La fin de l’université pour tous ?

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Dans son entretien au Point, Emmanuel Macron veut "arrêter de faire croire que l’université est la solution pour tout le monde" et veut en finir avec le tirage au sort pour y entrer.

Dans les faits, l’université n’a jamais été pour tout le monde. Pour y entrer, il faut justifier de la possession du baccalauréat ou de l’un de ses équivalents (diplôme d’accès aux études universitaires ou capacité en droit, par exemple). Le problème vient de l’abaissement du niveau du baccalauréat et de ce qu’on a appelé « baccalauréat » un diplôme professionnel dont le contenu et les objectifs ne sont pas compatibles avec la poursuite d’études universitaires. Mais le baccalauréat a conservé son statut de premier diplôme universitaire. Il y a donc un hiatus entre le statut théorique de ce diplôme et sa réalité : il ouvre la porte de l’université à des jeunes qui n’ont pas le niveau ou les capacités pour y réussir. En ce sens, le président de la République a raison.

Nul doute que la gauche, en particulier les syndicats étudiants qui vivent de la massification de l’université, hurlera à l’injustice, à la sélection inique, à l’élitisme honteux. Mais l’injustice n’est-elle pas déjà présente ?

Aujourd’hui, 40 % des filières du supérieur sont déjà sélectives : prépas, DUT, BTS, écoles de commerce, d’ingénieurs et même de plus en plus de filières universitaires. Aujourd’hui, 60 % des étudiants de première année ne passent pas en deuxième année. Aujourd’hui, pour éviter l’engorgement des filières les plus demandées, c’est le tirage au sort qui discrimine les étudiants. Le hasard serait-il plus juste que le mérite ? Est-il juste de tromper des jeunes sur leur capacité à poursuivre des études abstraites ?

La solution au problème est dans la modalité d’accès à l’université. Soit le baccalauréat reste le premier diplôme universitaire et, alors, il faudra relever les exigences pour son obtention et abandonner l’objectif de 80 % d’une classe d’âge le détenant. Soit il devient un diplôme de fin d’études secondaires n’ouvrant pas automatiquement accès au supérieur. Les bacheliers devant passer des examens d’entrée selon les filières. C’est ce qui se pratique dans de nombreux pays. M. Macron et son ministre de l’Éducation nationale auront à trancher.

Serait-ce pratiquer une ségrégation entre les jeunes Français ? Ce serait le cas si la réussite d’une vie passait nécessairement par la poursuite d’études supérieures de type universitaire. Or, si toute personne peut à bon droit viser l’excellence, il n’y a pas qu’une seule forme d’excellence et on peut réussir de bien des manières.

Alors que la France manque de plombiers, de couvreurs, de vendeurs, combien de titulaires d’une licence de psychologie ou de sociologie se retrouvent caissières en supermarché ? La revalorisation de la voie professionnelle et des métiers manuels est l’autre versant de la solution. Pour cela, il faudrait que l’école cesse de considérer cette voie comme une filière d’échec et que les patrons cessent de considérer les apprentis comme une main-d’œuvre bon marché.

Pierre Van Ommeslaeghe
Pierre Van Ommeslaeghe
Professeur de philosophie

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