Gouvernement Barnier : 39 ministres, le syndrome de l’armée mexicaine ?

Capture d'écran YT
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Le nouveau gouvernement est-il une usine à gaz en devenir ? Formé de trente-quatre ministres et cinq secrétaires d'État, il soulève des interrogations quant à son adéquation avec les principes d'efficacité administrative et de bonne gouvernance. L'armée mexicaine n'est pas loin. On trouve un ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation (sic), un ministre de la Transition écologique, de l'Énergie, du Climat et de la Prévention des risques, un ministre des Solidarités, de l'Autonomie et de l'Égalité entre les femmes et les hommes. Les Français bénéficient aussi, auprès du Premier ministre et du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, d’un ministre délégué chargé de l'Europe. Un autre ministre est chargé de… la Coordination gouvernementale ! Des ministres, ministres délégués ou secrétaires d'État veillent sur la Sécurité du quotidien, l'Économie sociale et solidaire, l'Intéressement et la Participation, l'Économie du tourisme ou, bien sûr, l'Égalité entre les femmes et les hommes.

La Constitution de la Ve République, en posant les bases d’un exécutif fort et concentré, n’a jamais imposé de limite stricte au nombre de ministres, laissant au Premier ministre une grande liberté dans la composition de son équipe. Oui, mais voilà, cette liberté s’accompagne d’une responsabilité : celle de garantir un fonctionnement optimal de l’appareil d’État. Dans ce cadre, la multiplication des portefeuilles ministériels pose la question de la cohérence et de l’efficacité de l’action gouvernementale. À l’heure où l'ampleur des défis économiques et sociaux exige des réponses rapides et structurées, un exécutif pléthorique porte la menace de lenteurs bureaucratiques et de conflits de compétences internes.

Un gouvernement tentaculaire

Le gouvernement actuel est celui qui compte le plus de ministres de l’histoire de la Ve République. À titre de comparaison, le premier gouvernement de François Hollande comptait 34 membres au total, tandis que celui d'Édouard Philippe n'en avait que 22. Cette inflation ministérielle soulève ainsi des questions sur l'efficacité de l'exécutif. « C'est un gouvernement à la fois tentaculaire et inefficace. On dilue les responsabilités dans un océan de ministères inutiles », s'indigne un député de l'Union des droites pour la République (UDR), voulant garder l'anonymat afin de « ne pas se brouiller avec ses amis LR ».

« À ce rythme, on va finir par nommer un ministre pour chaque rue de France », ironise un autre député de l’UDR. Le choix de créer des ministères spécifiques pour des domaines comme la ruralité, l'intelligence artificielle ou la francophonie montre une volonté de répondre à des revendications sectorielles, mais au prix d'une cohérence d'ensemble.

Des inquiétudes partagées

« Ce gouvernement donne l'impression d'une déconnexion totale avec les préoccupations des citoyens », critique l'élu ciottiste. Les récentes polémiques sur le train de vie des ministres et les dépenses somptuaires de certains d'entre eux ne font qu'aggraver ce sentiment de décalage.

Un économiste, professeur à l'université d'Évry, souhaitant rester anonyme tempère toutefois ce jugement en soulignant que « la multiplication des ministères peut, dans certaines circonstances, permettre une meilleure prise en compte des spécificités locales et sectorielles ». Il admet néanmoins que « la perception publique d'un gouvernement aussi pléthorique envoie un mauvais message, surtout en temps de crise ». Entre les lignes, il semble soutenir la stratégie de Michel Barnier visant à maintenir un équilibre délicat entre représentation et efficacité, mais reconnaît que ce choix comporte des risques. Avec autant de ministres et de secrétaires d'État, les rivalités internes risquent de se multiplier, au détriment de l'efficacité collective. Loin d'être un gage de dynamisme et de modernité, ce gouvernement pléthorique est une source potentielle de confusion et d'inefficacité. Dans un contexte où l'État devrait se recentrer sur ses missions essentielles, cette inflation ministérielle envoie donc un mauvais signal.

Julien Tellier
Julien Tellier
Journaliste stagiaire à BV

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