Grèce – Royaume-Uni : frictions autour d’une frise

frise parthenon

Le Premier ministre grec Kyriákos Mitsotákis a exprimé, lundi dernier, son « mécontentement » après la décision de son homologue britannique Rishi Sunak d'annuler la rencontre au cours de laquelle ils devaient notamment évoquer le différend déjà ancien autour des frises du Parthénon. Une controverse ancienne que j’ai eu l’occasion d’évoquer ici même, au moins une ou deux fois avant qu’elle ne revienne, ces jours-ci, sur le devant de la scène…

Les deux dirigeants devaient s'en entretenir mardi, l’occasion pour le Premier ministre grec, selon Le Figaro, de rappeler les positions de la Grèce sur la question de ces frises. « Celui qui croit à la justesse et au bien-fondé de ses positions n'a jamais peur de se confronter aux arguments », a déclaré Kyriákos Mitsotákis. Selon l'agence de presse grecque ANA, citant des sources au sein du gouvernement grec, le Premier ministre britannique a apparemment été contrarié par des propos tenus à la BBC, dimanche dernier, par son homologue grec qui a estimé que conserver une partie des frises du Parthénon hors de Grèce revenait à « couper Mona Lisa (la Joconde) en deux ». Selon lui, « ce n'est pas une question de propriété, mais c'est une question de réunification » de ces frises dispersées, notamment, entre le musée de l'Acropole et le British Museum de Londres.

Toujours selon Le Figaro, le porte-parole de Rishi Sunak a affirmé que celui-ci n'avait « pas l'intention » de faciliter le retour à Athènes des marbres que la Grèce réclame depuis des décennies, notamment sous l'impulsion de l'ancien ministre de la Culture, feu la chanteuse et actrice Melina Mercouri, qui en avait fait une cause nationale. Malgré une résolution de l’UNESCO, cette demande restera lettre morte, s’attirant même les sarcasmes des Britanniques qui estimaient que les marbres en question étaient mieux protégés au British Museum que dans la pollution d’Athènes Les autorités grecques soutiennent qu'elles ont été l'objet d'un « pillage » lorsque le pays était sous occupation ottomane. Londres affirme que les sculptures ont été « acquises légalement » en 1802 par le diplomate britannique Lord Elgin, qui les a revendues au British Museum.

Il n’y a pas que nos charmants pilleurs d’outre-Manche qui étaient à l’œuvre. Balayons d’abord devant notre porte : en 1788, le comte de Choiseul, ambassadeur de France à Constantinople, ordonnait à son agent à Athènes « de piller dans Athènes et son territoire tout ce qui pouvait être pillé ». Une part importante de sa collection se trouve au Louvre, où l’on peut admirer également, acquises par ailleurs, la Vénus de Milo et la Victoire de Samothrace. Si, d’aventure, les Grecs obtiennent gain de cause, la boîte de Pandore risque de s’ouvrir pour les grands musées occidentaux.

Le nouveau musée de l'Acropole, inauguré en 2009, a réservé un emplacement pour accueillir les frises du Parthénon. En attendant de pouvoir les y retrouver, on peut, depuis le jardin sur le toit de l’hôtel Herodion, admirer le Parthénon sur les pas de Chateaubriand, Lamartine et Maurras.

José Meidinger
José Meidinger
Journaliste - Ancien grand reporter à France 3 Alsace, il passe son temps entre l’Alsace et la Grèce.

Vos commentaires

32 commentaires

  1. A une époque où on prkne la mondialisation, cela a-t-il vraiment de l’importance qu’une œuvre d’art, quel qu’elle soit se trouve à parus, ou à Rio. L’important est que les détenteurs de ses merveilles en prennent soin, et sachent en raconter l’histoire qui a fait de nous ce que nous sommes.

  2. Des voleurs comme la racaille qui nous gouverne en France. Ces biens appartiennent au pays d’origine et non aux pilleurs pour leurs musées et quelques tordus pour se remplir les poches.

