Général Bruno Clermont : « Seule la destruction peut apaiser la rage de Poutine »
4 minutes de lecture
Marc Baudriller. La Russie est un empire, Poutine règne sur un territoire immense : l'avons-nous vraiment perçu comme tel ?
Général Bruno Clermont. La Russie a toujours été une grande puissance, Poutine s’inscrit dans cette tradition. Il va tout instrumentaliser, l’histoire russe, le stalinisme, la religion orthodoxe, à ses fins politiques. De notre côté, l’erreur principale, c’est qu’on ne connaissait pas la Russie. Ni la Russie politique, ni les intentions de Poutine, ni la réalité du régime, ni l’appareil militaire. C’est la première erreur. Nous ne sommes pas les seuls à avoir fait cette erreur. Cette guerre est une succession d’erreurs d’analyse. L’étude de ces erreurs fera le bonheur des écoles de guerre.
M. B. Les Américains ont-ils raison de se tenir loin du conflit ?
Gal B. C. Il y a trois raisons pour lesquelles les Américains ne veulent pas faire cette guerre. D’abord, une guerre entre Etats nucléaires n’a rien de simple. Ici, les deux principales puissances nucléaires du monde, États-Unis et Russie, sont face à face par Ukraine interposée. Elles se neutralisent. La deuxième raison, c’est que la priorité des États-Unis a toujours été la Chine et non la Russie. L’affrontement avec la Russie n’est qu’un accident de l’histoire. Même s’ils avaient identifié la menace russe, leur pire rival reste la Chine et la priorité c'est la zone indo Pacifique, pas l’Europe, depuis le fameux pivot d’Obama vers l’Asie en 2008. Aujourd’hui, la Chine reste la priorité de Biden, le « VP » d’Obama. Enfin, troisième élément : comme nous, les Américains ont un outil militaire affaibli. Dans tous les domaines, l’outil militaire américain est vieillissant, l’aviation, l’armée de terre, la marine et la dissuasion. Les États-Unis ne sont plus en mesure d’agir sur deux théâtres d’opération en même temps. Ils ont vécu eux aussi les « dividendes de la paix » et la priorité donnée aux guerres « asymétriques ». Or la doctrine militaire américaine est celle de la force écrasante (« overwhelming force »). Il s’agit pas de battre l’adversaire, il s’agit de l’écraser grâce a la supériorité technologique. Pour cela, il leur faut reconstruire leur outil militaire. C’est ce à quoi il s’attachent à présent.
M. B. Justement, aux Etats-Unis, Donald Trump a relancé les investissements militaires.
Gal B. C. Oui, Trump a voulu réinjecter de l’argent dans l’outil militaire pour continuer à dominer la Chine à l’horizon 2020-2030. On ne sait pas quand aura lieu la collision entre la Chine et les États-Unis, mais il y a une collision qui est en train de se profiler autour de la question de Taiwan. Donc les États-Unis ne veulent pas épuiser leur outil militaire dans une guerre contre la Russie. Et puis, aussi bien Trump qu’Obama ont été élus sur le thème : plus de guerre ! Les Américains ne veulent plus être les gendarmes du monde après avoir joué ce rôle pendant trente ans. Ils vont donc entrer à reculons dans la rhétorique de cette guerre. Mais ils vont y entrer car les Chinois vont les tester sur la question des garanties de sécurité de l’article 5 de l’Otan avec, bien sûr, le parallèle des garanties de sécurité des États-Unis pour Taiwan.
M. B. Selon vous, le renseignement a failli côté occidental et côté russe.
Gal B. C. Oui, du côté occidental, on ne connaissait plus la Russie, on ne connaissait plus ses forces, on ne connaissait pas non plus vraiment le régime et l’appareil militaire. La priorité était le renseignement militaire dans le cadre de la lutte contre le terrorisme islamique et les guerres du Levant, d’Afghanistan et en BSS pour la France. Et Poutine va faire la même erreur puisqu’il va se tromper sur deux sujets : sur ce qu’est réellement l’Ukraine et sur ses propres capacités militaires. Formée depuis 10 ans par les Américains, l’armée ukrainienne est devenue redoutable face à une arme russe puissante et brutale mais désorganisée d’une manière qui a surpris tout le monde. Alors que la Russie est le proche voisin de l’Ukraine, Poutine n’a pas compris qu’il existait une nation ukrainienne qui allait refuser de « devenir russe ». C’est la raison de sa colère actuelle et de sa volonté de punir le peuple ukrainien qui a choisi le modèle occidental qu’il honnit. C’est la raison de ce déchaînement de violence. Quand il bombarde et martyrise Marioupol, il bombarde et il martyrise également Washington, Paris et Berlin. Seule la destruction peut apaiser la rage de Poutine.
