Fanny Ardant défend Gérard Depardieu : une leçon d’honneur

Elle ne cherche pas à l'excuser. Il n'est d'ailleurs pas excusable. Simplement, elle est là, debout, impériale.
Capture d'écran
Capture d'écran

Fanny Ardant est une femme libre. Elle aime vivre intensément, elle aime vivre dangereusement. Elle est fière, elle semble inaccessible. On la trouve bourgeoise ? Elle choisit des rôles à contre-emploi. On la croit de gauche ? Elle cite de mémoire des passages entiers de Pasolini, dans lesquels il fustige le psittacisme des petits gauchistes. Il y a une chose, toutefois, qui ne surprend jamais chez elle : sa sincérité.

Une femme libre et courageuse

Cette semaine, elle est venue témoigner en faveur de son vieil ami Gérard Depardieu. À vrai dire, on l'écouterait témoigner en faveur de n'importe qui, de sa voix sublime qui effleure les consonnes et caresse les voyelles. Mais là, elle était bien seule. En noir. Elle a commencé par dire que beaucoup de gens avaient eu peur de venir parce que cette fidélité à Gérard Depardieu aurait signé leur arrêt de mort, une mort sociale et professionnelle, dans un milieu du spectacle subitement passé du droit de cuissage à la chasse aux sorcières.

Elle s'en fout, Fanny Ardant. Elle est de l'époque où on tolérait des choses qui semblent aujourd'hui intolérables. Elle sait que son ami Gérard n'est pas un finaud. Elle ne cherche pas à l'excuser. Il n'est d'ailleurs pas excusable. Il est condamnable et même condamné. Simplement, elle est là, debout, impériale, comme un clin d'œil à un monde qui s'en va. Comme la protagoniste de Madame rêve, de Bashung, qu'elle incarna dans le clip de la chanson, peut-être ne veut-elle rien d'autre, dans la vie, depuis toujours, qu’« un amour qui la flingue », et elle sait sans doute que ces amours-là ne mûrissent pas avec des tableurs Excel de pratiques sexuelles tolérées et des formulaires de consentement.

L'ogre et la panthère

Gérard Depardieu est sans doute un ogre, mais Fanny Ardant, elle, est une panthère. Fidèle, pleine de panache et souverainement étanche à l'opinion des autres. Elle a embrassé son ami après avoir dit son affection pour lui. Un geste plein de grandeur, d'amitié, d'honnêteté. Un geste d'autrefois, parce qu'elle sait (elle l'a dit) qu'elle est du monde d'avant. Habituée des films à costumes, qu'elle a parfois sauvés de sa seule présence, elle rend petit et médiocre tout ce qui se dresse face à elle. La boue ne l'atteint pas. Les indignations toutes faites non plus. Elle fait taire, d'un battement de cils, tout ce qui pourrait tenter de lui donner des leçons.

On peut se féliciter de la libération de la parole et de la fin du harcèlement sexuel systémique dans le cinéma. On peut aussi se dire qu'une époque comme la nôtre ne produira plus jamais de femmes semblables à celle-ci. De vraies femmes, ni soumises ni hurlantes, qui n'ont pas besoin de carburer à la haine pour tracer leur chemin et se faire une place aux côtés des hommes, et non face à eux. Oui, Fanny Ardant était bien seule, parce que son geste était infiniment au-dessus du lot et que de telles manifestations d'amitié, émouvantes et même admirables, ne courent pas les rues.

Si Depardieu est coupable, rien ne justifie son comportement. En revanche, qu'il soit coupable ou innocent, rien ne justifie une telle curée. C'est tout cela qu'un tel geste rappelle. La panthère au secours de l'ogre : on dirait presque un film, un film triste et sans leçons de morale, dont on sort mélancolique et songeur.