  3. Ce qui s’est passé en Afghanistan devrait nous faire réfléchir sur le bien-fondé de ces restitutions d’oeuvres d’art à leur pays d’origine, même à des pays comme la Grèce. A ce propos, le prêt d’objets d’art du Louvres à Abu Dhabi est une pure imbécillité, connaissant la stabilité et la fiabilité de ces régimes du Moyen Orient.

  4. Comme dit ici, les copies de qualité sont toujours possibles. Et même, au risque de choquer, je trouve que la France devrait rendre l’obélisque de la place de la Concorde aux égyptiens, pour qu’il retrouve sa vraie place à Louxor, près de son homologue. Cela serait une belle leçon de respect des peuples et de leurs cultures. – – – – – On lancerait un grand concours artistique pour placer une oeuvre témoignant de la qualité de l’art français, ce serait un bel évènement, très positif pour l’image de la France (de nos jours, ça nous ferait du bien…).

    • Un petit détail qui vous a échappé : cet obélisque ainsi que celui resté à Louxor sont des cadeaux et non des pillages. On ne rend pas des cadeaux même par respect. On a effectivement rendu aux Vénitiens les chevaux de Venise et ceux du Carrousel n’en sont qu’une copie et c’est très bien ainsi. Évidemment de nos jours il serait I envisageable de rapporter des œuvres étrangères, mais dans le contexte de l’époque le but n’était pas de pilier pour pallier à des fins personnelles, mais par la création de musées de permettre au peuple d’avoir accès à la beauté d‘’œuvres antiques afin de susciter l’inspiration de futurs artistes.

  5. L’article fait bien d’évoquer la boite de Pandore et les réactions de mes amis ici, m’invitent à dire quelques mots.
    Juste des questions. Des tableaux, des masques, des miniatures, bien, c’est facile à transporter, mais un temple, un pont, on fait comment ? Et à qui rendre le bien ? Un Rubens du Louvre, on fait avec le lieu de résidence de l’artiste, Anvers? Oui, mais le peintre n’est pas Belge, il est…Espagnol ! Ensuite, une oeuvre est-elle volée ou donnée ? Et l’alibi de la pollution sur Athènes n’est pas fausse, elle a été évoquée avec l’affaire des masques africains au musée de Tervuren en banlieue bruxelloise ; certains se réjouissent en se disant que leur voyage vers l’Afrique va nous faire de la place, en plus ce sont des horreurs qui ne cous parlent pas disent certains….On a mieux à montrer etc… Et puis, il vont en faire quoi, les mettre dans un hangar insalubre, le palais d’un potentat ? J’ai lu ce genre de propos pas vraiment faux, il est vrai. Reste aussi à savoir qui est propriétaire du bien. L’antiquité égyptienne n’appartient pas aux Arabes, elle fait partie de mon cours d’histoire avec la Grèce et Rome pour l’antiquité, pas le monde arabe, selon le programme scolaire que jai suivi. Et la Grèce fait comment avec la Turquie, qui fait visiter les architectures grecques en Anatolie, elle va demander pour récupérer le montant des entrées de touristes ? Et c’est pour l’art,mais pour l’argent, que faire, la France rendra l’argent que la Banque Nationale de Belgique avait confié à Paris en 1940 ? Argent disparu pendant la guerre à ma connaissance…Et les cloches des églises volées par la République en 1793 et quelques pour en faire des canons, comment se mettre d’accord ? Et les vies volées par l’Empire français pour ses guerres européennes avec la conscription obligatoire, est-ce que des pensions ont été versées à l’époque ?
    Un beau lot de vraies questions….

    • Tant qu’on y est : réclamer aux Britanniques les lions au pied de la colonne de Nelson à Trafalgar Square : après tout, c’est le bronze des canons français pris après la bataille !
      ( La France a déjà rendu tout ce que les conquêtes napoléoniennes avaient « butiné » en Europe. On en finirait pas .

