Gérard Larcher ne croit pas que l’islam soit incompatible avec la République. Et pourtant…

PRIERE DE RUE

S'entretenant avec le philosophe Marcel Gauchet, Gérard Larcher s'est livré à une réflexion sur la laïcité et la place de l'islam en France (Le Figaro). Si tous deux estiment que le problème se situe dans l'acceptation par l'islam des principes républicains et de la démocratie, ils diffèrent sur leur perception de la situation. « Je ne les crois pas incompatibles », déclare le président du Sénat, tandis que le philosophe se montre plus pessimiste et, sans doute, plus réaliste, expliquant que « l'islam n'est pas entré dans la démocratie ».

La rondeur conciliante, d'un côté, la lucidité intellectuelle, de l'autre. Gérard Larcher est sensible aux problèmes posés par l'islam, notamment le salafisme, il est conscient du long chemin qui reste à parcourir, il constate qu'on ne fait pas suffisamment respecter les principes de la laïcité, il redoute que des salafistes ou des Frères musulmans n'infiltrent les listes électorales dans certains quartiers, à l'occasion des municipales. Mais il demeure optimiste sur les possibilités d'accorder l'islam avec la laïcité. Il faut accompagner les musulmans vers un « islam adapté ». Bref, Gérard Larcher croit à un consensus possible.

Selon Marcel Gauchet, on a longtemps pensé que le processus d'intégration se ferait naturellement, comme pour les vagues migratoires précédentes. C'était mésestimer la puissance des courants fondamentalistes. Il dénonce une mode idéologique, venue des États-Unis, du Canada, du Royaume-uni, qui s'est répandue parmi nos élites : le multiculturalisme serait l'idéal du « vivre ensemble ». Grave erreur, car l'islam « n’est pas entré dans la démocratie », il ne reconnaît pas « la liberté de l’homme de s’organiser hors de toute référence à une règle extérieure et supérieure ». Nous avons affaire à deux cultures différentes et, malheureusement, inconciliables.

Marcel Gauchet admet qu'une majorité de Français de confession musulmane consent tacitement à la République et la laïcité. Le proverbe ne dit-il pas « Qui ne dit mot consent » ? Mais, tant que ce consentement ne sera pas explicite, « une importante minorité activiste pourra en contester le principe avec une vraie capacité de troubler les esprits », bénéficiant de l'indulgence ou de la complicité d'une élite qui, généralement éloignée des quartiers où se développent les conduites communautaristes, n'y voit qu'une expression de la liberté. C'est ainsi qu'on laisse s'installer, en France, des quartiers plus respectueux de la charia que des lois républicaines.

Encore un exemple récent des provocations auxquelles se livrent des activistes musulmans. Dimanche après-midi, une dizaine de femmes, vêtues de burkinis, ont envahi une piscine de Grenoble. Pas au nom de convictions religieuses, bien sûr, au nom de la « liberté de toutes les femmes ». Liberté, que de bêtises on proclame en ton nom ! Des militants associatifs ont justifié cet « acte de désobéissance civile », commis pour protester contre les règlements des piscines jugés trop discriminatoires. Si le gouvernement cède, il met le doigt dans l'engrenage et tout le bras y passera. Il a déjà cédé sur bien d'autres points !

Comme dans l'Éducation nationale, le pouvoir est adepte du « pas de vague ». En pratiquant la politique de l'autruche par lâcheté, par clientélisme ou par complaisance, il contribue à la disparition, non seulement du patrimoine culturel de la France, mais de la France elle-même.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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