Europe : l’idéocratie bruxelloise et la tentation autoritaire du progressisme

macron strasbourg

Emmanuel Macron maîtrise à la perfection la vulgate progressiste. Lors de ses discours, il en enfile les formules creuses comme d’autres les perles. Le 9 mai dernier, à l’occasion de la clôture de la Conférence sur l'avenir de l'Europe, il en faisait, à nouveau, la démonstration. Nous apprenions ainsi que « la liberté et l'espoir dans l'avenir ont le visage de l'Union européenne ». Qu’investir « massivement aux bons endroits, en ne laissant personne sur le bord de la route, c’est ça, être européen ». Et qu’à l’horizon se dessinait, à n’en pas douter, « une Europe plus juste, plus inclusive ». Car l’Europe, « ce sont des rêves fous, des ambitions inédites ».

Pour atteindre ces lendemains qui chantent, le Président soulignait néanmoins une condition sine qua non : il fallait se donner les moyens d’« accélérer le rythme » et, pour cela, se débarrasser du principe de l’unanimité qui entraine veto et retards.

Il rejoignait en cela la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui insistait, elle aussi, sur cette nécessité impérieuse : « J'ai toujours dit que le vote à l'unanimité dans certains domaines clés n'avait tout simplement plus de sens si nous voulons être capables d'avancer plus vite. »

Il semblerait, en effet, que tous les pays européens ne soient pas animés par la même fougue et que certains se complaisent encore dans un passéisme réactionnaire de mauvais aloi.

Dans un sabir philosophico-politique d’inspiration léniniste, Emmanuel Macron s’était alors lancé dans un éloge des « avant-gardes » : « On a peur d’assumer d’être plus ambitieux, et de l’euro à Schengen, c’est toujours la même chose, et nous avons tort parce que ces cercles d'avant-garde n'excluent pas, mais c’est permettre à ceux et celles qui veulent avancer un peu plus loin d'entraîner les autres et de rendre l'ambition désirable, au lieu de rendre l'attentisme plus risqué. » Traduction : la révolution progressiste ne se fera pas si on attend de mettre tout le monde d’accord. Comme Lénine l’avait parfaitement compris, il faut s’en remettre au parti d’avant-garde constitué de militants animés d’une conscience révolutionnaire sans faille et d’une détermination à précipiter l’évolution des choses.

Dans son livre Le Diable dans la démocratie, le philosophe et ancien ministre de l’Éducation polonais, Ryszard Legutko, notait les similitudes qu’il observait entre l’évolution des démocraties libérales et les anciens systèmes communistes. Évoquant son expérience au Parlement européen, il rapportait les constats suivants : « Même un contact distant avec les institutions de l’Union européenne permet de ressentir l’atmosphère de raideur typique d’un monopole politique, de constater la destruction du langage qui devient une forme de novlangue, d’observer la création d’une méta-réalité, de nature principalement idéologique, qui masque le monde réel, d’être témoin de l’hostilité violente qui se manifeste contre tous les dissidents et de déceler maintes choses qui ne sont que trop familières à ceux qui se souviennent d’un monde gouverné par le Parti communiste. »

L’Europe, telle que la façonnent aujourd’hui les progressistes (Macron en tête), prend toujours plus la forme d’un projet idéologique. En cela, elle se transforme en une « idéocratie » qui tolère de moins en moins la contestation. Nous assistons ainsi au phénomène suivant : plus le progressisme se voit contesté par le réel et par les peuples qui le subisse, plus il se radicalise. Et plus il utilise le droit, la censure et le système judiciaire pour s'imposer et museler ses adversaires. Certains pays européens refusent de s’aligner ? Qu’à cela ne tienne, supprimons la règle de l’unanimité et poursuivons les transferts de souveraineté à une élite éclairée qui saura, elle, prendre les bonnes décisions pour l’avenir.

