Les Gardiennes : un hommage aux femmes de la Première Guerre mondiale

Acclamé pour son film Des hommes et des dieux, avec lequel il revenait sur l’assassinat des moines de Tibhirine perpétré en 1996, Xavier Beauvois nous revient en ce moment au cinéma avec Les Gardiennes, adaptation du roman éponyme d’Ernest Pérochon publié en 1924.

Le récit suit un trio de femmes durant la Première Guerre mondiale, chargées d’entretenir la ferme familiale en l’absence des hommes partis combattre les Allemands dans la Meuse.

Tourné en Limousin, région que Nathalie Baye et sa fille Laura Smet – les têtes d’affiche – connaissent bien pour y avoir un pied-à-terre, le film de Xavier Beauvois est l’occasion de donner corps à un élément d’histoire bien connu enseigné depuis un siècle dans tous les collèges et lycées de France. À savoir la gestion du pays par les femmes tandis que les hommes combattaient au front. Beauvois livre donc, au minimum, un film instructif sur le plan historique. Un sujet fort, qui plus est enrichi d’une mise en scène épurée mais significative, et d’un casting solide.

Le film est appréciable en cela qu’il met les femmes en valeur sans pour autant s’encombrer d’un féminisme crétin, hystérique et revanchard à la Tonie Marshall. Ici, les « gardiennes », loin de se la couler douce dans les campagnes où, en vérité, elles ont toujours travaillé de concert avec les hommes – n’en déplaise à la bourgeoisie féministe de gauche –, ont à subir les contrecoups de la guerre : elles doivent assurer seules l’entretien de la ferme – travail physique pour le moins éreintant –, avec la crainte au quotidien d’apprendre le décès d’un fils tombé sous les balles ennemies. Cela sans compter le comportement parfois trop entreprenant des alliés américains à l’égard des Françaises…

Entretenir le patrimoine familial et sauver l’honneur des siens sera donc primordial aux yeux d’Hortense, la maîtresse des lieux qu’incarne à l’écran Nathalie Baye. Et la jeune employée Francine – le choix de son prénom n’est pas anodin – l’apprendra à ses dépens.

Malgré tout, l'espoir d'un renouveau pointera à l’horizon. En atteste, en fin de récit, le début des années folles, redistribuant les cartes et permettant à chacune, non sans amertume, de se reconstruire autant que faire se peut.

Les Gardiennes, en somme, est un beau film, plein de sobriété, d’élégance et d’honnêteté. Malheureusement, Nathalie Baye et Laura Smet n’auront sans doute pas le cœur à en apprécier le succès, sa sortie en salles étant quelque peu ternie par le décès de Jean-Philippe Smet, ancien compagnon de la première et père de la seconde.

À voir pour la leçon d’Histoire, mais aussi pour le travail de mise en scène de Xavier Beauvois.

4 étoiles sur 5

Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

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