  6. Il y a 2500ans, les Grecs avaient eux aussi, « dévalisé » l’Egypte. Comme dit la fable, la loi du plus fort est toujours la meilleure. Il y a les loups,…. et les agneaux. Raison de plus pour nous de ne pas se laisser transformer en moutons bêlants.

  7. Ah, l’humour anglais ! Les Britanniques ne sont jamais à une perfidie près quand ils affirment que ces frises ont été acquises de façon tout à fait légale, comme quand des pans entiers des territoires américains ont été achetés tout aussi légalement à des tribus d’indiens contre quelques verroteries !

  8. Il est possible de faire des copies authentique et précisés à l’exposition. Certaine copies sont à s’y méprendre et n’enlèvent en rien leur beauté, garder les authentiques relève d’une appartenance malsaines envers les auteurs de ces œuvres. Maintenant chercher l’honneur chez les anglais, quelle gageur.

    • Autant instaurer un musée de copies ! Ou serait l’imaginaire ? On ne regarde pas une copie comme on regarde une pièce authentique, fusse-t-elle de parfaite facture, surtout maintenant ou les procédés ne tiennent souvent pas de l’œuvre d’un artiste.

  9. Les frises du Parthénon, c’est de l’histoire ancienne, le contentieux remonte à plusieurs générations.
    C’est un peu comme si la France demandait aux British le retour en France, pour le Musée du Louvre, de la « Pierre de Rosette », trouvée par Pierre-François Bouchard, déchiffrée par Jean-François Champollion, qui est actuellement au British Museum…
    Et que par la suite le Musée National d’Égypte demandait à son tour à la France que celle-ci leur soit retournée…

    • En fait, elle n’appartient pas aux Brits, et idem pour les Français, et elle n’appartient pas non plus aux Egyptiens qui n’ont aucun droit sur l’antiquité du pays qui appartient plutôt aux coptes égyptiens et non aux Arabes.
      C’est l’ONU qui tient la solution, en principe, car je n’ai pas vraiment confiance dans le Machin. Il faut voir avec la liste du patrimoine mondial. Que la Joconde soit au Louvre ou au Prado importe peu, l’essentiel est de la contempler où qu’elle soit, dans une certaine limite, celle de la civilisation et du respect. Les masques africains exposés à Bruxelles sont entourés de soins, bien exposés, présentés en bonne et due forme. Et les Africains peuvent les contempler quand ils veulent et je ne suis même pas certain que l’entrée du musée soit payante.

  10. Avec les anglais si retors, je souhaite bien du courage à nos amis grecs. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour la France, je me suis toujours demandé de quel droit nous exposions au Louvres tous ces trésors égyptiens…

    • de quel droit ? Il me semble que ces trésors ont été découverts par des archéologues français… et même déchiffré…
      Je pense moi que le premier souci était la  » préservation », si ces archéologues n’avaient pas fait ces  » découvertes », tout serait aujourd’hui redevenu poussière… Aujourd’hui c’est commode d’accuser, mais hier les accusateurs avaient ils seulement les moyens de la préservation ?

    • Vous avez en partie raison, mais il est également vrai que nous avons beaucoup à craindre en ce qui concerne nos musées et leurs collections, ils risquent de se vider plus que de se remplir, après la Grèce, l’Egypte pour partie, l’Afrique , ainsi que tout ce que nous avons acquis plus ou moins honnêtement par le monde dans les siècles passés.

      • A notre époque où il est très facile de reproduire toutes les oeuvres, à l’identique et pour peu cher, il serait juste de ne conserver dans les musées que des copies, destinées à montrer aux visiteurs les merveilles des anciens du monde entier et remettre les originales à leur place.

    • Oui mais compte tenu de la situation économique de la Grèce il y a quelques temps, ces frises
      je le crains, seraient aujourd´hui propriété de la Chine comme le port du Pirée.

  11. Ca aurait de « la gueule » si les anglais, reconnaissant implicitement la « faute » de leurs ancêtres, restituaient ces frises du Parthénon. L’excuse pitoyable de la pollution d’Athênes ne les grandit pas.

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