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48 commentaires
« Seule la destruction peut apaiser la rage de Poutine. »
Il est vrai que les coalitions internationales qui sont intervenues en Irak, en Yougoslavie, en Syrie et ailleurs encore, ont eu la délicatesse, depuis leurs avions, leurs batteries d’artillerie et avec leurs missiles, d’éviter toute destruction autre que militaire. N’est-ce-pas?
Pas comme Poutine qui, lui, aurait la stupidité de le faire faire par des hommes au sol avec les pertes que cela induit.
On se demande pourquoi.
Ouf ! En avez-vous enfin fini des vaticinations de cet auteur qui prend ses désirs pour des réalités?
« Seule la destruction peut apaiser la rage de Poutine » : à moins qu’il ne soit « détruit » avant.
L’échec des accords de Minsk est dû aux 2 parties :ni la Russie ni l’Ukraine n’ont retiré leurs milices et forces spéciales du Donbass. C’est une guerre civile mais les poutinophiles continuent à soutenir que l’Ukraine y a tué 14000 personnes de 2014 à 2020. Or l’ONU dit (c’est pas contesté en Russie) morts : 3350 civils (des 2 camps), 4100 combattants ukrainiens, 5650 combattants russes & pro-russes (Report Ukraine 12/03/2020) 3/ Macron a été inefficace comme signataire-garant des accords
Je suis repéré par l »ambassade de Russie !! Qui ne dénie pas la vérité mais vote contre!! Vous avez abîmé l’image de la Russie pour des décennies.
Tous ceux qui offre une puissance supérieure aux US sont leur ennemis et la France y plonge la tête la première alors qu’elle devient misérable face aux pays qui travaillent.
L’analyse ne va pas assez loin, et mon général vous semblez timide à critiquer les américains dans ce conflit ! Mais c’est normal pour un « OTANIEN »
Le but des américains, mettre le « souk » en Europe pour vendre leurs armements et s’en mettre plein les poches !
D’ailleurs comment se fait’il que ces mêmes américains aient entraînés l’armée Ukrainienne …bizarre !
Oui et ces soldats ukrainiens montrés complaisamment par nos médias tous plus va-t’en-guerre les uns que les autres, en train d’entraîner des civils au maniement des armes. Dans quel but? Faire du tir aux pigeons? Et ces mêmes médias, couinant d’horreur, devant ces combattants sans véritable expérience de la guerre en milieu urbain, étalés au sol, « victimes » de l’abjecte soldatesque russe.Pour un soldat, la règle de l’engagement est simple: tuer ou être tué.
Comme pour McKinsey dont le scandale explose maintenant alors que les media n’en parlaient pas en 2017 (même si beaucoup le savaient déjà), personne ne parle de l’influence de Soros dans cette guerre. Faudra-t-il attendre là-aussi 5 ans pour que ce scandale explose ?
Excellent. Précisions: 1/ la Russie n’a jamais connu de démocratie 2/ Elle a depuis toujours un complexe obsidional car l’occident nucléaire est partout autour d »elle (USA +GB +France). Elle a des frontières avec les USA (Alaska) qui ont des bases partout dans le monde. Elle n’oublie pas qu’elle a déjà eu une guerre avec la Chine qui guette ses espaces. 2/ Le soft-power russe a fonctionné, si bien que certains pensent encore que la guerre civile du Donbass est une agression par l’Ukraine
Si vous aviez suivi les chroniques de Christelle Néant, présente au Donbass depuis des années, vous sauriez que la guerre civile y est une réalité. Le soft power russe existe sans doute, mais il est minuscule par rapport à la version atlantiste qui nous décrit, depuis 1945, un monde qui n’existe oas mais sert les intérêts américains.
Bizarre ! L’article dit qu’il y a une guerre civile et vous répondez « mais non il y a une guerre civile » !!!!
