FNSEA et Jeunes Agriculteurs alertent sur la perte de souveraineté alimentaire

AGRICULTURE

En 20 ans, la France est passée du second rang (les États-Unis occupant la première position) au sixième rang des exportateurs mondiaux de produits agricoles, s’étant successivement fait dépasser par les Pays-Bas, l’Allemagne, le Brésil et la Chine.

Certes, la France demeure le principal pays producteur de richesse agricole du Vieux Continent et l’image d’Épinal qui dépeint la France comme le « grenier » de l’Europe perdure ; mais « la ferme France » perd chaque année des parts de son camembert en matière de souveraineté alimentaire. Les chiffres de l’agriculture française pour l’année 2023 sont parus, le 3 juillet dernier, et sont loin d’être encourageants. En moyenne, le résultat brut de l’activité agricole française a chuté de 13,4 % par exploitant.

L'agriculture française en difficulté

Un chiffre qui révèle la difficulté financière voire la souffrance existentielle (pour les plus vulnérables) dans lesquelles sont embourbés nos agriculteurs. Est-il nécessaire de rappeler qu’on dénombre « un suicide d’agriculteur tous les deux jours », en France ? Jusqu’à présent, le monde rural se mourait à petit feu, dans le silence douloureux des hommes dignes, qui élèvent chaque jour un bonheur perdu. La fronde des agriculteurs français, survenue en ce début d’année, a été un sursaut d’élan vital. Une piqûre de rappel adressée à « la technocratie [française et européenne] qui fait la loi », comme l’évoquait de Gaulle. Baisse du pouvoir d’achat, matraquage fiscal, lourdeur administrative, concurrence déloyale : nombreux sont les maux qui pèsent sur les filières agricoles françaises. La France est plus particulièrement touchée par la diminution du volume de viande et de lait produits, la chute des cours des céréales ou encore la hausse des prix des intrants (engrais, énergie…). La production animale, pour sa part, ne cesse de s’amoindrir : en 2023, elle a chuté de 1,8 %, et ce, pour la cinquième année consécutive (-2 %/an en moyenne). Éleveurs bovins de viande et éleveurs bovins de lait sont les plus touchés. Contacté par BV, le directeur d’une usine de production de canard installée dans l’Ouest mâconnais nous fait part de son constat. « S’alimenter est devenu la variable d’ajustement de bon nombre de Français », nous confie-t-il. L’inflation, couplée à des prélèvements contraints (TVA, prélèvement à la source, etc.), fait que « la plupart des Français regardent le prix avant de regarder la provenance et la qualité des produits alimentaires » qu’ils posent dans leur chariot, nous dit-il.

Perte de compétitivité française face à la distorsion de concurrence

Vient, ensuite, « la perte de compétitivité française » face à la concurrence déloyale que représentent des produits importés de l’étranger, bien moins chers, et qui n’ont pas le même coût social, sanitaire et environnemental que ceux produits en France. « En Hongrie, le SMIC est de 600 euros par mois, les sites de production ne sont pas comparables : ce sont des usines qui fonctionnent comme des centrales géantes, qui s’étalent sur un périmètre équivalant à celui d’une ville ; tandis qu’en France, il me faut 30 éleveurs et autant de bâtiments épars pour arriver au même résultat de production. » Dans la filière de la volaille, la concurrence déloyale intracommunautaire et internationale porte préjudice à la production française. Aujourd’hui, en France, un poulet sur deux est importé. Les importations de volaille, en provenance de Pologne, d’Ukraine, du Brésil ou de Thaïlande, n’ont cessé d’augmenter et inondent le marché de poulets de batterie. Quant à loi EGalim, elle n’est qu’un « discours de façade », selon notre directeur, puisque la grande distribution et les grands industriels sont passés maîtres dans l’art de l’évasion législative en contournant la loi française via des centrales d’achat belges, hollandaises ou allemandes, notamment. Mais par-dessus tout, c’est « une question de volonté politique », avance-t-il. « Le premier importateur en France, c’est l’État. Les pouvoirs publics ont un rôle à jouer, il faut qu’ils soutiennent la filière en imposant, par exemple, aux collectivités territoriales de proposer des repas qui soient majoritairement composés de produits français et locaux. » C’est l’objectif que s’est fixé le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, avec la démarche « La Région dans mon assiette », qui propose que 80 % des produits présents dans les cantines scolaires soient issus de produits régionaux.

L'offre de la qualité, voie de la rédemption de l'agriculture française ?

« Face à des marchés mondiaux erratiques », comme le dénoncent la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs, et face à la pression étouffante des produits agricoles étrangers, la France n’a-t-elle d’autre choix que celui de l’offre de la qualité ? « D’un point de vue géostratégique, la solution ne serait-elle pas de sortir l’agriculture des traités de libre-échange et de créer une véritable "exception agriculturelle" pour lutter contre la concurrence internationale déloyale ? », interrogeait le député RN Jordan Guitton, dans le compte rendu du 26 mars dernier de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, visant à établir les raisons de la perte de souveraineté alimentaire de la France.

Anna Morel
Anna Morel
Journaliste stagiaire. Master en relations internationales.

Vos commentaires

17 commentaires

  1. Macron attal et Cie vous l’on bien mis et vous vous êtes écrasés comme d’habitude
    Alors c’est bon vous aussi !!!!!!!

  2. « Le premier importateur en France, c’est l’État. » C’est la définition même du fascisme selon Mussolini en 1920 : « Tout avec l’Etat. Rien sans l’Etat. Rien contre l’Etat ». Conclusion?

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois