[Exclusif] Législatives : le système la main dans le sac (1/3)

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Chiffres en main, les incroyables compromissions de la Macronie avec le NFP et LFI

Alors que la nomination d'un nouveau Premier ministre est imminente, BV revient sur l'élection de l'Assemblée avec laquelle il devra gouverner la France. Une Assemblée issue de compromissions inédites entre le pouvoir en place et ses oppositions de gauche et de droite. Chiffres en main, BV refait le match en trois articles publiés sur trois jours. Qui a fait élire qui, avec quel résultats ? Cette étude dévoile les arcanes d'un système politique verrouillé, sans voile. Aujourd'hui, les incroyables compromissions de la Macronie avec le NFP et LFI.

À entendre les vifs échanges entre la gauche et le camp présidentiel dans la cadre de la nomination d’un Premier ministre qui n’a toujours pas eu lieu, à l’heure où nous écrivons, près de deux mois après le second tour des élections législatives du 7 juillet dernier, on pourrait croire à une opposition farouche entre ces deux camps.

Il n’en est rien et le « front républicain » resuscité dans la semaine d’entre-deux-tours a donné lieu avant tout à un puissant accord électoral entre gauche et centre pour barrer l’accès au pouvoir du Rassemblement national. Objectif : lui faire perdre le nombre le plus important possible de députés et éviter qu’il ait une majorité absolue ou relative.

La modalité pratique de ce front républicain a consisté, pour le Nouveau Front populaire mais également pour la coalition macroniste Ensemble (Renaissance + MoDem + Horizons), à maximiser le nombre de désistements (décisions prises deux jours après le premier tour du 30 juin). Sur 308 triangulaires possibles (les candidats arrivés troisièmes ayant obtenu 12,5 % des électeurs inscrits ou plus peuvent se maintenir), seules 90 triangulaires, donc moins d’un tiers, ont effectivement eu lieu, le plus souvent via la participation au second tour du candidat RN ou LR-RN arrivé troisième.

Cette stratégie de front républicain, fortement appuyée par les médias traditionnels, a réussi, comme l’indique le tableau ci-après, au niveau des coalitions.

Ainsi, 86 des 166 députés élus de la coalition présidentielle Ensemble ont bénéficié du désistement du candidat NFP arrivé troisième, soit plus de la moitié du total. En retour, 50 des 193 députés NFP (le quart) ont bénéficié du retrait du candidat Ensemble.

23 des 99 députés Renaissance ont bénéficié du retrait de LFI

Un zoom particulièrement révélateur concerne les désistements entre le parti macroniste Renaissance et LFI alors que les relations entre ces deux partis semblent particulièrement dégradées, à l’image du projet de destitution d’Emmanuel Macron lancé par LFI, le 26 août dernier. La dureté des termes retenus… ou le théâtre politico-médiatique n’empêchent pas 23 des 99 députés Renaissance d’avoir bénéficié du retrait du candidat LFI.

C’est le cas de deux personnalités majeures de l’ère Macron, à savoir l’ancien Premier ministre Élisabeth Borne (6e circonscription du Calvados) et le ministre de l’Intérieur démissionnaire Gérald Darmanin (10e circonscription du Nord). L’opposition farouche de LFI à la réforme des retraites portée en 2023 par Élisabeth Borne ou la défiance vis-à-vis du chef d’une police qui « tue » n’a en aucune manière conduit le parti de Jean-Luc Mélenchon à s’opposer à ces responsables politique emblématiques par un maintien de LFI au second tour.

En réciprocité, dix députés LFI ont été élus dans des circonscriptions où le candidat Renaissance s’était retiré. C’est le cas dans la 4e circonscription de la Sarthe, où la candidate LFI Élise Leboucher a battu Marie-Caroline Le Pen avec 50,23 %, contre 49.77 % (225 voix d’écart sur 53.907 suffrages exprimés). LFI doit ainsi une fière chandelle à la candidate macroniste Sylvie Casenave-Péré, qui avait fait le score de 25,88 % au premier tour.

« Un qui coupe les oignons et l’autre qui pleure »

Ces décisions de désistements mutuels, souvent couronnées de succès avec le soutien des médias dominants mais aussi l’assentiment des Françaises et des Français, conduisent à regarder avec plus de circonspection les bruyantes oppositions du NFP et de LFI contre Macron (et vice versa), ce qui rappelle la formule de Coluche sur l’opposition entre Jacques Chirac et Raymond Barre dans les années 1970 : « Ils ont un numéro de cirque : y en a un qui coupe les oignons et l’autre qui pleure. »

De façon concrète, il y a certes de puissants sujets d’opposition entre LFI et la coalition d’Emmanuel Macron, par exemple dans le champ économique ou de l’ordre public. Mais deux enjeux coalisent instantanément ces deux versants du progressisme à la française : les sujets de société (la constitutionnalisation du droit à l’avortement est issue d’une proposition de loi de la cheffe du groupe LFI à l’Assemblée nationale Mathilde Panot) ou la volonté de barrer la route « aux extrêmes » (sous-entendu d’extrême droite). C’est bien ce qu’a déclaré, le 27 août, François Bayrou : la volonté que le RN n’ait pas la majorité absolue à l’Assemblée nationale a gagné les élections et non la coalition ayant le plus grand nombre de députés (NFP).

