Foot et antisémitisme : Viktor Orbán donne une leçon à Ursula von der Leyen

@European People's Party/Wikimedia Commons
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L’information a été cantonnée aux colonnes « sport » des journaux, et pourtant, les leçons que l’on peut en tirer dépassent largement le cadre du football. Pour des raisons de sécurité, c’est dans la Hongrie de Viktor Orbán que s’est tenu, jeudi 10 octobre, le match aller Israël-France (gagné par la France 4-1), de la Ligue des nations.

Matchs sans incident 

Depuis le 7 octobre, Israël a joué sept de ses neuf matchs internationaux en Hongrie. Viktor Orbán s’est, depuis le 7 octobre, montré un soutien indéfectible d’Israël et, fervent amateur de football, il a proposé d’accueillir les footballeurs israéliens. Que n’a-t-on entendu, pourtant, par le passé, au sujet de l’antisémitisme supposé du Premier ministre hongrois, notamment en raison de sa farouche opposition au milliardaire Soros. Viktor Orbán et Benyamin Netanyahou, respectivement Premiers ministres hongrois et israélien, entretiendraient d’excellentes relations, et pour l’ambassadeur d’Israël à Budapest, Yacos Hadas-Handelsman, « la Hongrie [est] une bonne alternative » tant qu’Israël ne peut pas jouer à domicile. Certes, une bulle de sécurité a été mise en place autour de l’équipe israélienne avec un dispositif fourni par Tel Aviv, les entrées ont été extrêmement contrôlées et filtrées, mais le résultat est là : les matchs ont pu avoir lieu sans incident.

De la même façon, le 6 septembre dernier, la rencontre entre la Belgique et Israël, normalement prévue au stade Roi-Baudouin à Bruxelles - c’est la Belgique qui devait recevoir Israël -, avait été délocalisée à Budapest par crainte des « débordements », comme l'on dit pudiquement. « Tous les jours, on a des manifestations et des contre-manifestations liées au conflit en cours. Accueillir Israël, c'est faire entrer la tension géopolitique maximale dans nos quartiers », s’était justifié Benoît Hellings, échevin des Sports : « Recevoir Israël en Belgique, même à huis clos, ça aurait été prendre un risque démesuré de voir un loup solitaire déclencher un nouvel acte terroriste. » C'était, bien sûr, une allusion à l’attaque terroriste en marge du match Belgique-Suède, le 16 octobre 2023, au cours de laquelle deux supporters scandinaves avaient été tués. La Hongrie ne craint pas trop, quant à elle, les fameux « débordements », car les manifestations pro-palestiniennes sont interdites. Et ils sont bien peu, tant dans la communauté musulmane locale très réduite que dans les rangs de la gauche magyare, à y contrevenir. Pour ce qui est du match retour, prévu en France le 14 novembre, le suspense reste entier. Selon la presse spécialisée, la FFF aurait imaginé faire jouer le match dans une petite ville ou encore à huis clos. En attendant, la billetterie n’est toujours pas ouverte.

Une UE exempte d'antisémitisme ?

Sur le site de la Commission européenne, un post publié le le 5 octobre 2021, soit quasiment deux ans jours pour jour avant le 7 octobre, a pris un sacré coup de vieux : y était présentée « la toute première stratégie européenne de lutte contre l'antisémitisme et de soutien à la vie juive » de la Commission européenne, destinée à être « mise en œuvre au cours de la période 2021-2030 ». Suivait un long catalogue de vœux pieux et de déclarations d’intentions censés, en théorie, nous conduire « vers une Union européenne exempte d’antisémitisme » (sic).

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’engageait par là « à soutenir la vie juive en Europe dans toute sa diversité » car, déclarait-elle, « l'Europe ne peut prospérer que lorsque ses communautés juives se sentent en sécurité et prospèrent ». C’est une franche réussite. Dans la ville même où siègent la plupart des institutions européennes, il est impossible d’organiser un match de foot avec une équipe israélienne. Et l’infréquentable Viktor Orbán, qu’Ursula von der Leyen a encore violemment fustigé il y a quelques jours, donne en matière de sécurité et de quiétude, pour les populations de confession juive, des leçons au « technotable » Emmanuel Macron. Le 11 juillet dernier, un rapport de l’Agence des droits fondamentaux montrait que 96 % des Juifs en Europe avaient été confrontés à l’antisémitisme au cours des douze derniers mois et qu’en France, 74 % des Juifs estimaient que le conflit en Israël avait eu un impact sur leur sentiment d’insécurité : un des taux les plus élevés parmi les pays sondés (62 %, en moyenne, pour les autres). Pour la Hongrie, le chiffre était… de 9 %.

Et si la bête du Gévaudan, le croquemitaine, le père Fouettard, le monstre du Loch Ness et le yéti réunis en la personne de Viktor Orbán venaient de faire la démonstration d'une intuition partagée secrètement par plus d'un Européen : la meilleure « stratégie » pour lutter contre l'antisémitisme en Europe ne serait-elle pas - ô surprise ! - de lutter contrer l’immigration ?

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

55 commentaires

  1. Grâce au foot, on reparle positivement de Victor Orbán
    Victor Orbán… celui qui persiste, avec courage, à tenir tête à wonder-la-hyène !
    Petit à petit son “cercle d’amis” s’élargit et le bon sens qu’il développe commence à avoir, à juste titre, de plus en plus de voix pour le soutenir…
    Ce n’est que justice pour ce grand défenseur de sa nation et des valeurs qu’une vraie Europe devrait soutenir.

  2. Cette information sportive pourrait paraitre anecdotique mais au contraire est complètement symptomatique d’une situation amènant à la conclusion logique que vous démontrez avec beaucoup d’à propos , madame Cluzel, et que nous sommes extrêmement nombreux à partager .
    C’est souvent dans des faits paraissant anodins que l’on constate toutes les contradictions d’une société qui d’un côté fustige la politique du moins disant migratoire de Orban tout en recourant aux services du même Orban pour assurer la protection de nos manifestations sportives qui de réjouissantes sont devenues risquées .

  3. Merci encore une fois Madame Cluzel pour cette chronique toute à la hauteur du talent auquel vous nous avez habitués. Il est juste profondément regrettable de laisser à la tête de l’Europe cette femme incompétente qui ne s’embarrasse pas , au demeurant, des questions liées aux conflits d’intérêts.

  4. l’ONU est ouvertement anti-Israel et pro-palestinienne depuis des decenies (sinon antisemite)
    La France , l ‘Espagne , le Royaume Uni et l Italie ne valent pas mieux ..alors qu ‘Israel non seulement se defends mais combat sur tous les fronts tous les terroristes de la planéte.
    Comme le dit Netanyahu  » shame on them!! « 

    • La réponse est dans le nombre qui fait la qualité . Combien de pays musulmans siègent à l’ONU et combien de pays de confession juive ? Israël peut compter sur sa diaspora dans de nombreux pays occidentaux, mais les juifs sont conccurencés par une autre population migrante qui s’est invitée dans ces mêmes pays et qui ne fait que croitre à une vitesse incroyable, si bien que cela est en cours de changer la diplomatie des pays concernés vis à vis du moyen orient . Ils ont eu la « faiblesse « d’accueillir en très grand nombre des gens qui potentiellement sont hostiles aux juifs et pour certains appellent même à la destruction du seul état juif de la planète .

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