Les États-Unis d'Amérique ont offert un parfait exemple de cette radicalisation : l'élection de Donald Trump, loin de conduire à une prise en compte des revendications des rednecks, les « bouseux blancs », aboutira, sitôt sa chute annoncée, à une déferlante de wokisme, de cancel culture et de théorie du genre.

En France, la candidate de la droite nationale s’est hissée au second tour et a obtenu plus de 41 % des voix. Peu importe, cependant, les préoccupations de ses électeurs sur les questions sécuritaires et d’immigration. Emmanuel Macron et son « avant-garde » progressiste savent ce qui est bon pour eux : « Agir fort. Aller vite. Rêver grand. »

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Frédéric Martin-Lassez
Chroniqueur à BV, juriste

Vos commentaires

38 commentaires

  1. Le jeune guide suprême de l’Europe en plein discours , et la présidente de la Commission en extase.

  2. -un éloge des « avant-gardes » – le marxisme avait l’avant garde éclairée du peuple.
    Macron se dit en France un « nouveau président » pour un « nouveau peuple », Mao avait l’homme nouveau , et au passage Macron reconnait le « Grand Remplacement ».
    L’idéologie cachée de l’UE emprunte au marxisme ses concepts de gouvernance et de soumission des peuples.
    L’Europe est un « machin » en expansion, des pays en attente d’adhésion , et pour cela les frontières doivent disparaitre, et l’immigration fluide.

  3. On va dire que je suis complotiste, mais lorsque je considère les effets de la guerre en Ukraine, l’évolution politique de l’Europe, tout semble contribuer au développement du nouvel ordre mondial.

    • Complotiste: qui dénonce un complot…
      Lequel existe et est parfaitement documenté.
      Ce sint les comploteurs qui utilisent l’accusation de complotisme pour discréditer ceux qui les démasquent.
      La vérité finira par émerger, mais combien de souffrances comme prix de l’aveuglement, en attendant

  4. C’est odieux, dangereux mais avant tout idiot : et cela va donc échouer car il y a 27 histoires, 24 langues et 500 millions d’habitants…Ce que la Suisse a fait avec 3 langues principales ne fonctionne que grâce à une démocratie très forte, des réunions
    fédérales où chacun parle sa langue, et des referendums (RIC) alors qu’on nous en a privés depuis 17 ans. Patience. On ne fait rien sans les peuples et contre les peuples

  5. Dans son livre, Riszard Legutko dénonce le libéralisme qui est l’idéologie de la caste européiste. Le progressisme comprend le communisme, le socialisme et le libéralisme qui fut la matrice des deux premiers. Le libéralisme est l’idéologie des institutions européennes depuis leur origine. Monnet était un agent des États-Unis et, pour lui comme pour ses successeurs, la construction européenne avait pour fin d’imposer l’idéologie américaine à une Europe occidentale soumise au maître américain.

    • Le mot libéralisme est à comprendre ici dans le sens anglo-saxon. Le libéralisme français est tout autre chose. Ces gens-là ont l’art de pervertir le sens des mots.

    • Depuis l’origine en effet l’Europe est une organisation sous contrôle de « l’Empire américain » , un gigantesque marché aux nations vidées de leur substance par des transferts de souveraineté et par une immigration massive venue d’ailleurs.

  6. L’UE, rien d’autre qu’une idéologie porté par quelques « fous » et qui ne nous apporte absolument rien de positif mais nous coute « un pognon de dingue » sans parler de toutes nos pertes, souveraines ainsi que nos libertés . Pour une fois, seule le model Anglais est de rigueur. Le Frexit est plus qu’une nécessité.

  7. Agir vite pour foncer plus vite dans le mur !
    Macron et Ursula doivent appartenir et obéir à la même obédience.
    Ces gens vont martyriser l’Europe et les européens si on les laisse faire.
    Avec des fous hystériques comme eux, demain nous serons pucés !
    Ne dite pas que c’est complotiste, La même chose a été dite pour le confinement et les masques (inutiles tous les deux).
    Macron n’a pas de limite !