 

À lire demain mercredi : Les LR non ciottistes, bénéficiaires innocents ou passagers clandestins du front républicain ?

Jeudi : Le RN et ses alliés, entre désillusions et résistance.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 05/09/2024 à 13:30.
Georges Le Breton
Georges Le Breton
Haut fonctionnaire en activité, spécialiste des politiques publiques.

Vos commentaires

52 commentaires

  1. Il serait intéressant de nous donner le nombre de recours auprés du conseil constitutonnel pour invalidation.
    il doir certainement y en avoir, entre qui et qui.

  2. Si le front républicain a été conçu pour empêcher l’accès du RN au pouvoir c’est en réalité le moyen d’empêcher un parti n’ayant jamais eu le pouvoir d’accéder a des documents susceptibles de mettre en lumière les compromissions de tous les parties ayant dirigé la France sous la cinquième république.

  3. Que ce soit Macron ou LFI, les deux cherchent à semer le chaos, pour des raisons différentes mais le résultat sera le même, reste à savoir qui est l’idiot utile de l’autre? L’avenir nous le dira.

  4. Des députés pour quoi faire, là est la question ?? Ces personnes ne servent à rien et nous coûtent un maximum sans compter leurs nombreux avantages. Ils se promènent dans la nature avec un tas de privilèges, se réunissent pour la sieste mangent et logent à nos frais etc…..

  5. La seule solution pour arrêter toutes ces magouilles, c’est que le RN + CIOTTI et affiliés aient 50 pour cent au premier tour. Sl le reste de la droite voit qu’ils risquent d’être élus, ils se ralieront au RN dans état d’âme., la gamelle est trop bonne !!

  6. Victor Hugo affirmait que: « Quand le peuple sera intelligent, il sera souverain ». Nous constatons tous les jours que tout est fait pour abêtir le peuple. Il ne sert à rien de nous lamenter quand on constate que les électeurs tombent à chaque fois dans le piège tendu. Ceux qui souhaitent être élus n’ont aucune envergure mais s’emploient à conserver leur siège. Il faut donc rééduquer les électeurs. Les politiques sincères, ceux qui veulent avant tout sauver la France se doivent de s’unir et non de se quereller sur des broutilles en dénonçant les petits arrangements de ceux qui détruisent le pays.

  7. En réalité, RN et NFP sont faits pour travailler ensemble, tant leurs programmes économiques sont proches et délirants ! Ne sont-ils pas ??

    • C’est fort juste, la différence se situe sur l’immigration et la police. J’ai toujours dit que le RN se classe entre les macronistes et le PS.

  8. si les électeurs réfléchissaient avant d’aller voter nous n’en serions pas là, les fautifs se sont ces moutons de panurge

  9. Excellente analyse ; si dès que le RN est aux portes du pouvoir ,l ‘ ensemble du monde politique se lie contre lui , il a peu de chance de parvenir enfin à gouverner ; vers un parti unique l ‘ excluant ?

  10. Le parti au final vainqueur des élections :
    Magouilles et Cie.
    Seule la proportionnelle
    intégrale permettrait au peuple de s’exprimer de manière significative.

  11. On assiste simplement à une rebipolarisation de la vie politique, qui va ressembler à celle des États-Unis. Le bloc central et le bloc de gauche ne formeront qu’un camp qui ressemblera au parti démocrate de Biden, et qui considéreront que tout le reste relève du trumpisme.

  12. Les magouilles politiques sont la source de l’abstention de millions de votants, écoeurés par les ententes malhonnêtes des prétendants à la gestion du pays.

  13. Ils ne cherche pas à régler les problèmes des Français le déclin économique , la santé, la sécurité,l èducation l immigration ce qu ils veulent c est garder le pouvoir et profiter de leur position.

  14. La tambouille, la soumission, en un mot des riens politicards et électeurs. Pauvre France, faudrait pas les avoir en OPÉ derrière soi, ils te tireraient dans le dos pour essayer de sauver leur peau.

    • Feu mon père, officier de réserve, me disait qu’en cas de conflit, il fallait d’abord faire le ménage derrière avan d’y aller.

  15. Ces élections ont été celles des compromis et surtout compromissions . Je serais de gauche ,je me sentirais cocufié par ces cyniques personnages qui les représentent. Ils nous ont fait leurs numéros de claquettes en faisant croire qu’ils étaient vent debout contre la loi sur les retraites, et voilà que tout ce beau monde se retrouve pour les bonnes places.
    Sans parler de ce jeu entre Darmanin et la gauche, l’un jouant le flic de choc, et les autres les antiflics pour se retrouver à l’instar du slogan de la CGT: « tous ensembles ,tous ensembles » dès qu’il y a des élections !
    Je pense sincèrement et depuis longtemps déjà ,qu’au delà de la comédie de la fausse opposition , il y a collusion des centristes et autres droite molle avec l’extrême gauche sur fond d’immigration de masse, qui a eu son importance dans ces élections; l’un fournissant la matière que l’autre va exploiter électoralement . Il faut bien renvoyer l’ascenseur de temps en temps!

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