Sans le génocide ukrainien par Staline, cette »Petite Russie »se dirait encore mère de tous les « Russ » de Kiev à Saint-Petersbourg. C’est le même peuple distingué seulement par quelques différences liguistiques héritées de sa longue colonisation par la Pologne, l’Autriche, la Turquie etc , plus quelques courants mongols dans son sud.
… et Staline n’était pas russe, mais géorgien!
Djougashvili ex séminariste puis braqueur avant d’être un criminel inégalé!
Certains se felicitent que cette tension va renforcer l’OTAN, mais dépendre encore plus de Washington nous éloigne d’une solution rapide. Les Américains veulent cette guerre, qui va ruiner les 2 blocs europeens et éliminer 2 concurrents économiques d’un coup.
Agression de la Russie envers l’Ukraine, certes, mais rendue inévitable par la stratégie d’encerclement lente et systématique menée depuis 30 ans par les US, qu’aucun de leurs pions placés à la Commission ne semble avoir remarquée.
Mais si, ils le savent très bien. Comme ils savent qu’ils sont en train d’organiser le suicide des peuples européens.
Non, défense par la Russie de la région du Donbass, martyrisée depuis 8 ans ceci, en opposition avec le traité de Minsk.
Il faudrait peut être, un jour, remettre les pendules à l’heure.
« La Russie a toujours été une grande puissance » Ah bon, même après l’effondrement de l’URSS ? « les Américains ne veulent pas faire cette guerre » ah bon ? Pourquoi alors font-ils tout pour que cette guerre continue ? « Seule la destruction peut apaiser la rage de Poutine » encore une fois ce général sait ce qu’il se passe dans la tête de Poutine. Vraiment, avec des analystes de cette envergure nous n’irons pas loin. Pauvre France !
Je le suis fait exactement les mêmes réflexions. La Russie a bien le droit d’être une grande puissance, notons qu’elle est dans cette affaire sur une posture défensive alors que les Etats-Unis sont hégémoniques dans tous les domaines.
Bravo pour cette analyse. Dire que, SI Zelenski avait eu le bon sens il y a 3mois, de dire qu’il ne demandait pas son affiliation à l’Otan, tout çà aurait pu étre évité. Il est vrai que son mentor, George Soros, qui avait déjà largement financé les évènements « Maïdan » en 2013 et avait « poussé » l’élection de Zelenski (comme pour beaucoup de dirigeants occidentaux) voulait en découdre avec Poutine.
Relancer les investissements militaires grâce à la planche à billets! les usa achètent l’or avec de la monnaie de singe. L’Ue produit des billets sans valeur économique en contrepartie. heureusement que nous sommes dirigés par des pros et des experts!
Poutine est dans le réel et non dans l’élucubration.
Il ne voit même pas que les USA font d’une pierre deux coups tuer économiquement l’Europe et tenter d’affaiblir la Russie.
Quand à être surpris, faites moi rire, cela fait 20 ans que Poutine préviens que si l’OTAN va en Ukraine, c’est la guerre. De plus, par la Syrie, nous connaissons leurs capacités militaires.
En gros, soit cette personne ment, soit elle a dépassé son seuil de compétence
..mais l’Ukraine n’est pas dans l’OTAN, n’est-ce pas ? Tandis que le mémorendum de Budapest signé en 1994 entre l’Ukraine et la Russie prévoyait que la Russie garantissait de ne pas attaque l’Ukraine si celle-ci rendait toutes les armes nucléaires qui se trouvaient sur son sol, à la Russie. Ce qui a été fait. ça vous ne le dites pas.
« Seule la destruction peut apaiser la rage de Poutine. »
anti poutine primaire. Que disait Audiart, « si les ___ volaient … »
On a là plus qu’un chef d’escadrille, un général!
A Marioupol, il y a les extrémistes à éliminer (et peut être quelques occidentaux cachés). Comme ils ne sont plus mélangés avec les civils, évidemment, les Russes et Ukrainiens du Donbass peuvent taper plus fort.
Si les accords de Minsk avaient été respectés et que l’ONU ait mis en place un force d’interposition pour s’en assurer, nous n’en serions pas là. La Russie a toujours clairement fixé la limite à ne pas franchir. Ce sont donc ceux qui ont foulé cette frontière qui sont responsables. L’Europe devrait plutôt aider à trouver un nouvel accord qu’à agiter sans cesse le chiffon rouge.