  8. Macron-Leyen ont trouvé la solution, il suffit de réformer les traités. On passe à la majorité et non plus à l’unanimité, ce qui rend bien plus facile la gouvernance ; les petits pays dépendant de la manne de Bruxelles auront intérêt à se coucher. On modifie tout ce qui, dans les traités, empêchait encore Bruxelles de se mêler de tout dans chaque pays. Le but ? Que Bruxelles ait encore plus de droits pour faire filer doux les peuples d’Europe, sur le Covid, l’Ukraine, l’Islam, l’immigration…

  9. « Agir fort Aller vite Rêver grand » venant de Macron et de sa clique progressiste ,sorte de JO du NOM , risquent de tourner très vite au cauchemar pour les peuples ;
    Sans véritable légitimité et pour éviter toute contestation , ils compensent par la force et la domination selon les méthodes bolchéviques d ‘ arrière garde , qui conduisent tout droit à la tyrannie ;
    Macron et son double , Van der Layen , rivalisent de zêle dans ce combat , ces gens là sont très inquiétants et dangereux .

  10. Macron arrive a cumuler trois rôles : le bon, la brute et le truand, mais attention le « bon » n’est là que pour épater la gallerie…

  11. Dans le fond , si on lit bien l’article, tout dépendra de ce qui se passe à l’Est.
    Il devient de plus en plus évident que les politiques européistes veulent une guerre par contre il commence a y avoir des opinions discordantes ( voir ce qui se passe au niveau des spécialistes militaires italiens et la fermeté d’Orban en Hongrie et ils sont pas seuls).

    • Ça ne va pas être si facile, déjà 13 pays parmi les 27 ont annoncé qu’il était hors de question pour eux de revoir les traités, qu’ils ne voulaient pas de changement…
      Bulgarie, Croatie, République tchèque, Danemark, Estonie, Finlande, Lettonie,  Lituanie,  Malte, Pologne, Roumanie, Slovénie et  Suède ont fait une déclaration commune

  12. En marche vers l’ autoritarisme. Le droit de vote réservé à leyen et Macron, le reste de l’ UE au garde à vous écoutant les divines paroles. Et ce n’ est que le début de son deuxième mandat, ajoutez lui un Mélenchon et demain fermer le ban la France est rayée des états.

    • Cet autoritarisme n’est pas une surprise. L’UE a toujours été conçue comme une autorité supranationale non démocratique qui s’impose aux souverainetés nationales. Et les concepteurs lointains de ce « machin » étaient très inspirés par Marx ou Trotski.
      Les démocraties dites « libérales » n’étaient qu’une étape d’un projet totalitaire.

  13. Ahurissant, 450 millions d’européens livrés à la dictature technocratique d’une poignée d’élus tels que notre président, ne représentant pas plus d’un cinquième d’électeurs dans son propre pays. Porté une seconde fois au pouvoir par défaut et par à peine 40% du corps électoral. Jusqu’à quand et jusqu’où l’imposture peut elle aller. Car enfin, comment un personnage peut il durablement faire illusion à l’international, tandis que son pays se meurt sous la vacuité de son gouvernement. Préoccupant!

    • Non pas préoccupant, mais carrément terrifiant. Vladimir BUKOVSKI nous avait prévenu, « J’ai vécu votre futur et ça n’a pas marché… ». Cordialement.

    • 450 millions d’européens livrés surtout à la dictature technocratique d’une poignée de commissaires non élus ! Qui pour arrêter une dangereuse Ursula Von der Leyen ?

      • Personne tant qu’elle aura l’appui de l’élite ploutocratique. En plus, les peuples manipulés votent pour que ça continue…

  14. Le Digital Servil Act voté en avril par le Parlement européen fournit un instrument du contrôle de l’information aux progressistes. Seule la « bonne opinion » aura droit de cité sur la toile.

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