Fusillade à Rennes : les mères veulent la responsabilité des pères

Si les mères exigent que l'État fasse intervenir la responsabilité paternelle, Bruno Retailleau préfère plus de fermeté.
banlieue

« Où sont les pères ? » C’est la question posée par Juliette Méadel, ministre délégué à la Ville, ce mardi 22 avril, sur la dalle Kennedy, à Rennes. Présent sur les lieux d’une fusillade survenue cinq jours plus tôt dans une sandwicherie - qui a fait quatre blessés -, Juliette Méadel a pointé du doigt ce qu’elle estime être un facteur aggravant de l’ultra-violence dans le quartier de Villejean : l’absence de figures paternelles et le poids laissé aux mères qui, selon elle, « assument toutes les responsabilités ».

La désertion paternelle pointée du doigt...

« Des mesures financières et humaines pour les soutenir », voilà ce à quoi s’est engagé le ministre délégué afin d’endiguer la délinquance chez les très jeunes. Une promesse saluée par plusieurs collectifs de femmes œuvrant à Villejean. Parmi eux, le collectif Kunet, dont la cofondatrice Régine Komokoli, également élue départementale d’Ille-et-Vilaine, a interpellé l’État, mercredi matin, au micro d’Apolline de Malherbe. Elle réclame « une vraie politique publique qui travaille sur la place et le rôle des pères », déplorant qu’il n’existe « aucune obligation légale pour les pères de s’occuper de leurs enfants ».

S’il entre en totale contradiction avec le discours de gauche prônant la déconstruction de la figure paternelle, l’argumentaire n’est pas nouveau : les pères absents sont régulièrement pointés du doigt dans les quartiers. Lors des émeutes qui ont suivi la mort de Nahel, adolescent tué à Nanterre lors d’un refus d’obtempérer, Ouest-France rapportait que 60 % des émeutiers seraient issus de familles monoparentales. Nahel lui-même avait été élevé par sa mère. Dans l’Essonne, le collectif des Gilets roses, formé de seize mères de famille arpentant les cités pour tenter de calmer les tensions, avait déjà appelé les pères à reprendre leur rôle, tout en exigeant que l’État les responsabilise dans l’éducation de leur progéniture en cas de séparation. Un appel que le collectif a réitéré ce mercredi, au micro de RMC.

...mais seule responsable ?

Mais si l’absence d’un père peut peser sur la construction d’un jeune, saurait-elle, à elle seule, expliquer toutes les violences qui règnent dans les cités ? Tous ceux qui grandissent sans figure paternelle ne sombrent pas dans la délinquance et, inversement, les jeunes impliqués dans les trafics ou les fusillades ne viennent pas systématiquement de foyers monoparentaux. Le cas de Villejean, comme tant d’autres, semble surtout illustrer un rejet bien plus profond : celui de l’autorité, qu’elle soit familiale, policière ou étatique. Dans ces quartiers où le trafic de drogue alimente à la fois l’économie parallèle et les tensions, la haine du « système » et l’appât de « l’argent facile » dépassent largement le cadre de la cellule familiale. La violence y est souvent le fruit d’un sentiment d’impunité et d’un enracinement dans une culture de confrontation avec l’État, indirectement ou directement cautionné par certains discours politiques.

Dès lors, l’idée que l’on pourrait tout prévenir par une réforme de la parentalité ou une meilleure « présence paternelle » interroge. Plutôt qu’une nouvelle politique d’accompagnement social, certains plaident donc pour une réponse judiciaire plus ferme. C’est le cas de Bruno Retailleau. Interrogé sur les événements récents, le ministre de l’Intérieur s’est dit favorable à l’instauration de courtes peines de prison ferme pour les mineurs délinquants qui se retrouvent enfermés « dans des parcours de violence parce qu’on ne veut pas les sanctionner ». Affirmant « ne pas pouvoir combler la déficience des pères », le ministre assure que son rôle pour « restaurer l’autorité » est d’instaurer « une révolution pénale » en prenant comme exemple les Pays-Bas, qui font « tomber les courtes peines de prison dès les premiers délits graves [...] dans les prisons où il n’y a pas de narcotrafiquants ». Reste à savoir qui, des pères ou des fils, devront assumer les responsabilités.

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