Gilets jaunes : deux mois après, où en est le mouvement ? Où en est le Président ?

Gilets jaunes

Cela fait maintenant deux mois que le mouvement des gilets jaunes a débuté. Celui-ci, décrit comme historique pour certains, ou assimilé à la "peste brune" des nationaux-socialistes par le ministre Gérald Darmanin, se poursuit encore, aussi bien dans les rues que sur les plateaux télévisés. La question est, maintenant, de savoir quel est l’état de la sphère publique, en prenant en compte le rôle que les médias peuvent jouer, aussi bien en montrant l’ampleur qu’en essayant de le décrédibiliser.

On a vu, et on voit toujours dans les médias, une surmédiatisation des événements de Paris, et des actions des casseurs, et une quasi-absence des actions menées en province, et des actions pacifistes, comme un groupe de gilets jaunes ayant protégé la tombe du Soldat inconnu. Cette photo ayant été très peu médiatisée, certaines personnalités politiques, durant leurs passages télévisés se sont empressées d’en parler. Au micro de Quotidien, Nicolas Dupont-Aignan a dénoncé "les petits casseurs de monsieur Castaner", les accusant d’être à l’origine des dégâts causés, et, en parlant de la photo, a ajouté : "Cette photo-là, vous ne l’avez pas montrée."

Sur les plateaux télévisés, on préfère la politique spectacle en invitant des gilets jaunes et des opposants politiques pour débattre face à des sympathisants ou des députés En marche !, débats souvent houleux où les représentants du Président et de la majorité présidentielle se retrouvent souvent seuls contre tous, avec très peu d’arguments. C’est toujours plus attractif et cela ressemble un petit peu plus à une stratégie de marketing. Cette forme plus vendeuse explique, alors, la surmédiatisation d’événements chocs tels que les émeutes et les affrontements dans Paris plutôt que les blocus pacifiques dans les petites villes de campagne ; ou bien en montrant des personnalités politiques prononçant des phrases chocs, débattre avec des opposants et, ainsi, attirer l’Audimat®.

Face à ces médias traditionnels, on a pu également observer l’émergence de la communication sur les réseaux sociaux de la part des gilets jaunes : organisation des rassemblements, critique envers la police, les médias, les casseurs, le Président. Certains en profitent, également, pour crier au scandale en pointant du doigt la théorie du complot.

D’un côté, ces gilets jaunes - soutenus par 68 % de la population, selon un sondage IFOP du 12 décembre dernier, et encore par 60 % des Français début 2019, selon un sondage Elabe pour BFM TV publié mercredi dernier, mais aussi par beaucoup de politiciens issus de l’opposition, comme Marine Le Pen, Jean Luc Mélenchon, Jean Lassalle ou encore Nicolas Dupont-Aignan - s’opposent au président de la République et à son gouvernement, qui s’entêtent à vouloir faire passer des réformes antisociales. Néanmoins, Emmanuel Macron s’est exprimé publiquement le 10 décembre devant l’ensemble des Français lors d’une allocution télévisée pour annoncer beaucoup de mesures "de façade" et peu de mesures réelles et concrètes, ce qui n’a pas suffi à calmer le mouvement. On se sert, ici, des médias pour tenter de diffuser un message en espérant endiguer le mouvement. Stratégie qui n’a pas porté ses fruits puisque le mouvement se poursuit.

Quoi que le gouvernement compte maintenant faire, les gilets jaunes ne sont pas encore prêts à s’arrêter avant d’avoir eu gain de cause, et ce mouvement, malgré les tentatives de décrédibilisation, est un mouvement citoyen, dans les faits comparable à celui de Mai 68. À une différence près : en effet, lors des émeutes de mai 1968, le président Charles de Gaulle avait eu, lui, la lucidité de remettre son gouvernement en cause en dissolvant l’Assemblée nationale.

Maxence Toureche
Maxence Toureche
Etudiant en sciences politiques à Montréal

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