Grande braderie des bijoux de famille (suite et fin)
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Suite et fin de l'article publié le 31 décembre.
Si la privatisation d’ADP patine, grâce au référendum d’initiative partagée afin de l’empêcher d’aboutir, celle, plus sournoise, d’Engie est en marche. Ce n’est pas un hasard si le tout nouveau président du conseil d’administration d’Engie est un proche affirmé d’Emmanuel Macron, pour ne pas dire un protégé, comme le rappelait Le Monde, en mai 2018. Les connaisseurs du dossier savent qu’il a été nommé à ce poste pour engager la privatisation puis de le démanteler, même si le management opérationnel de l’entreprise y est vigoureusement opposé. C’est d’ailleurs pour cela que la nomination de Jean-Pierre Clamadieu au poste de président a été imposée par l’Élysée, alors qu’Isabelle Kocher, la directrice générale, plaidait pour être nommée PDG. À l’image de ce qui se pratique dans la plupart des grands groupes cotés. Paradoxe, pour un gouvernement prônant l’égalité homme-femme, le chef de l’État décide de placer un chaperon pour contrôler les actions de la seule femme à un tel poste. Résultat : le président d’Engie rame exactement à contre-courant du reste de l’équipe.
Dame ! c’est qu’il y a huit milliards d’euros à récupérer au passage, une sacrée somme ! Vraiment ? Car à bien y regarder, huit milliards d’euros, finalement, ce n’est qu’un mois et demi de déficit public. Pour récupérer une telle somme, Jean-Pierre Clamadieu ainsi que plusieurs administrateurs comme Ross McInnes (un financier, ancien de Bank of America et président de Safran) n’ont pour objectif que de faire grimper le cours de Bourse le plus rapidement possible. Les logiques financières de court terme sont peu compatibles avec la stratégie de long terme d’Isabelle Kocher basée sur les énergies propres. Pour un Emmanuel Macron qui vouait aux gémonies l’ancien monde, il est curieux de constater que l’équipe qu’il pousse représente le pouvoir mâle parlant de dividendes et de cours de bourse face à une femme dont la stratégie est basée sur la question environnementale. Ce gouvernement n’est pas à un paradoxe près !
Une fois aux mains d’investisseurs privés et, c’est un pléonasme, par essence peu scrupuleux, il est évident que la politique commerciale du nouvel Engie (l’énergéticien changera-t-il, au passage, une nouvelle fois de nom, histoire de perdre encore un peu plus les consommateurs ?) n’aura plus grand-chose à voir avec ce qu’il était du temps de GDF. Il faudra se préparer à des hausses massives du prix de l’énergie (et pas seulement du gaz), sachant que les tarifs réglementés ont été mis à mort par le Conseil d’État, estimant qu’en l’état de la concurrence en France, ils n’ont plus lieu d’être… Voire. Peut-être même faut-il s’attendre à un démantèlement de ce joyaux industriel français avec une vente à la découpe très rentable pour des investisseurs de court terme.
Voilà donc le grand projet de la Macronie : privatiser à tour de bras tout ce qui peut l’être afin de satisfaire l’appétit des financiers dont le Président est issu. A-t-il, d’ailleurs, jamais quitté leur caste ? Rien n’est moins sûr, quand on voit avec quel dédain il annonce renoncer à sa retraite de président de la République, comme si la retraite n’était qu’une aumône faite par le système aux plus modestes, aux plus fragiles, alors que c’est un droit acquis.
À la manœuvre, pour accomplir le dessein présidentiel, le Comité action publique 2022, qui aurait tout aussi bien pu s’appeler Comité de salut public, vu son rôle. Il a, en effet, été créé pour planifier la réforme de l’État avec, pour priorité, de privatiser tout ce qui pourra (encore) l’être. Son président, le franco-australien Ross McInnes (encore lui), un ultralibéral passé par Oxford, est sans états d’âme. Il est déterminé à réduire l’État à sa portion congrue en pratiquant des coupes claires dans tout ce qui peut être taillé. Tiens tiens, le président du Comité action publique est aussi administrateur d’Engie. Curieux. Autres indices, Jean-Pierre Clamadieu est très proche de Guillaume Pepy et de Murielle Pénicaud. À bien y regarder, tout cela ressemble à une manœuvre macronienne pour en finir avec Engie comme avec la SNCF, ADP, la FDJ ou encore EDF, dont le plan secret de démantèlement s’est étalé dans la presse.
Il n’est pas trop tard, non plus, pour empêcher le projet libéral d’Emmanuel Macron et d’Édouard Philippe de continuer de brader les bijoux de famille tout en essorant les citoyens contribuables consommateurs à coups d’augmentations de taxes et de tarifs commerciaux.
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