Fiscalité : la montagne accouche d’une souris

Révolution ! Tel était le titre du livre du candidat Emmanuel Macron. Les férus d’histoire songeaient à l’Angleterre de 1649. À la France de 1789. À la Russie de 1917. Sans doute quelques parlementaires ont-ils retenu leur souffle lorsque le Premier ministre Édouard Philippe est monté à la tribune pour prononcer son discours de politique générale. La révolution fiscale était en marche. En pleine ascension. Prête pour atteindre les sommets. Et puis ? Et puis rien. La révolution s’est faite stagnation. Le balai est resté au placard. Le ménage ne sera pas fait.

Certes, le calamiteux projet de retenue à la source est reporté. L’usine à gaz ne verra pas le jour au 1er janvier 2018. Souhaitons que ce report provisoire se transforme en enterrement définitif. Sans fleurs ni couronnes. Si le gouvernement veut simplifier le recouvrement de l’impôt sur le revenu, qu’il généralise le prélèvement mensuel. Simple et efficace. Pour le reste, la révolution n’aura pas lieu.

L’exonération de la taxe d’habitation pour 80 % des Français ? Difficile, si ce n’est impossible, à mettre en œuvre. Cet impôt alimente le budget des collectivités locales. Le supprimer nécessiterait une compensation qui serait financée par le budget de… l’État. D’où un mécanisme de vases communicants. Baisse d’un impôt local. Augmentation d’un impôt d’État. Sans oublier que cette compensation porterait atteinte au chimérique, mais néanmoins sacré, principe d’autonomie des collectivités locales. La réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune ? Difficile de passer, dès le début du quinquennat, pour le Président des riches en taxant uniquement l’immobilier et en exonérant tous les titres de sociétés. Que reste-t-il ? Le taux de l’impôt sur les sociétés, qui devrait passer de 33,33 % à 25 %. Rien de vraiment novateur. La loi de finances pour 2017 a déjà prévu de le réduire à 28 % pour toutes les entreprises à compter du 1er janvier 2020. Le gouvernement ira simplement un peu plus loin. Le taux sera réduit à 25 % en 2022. « Le changement dans la continuité », aurait dit Georges Pompidou.

En revanche, pour la CSG, nous aurons la continuité pure et simple. Celle qui existe depuis sa création par Michel Rocard en 1990. L’augmentation ! Douce mais constante. C’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe. Encore 1,7 % de plus. Les prélèvements sociaux atteindront donc 9,7 % pour les revenus d’activité et 17,2 % pour ceux du capital. Contre 1,1 % lors de son invention. Même constat pour la fiscalité des carburants. Celle du diesel sera alignée sur celle de l’essence. Au nom de l’écologie et de la voiture propre. Pourquoi pas ? Mais alors, pourquoi ne pas faire le contraire ? Aligner la fiscalité de l’essence sur celle du diesel ? Une baisse plutôt qu’une hausse. « Continuité », quand tu nous tiens ! Ne désespérons tout de même pas.

Il y aura au moins un heureux. Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, qui a promis d’adresser un exemplaire des Fables de La Fontaine à 150.000 élèves de CM2. Le poète du XVIIe siècle est plus que jamais d’actualité : la révolution fiscale annoncée est devenue la montagne qui accouche d’une souris.

Me Thierry Bouclier
Me Thierry Bouclier
Avocat - Avocat au barreau de Bordeaux, spécialiste en droit fiscal https://www.avocat-bouclier-fiscaliste-bordeaux.fr/

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