Fin de vie : Macron veut éviter d’évoquer avec le pape les sujets qui fâchent

macron pape françois

Emmanuel Macron s'entend bien avec le pape François. Il ne lui fait pas encore de papouilles, comme à Donald Trump, mais il le tutoie et lui donne des tapes dans le dos. On vient d'apprendre, selon une information du Figaro, que la présentation du projet de loi sur la « fin de vie », prévue pour le 21 septembre – veille de l'arrivée du souverain pontife à Marseille –, serait reportée de quelques jours. S'agit-il de courtoisie ou, plutôt, d'hypocrisie ?

Devant les membres de la Convention citoyenne, le chef de l'État avait plaidé pour un « modèle français de la fin de vie ». Le 1er août, sur France Info, Agnès Firmin-Le Bodo, ministre chargé de l'Organisation territoriale et des Professions de santé, avait affirmé que, si « rien n’est encore acté », le projet de loi serait présenté à la fin de l'été, que « toutes les pistes [étaient] ouvertes » et que le texte comprendrait trois volets : les soins palliatifs, le droit des personnes et – c'est là que le bât blesse – « l'aide active à mourir ».

Chacun sait que le pape, reprenant sur ce point la doctrine de l'Église, a toujours manifesté sa désapprobation à tout texte qui ouvrirait la voie à « l’euthanasie » ou au « suicide assisté ». Pas question de froisser le pape à l'occasion de sa visite : comme on évite d'évoquer des sujets qui fâchent avec des amis, Macron a donc décidé de décaler d'une semaine l'annonce du projet de loi, qui serait dévoilé entre le 26 et le 28 septembre.

On peut penser ce que l'on veut du « droit de mourir dans la dignité », comme le disent les défenseurs d'une loi permettant à chacun de choisir les conditions de sa propre fin de vie. Après tout, le philosophe Sénèque, qui écrivait qu'« on doit compte de sa vie même aux autres ; de sa mort à soi seul », se donna bien la mort. On oublie que c'était sur ordre de Néron et qu'il souffrit beaucoup, si l'on en croit Tacite. Personne ne peut souhaiter mourir dans la douleur, mais on pourrait contribuer à une mort plus paisible en développant partout les soins palliatifs.

De nombreux écrivains se sont suicidés : Gérard de Nerval, Henry de Montherlant et bien d'autres encore. De nombreux anonymes aussi, qui ne supportaient plus leur vie ou leur déchéance. Mais quelles que soient les raisons qui les ont poussés à se donner la mort, même si elle aurait pu être, dans certains cas, évitée, cette mort était volontaire. La loi qui se prépare impliquerait qu'un tiers puisse aider activement quelqu'un à mourir ou lui procure par ordonnance les moyens de se donner la mort. Que le mot soit ou non employé, il s'agit bien d'euthanasie.

On comprend, dans ces conditions, que l'Ordre des médecins ait déclaré son opposition à l'euthanasie, ajoutant que si la loi devait ouvrir la possibilité d'une aide active à mourir, les médecins devraient bénéficier d'une « clause de conscience ». Les partisans d'une telle loi ont beau répéter qu'une loi qui encadre ces pratiques en France est toujours préférable à des séjours onéreux à l'étranger, l'expérience montre que le cadre initial a toujours tendance à s'élargir et que la liberté devient vite licence.

Jean-Paul II soulignait, en 1995, que « ce qui peut sembler logique et humain, vu en profondeur, est absurde et inhumain. Nous sommes ici confrontés à l'un des symptômes les plus alarmants de la culture de la mort. » Le pape François défend la même position. Macron préférera évoquer avec lui la migration, les inégalités, le dialogue interreligieux, des thèmes sur lesquels il ne risque pas trop de désaccord. En la circonstance, il manifeste apparemment plus d'hypocrisie que de courtoisie et, à coup sûr, une certaine lâcheté.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

29 commentaires

  1. Aucun interêt concernant les états d’âme de l’un ou de l’autre de ces deux politiciens avérés…Passons à autre chose !! (de tout coeur avec vous Monsieur Kerlouan)

  2. Je suis né catholique, et suis resté peu pratiquant bien que « croyant ». L’euthanasie n’a pas été donc au programme de mon enseignement religieux (catéchisme) mais je ne rejète pas l’idée du fait que je n’ai pas été pour l’instant confronté au problème. Si toutefois, et à l’âge que j’ai la chance d’atteindre, j’entrais dans de grandes souffrances, comment réagirais-je ?… et si j’ai conservé toute ma lucidité… Vaste sujet qui ne trouvera pas sa réponse auprès de Macron et de son chef spirituel (si l’on lui trouve un tant soit peu de spiritualité…) François, qui sont autant l’un comme l’autre certes très instruits, mais si peu intelligents…

    • Ne pas oublier que l’obsession des Francs-Maçons est de réduire la population mondiale : d’après eux, 600 millions d’esclaves devraient suffire à entretenir une poignée de privilégiés, eux-mêmes évidemment.

  3. Le médecin que je suis a toujours eu un malaise avec l’étymologie du mot euthanasie, qui concilie le préfixe « eu » (bien) et « thanatos » (personnification de la mort). L’esprit humain, père de toutes les religions (jusqu’à, notamment, l’Esprit saint de la Trinité, ainsi le génie du christianisme qui a aussi fait chair de Dieu) peut-il se résoudre à agréablement mourir ? Vous me direz…face à la défaite quotidienne de l’intelligence observable dans de nombreuses chroniques…

    • Euthanasie veut dire certes, bien mourir ou une bonne mort.
      Ce que l’on évite de dire, c’est que pour les grecs, la bonne mort était celle de celui qui mourrait sur un champ de bataille, les armes à la main pour défendre son pays!

  4. M. Macron est un « employé » du pape en tant que Chanoine de Latran et il connaît le caractère impétueux de François son « employeur ». Il a intérêt à ne pas évoquer avec lui ses projets de loi sur la « fin de vie » et le suivant sur la « GPA ». Je répète : M. Macron n’est pas intelligent, il est un renard hypocrite et rusé.

  5. De ce pape rien ne nous étonne , il ne se soucie pas du massacre des chrétiens alors ….Et l’hypocrisie de Macron n’est un secret pour personne .

  6. Sur le fond, François doit bien être d’accord avec Macron, surtout s’il s’agit d’européens blancs hétérosexuels et chrétiens.

  7. Ce n’est certainement pas le pape actuel qui présenterait une réelle opposition ,lui qui s’acharne à réaliser un troisième concile du Vatican sous l’aspect d’un synode sur la synodalité, une protestantisation toujours plus avancée de l’Eglise Catholique.
    La morale et les moeurs sont le cadet des soucis d’un homme qui dépasse les 86 ans, et dont l’unité de l’Eglise n’est pas non plus un souci majeur ,à vrai-dire il a toujours été clair que ce pape est hostile à tout ce qui rappelle la rectitude dogmatique ,et la tradition liturgique !
    L’Eglise n’a plus aucune audience dans notre société ,elle s’est sabordée elle-même depuis les années 60 .

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