabilisation de parrainages. Les journalistes et commentateurs oublient Nicolas Dupont-Aignan (à qui il ne manque que dix parrainages), dont je persiste à penser que son sérieux, son honnêteté et son expérience garantissent la qualité de sa candidature et de son programme. Tant pis pour ceux qui ne veulent pas voir au-delà des candidats adoubés par la propagande officielle.

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