Picture of Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

49 commentaires

  1. J’ai 70 ans et me suis toujours sentie une femme libre. Même si je n’ai jamais milité MLF, je ne me suis jamais posée la question de savoir si, étant femme, j’avais « droit à ou pas droit à « . Je n’avais pas à attendre que l’on me donne le droit mais, logiquement, le droit je le prenais. Quant aux « crimes » commis par Depardieu, quelle femme « normale » (peut-être quel homme ?) n’’en n’ont jamais été victimes ? Il me semble même que c’était, à 1 époque le BA BA de la drague. La réaction logique était de faire comprendre que l’on n’était pas partante, si besoin de repousser l’individu. Cela zst possible, même en n’étant pas ceinture noire de judo. Et la vie repartait généralement comme avant, avec des relations normales entre gens civilisés,. Selon les circonstances, on évitait peut-être de se retrouver seule, dans le noir, avec cet individu aux mains baladeuses. Si toutes les femmes « victimes » de drague se retrouvaient en justice, il faudrait multiplier les moyens des tribunaux par mille. Rappelons aussi que tout particulièrement dans le milieu du spectacle, on parlait de ‘promotion canapé  » ; il n’y a pas de fumée sans feu …
    Évidemment, il n’est absolument pas question de tolérer les agressions séquelles qui explosent, mais là ce n’est pas dans le monde du spectacle et les auteurs n’en sont pas principalementdes mâles blancs. Est-ce pour cela que dans ces cas les pseudo féministes ne se manifestent pas ?

  2. Dans ce microcosme parisien, cette bien-pensance qui se croit le nombril de la France gangrène le pays entier par simple hypocrisie. Elle pousse des cris d’orfraie pour le moindre geste dénoncé à tord ou à raison mais néglige d’ouvrir les yeux sur son propre environnement ou tait volontairement ce qui est connu de tous. Combien de liens plus ou moins ouverts, couverts, accomplis dans les couloirs et niches de ses immeubles, de ses parkings ? Pour ce qui est des actes non dénoncés. Quant aux idées développées, quelles sanctions envers ces personnages publics qui ont ouvertement assuré la promotion de l’inceste ? Un autre temps , autres mœurs nous rétorqueront ces pourfendeurs de ce qu’ils jugent et décident hors norme. Ils nous font leur petite tambouille et nous l’impose ensuite. De quel droit ?
    Sur certains plateaux la charge est portée sur l’Homme, cet affreux jojo qui serait le seul de la race humaine à porter la main sur la femme. Si cet Homme ose le geste, la Femme est-elle pour autant l’ange attendu en toutes circonstances ? Le défaut de respect est mis en valeur au détriment de l’attrait de l’argent. Comme c’est étrange dans un monde où cet argent est roi ! La Femme ne dispose -t-elle pas d’outils pour se défendre ou s’imposer ? Le harcèlement psychologique n’est-il pas de ceux là ? Plus subtil que le geste mais surtout plus sournois. Quel homme portera plainte pour harcèlement psychologique ? Un harcèlement qui le conduira peut-être au geste qui lui sera reproché. L’Homme est peut-être ouvertement irrespectueux dans des élans physiques incontrôlés. Mais la femme l’est tout autant dans des élans psychologiques programmés, calculés ou instinctifs, répétés mais toujours méconnus de la Justice. Certains médias négligent de souligner ces réalités.

    • Il y a des femmes qui forcent le respect et n’ont jamais de problèmes !
      Gérard Depardieu ? On n’a jamais trouvé 1 femme qui lui aurait flanqué une baffe (non la femme n’est pas violence), ou au moins 1 qui l’aurait repoussé parmi toutes celles qu’il aurait agressées ? Et quid de toutes les autres, perverses, celles qui font des enfants dans le dos, les briseuse de ménage … toutes des victimes, femme par définition !
      Quel talent ! Et quid de toutes les vénales, de celles qui font des enfants dans le dos, les briseuses de ménage ? Toutes des victimes ?
      Marre de la chasse à l’Homme.

  3. Ces femmes qui réagissent, qui sortent de leur léthargie bien souvent trop tard. Elles ont peut-être subit quelques mains baladeuses au temps de leurs débuts, mais oublient elles le succès. L’un ne va pas sans l’autre.

  4. Le milieu du cinéma est un milieu comme les autres, avec ses codes et ses silences. Depardieu est comme il est, il ne se départit pas de lui. Hier était hier, aujourd’hui les usages ont évolué et c’est tant mieux. Le droit de cuissage à disparu…ou presque. Vas donc savoir en politique si les divans de ces messieurs ne sont pas avancés. Fanny est en effet franche du collier…mais toutes ces divas de pacotille encartées dans le confort de la bienpensance syndicale !

Laisser un commentaire

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

La diaspora algérienne est devenue un outil d’ingérence
Gabrielle Cluzel sur CNews
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois