Halte aux phobies… sauf la puérophobie : détester les enfants, c’est permis !

enfant

En 1999, dans une chronique de La Montagne, Philippe Muray proclamait : « S'il y a quelque chose qui marche très fort, en ce moment, et qui marchera de plus en plus, c'est la chasse aux phobes. À tous les phobes. » Il se trompait. Pas à tous les phobes.

La puéropohobie - on doit, je crois, ce néologisme au journaliste et essayiste Jean Birnbaum, auteur de Seuls les enfants changent le monde, récemment paru chez Seuil - se porte très bien, merci pour elle. Non seulement on ne la chasse pas, mais on l’invite à s’exprimer, on lui tend tous les micros, avec une complaisance souriante. On la voit se promener en majesté sur tous les plateaux, dans tous les médias. Le bimensuel Society lui consacre le dossier de son numéro de septembre. « Faut-il être fous pour faire des enfants ? » : la phrase, sur la une, est en jaune anxiogène sur fond de bébé rouge de rage. Des éclairs ont été rajoutés, sortant de sa bouche grand ouverte. Il ne manque que le son, on se bouche presque les oreilles. Terrifiant. La réponse est dans la question.

Chez Albin Michel vient de sortir un essai remarqué à défaut d’être remarquable : Pourquoi j’ai choisi d’avoir un chien (et pas d’enfant), de la vétérinaire et chroniqueuse Hélène Gâteau. N’était la parenthèse finale, la démonstration serait une rédaction de 5e B écrite par une adolescente punaisant au-dessus de son lit des posters de chiots dans un panier en osier. Pas de quoi se pâmer. Ni s’indigner, d’ailleurs. Mais il y a la petite parenthèse finale, qui fait tout le succès de l'œuvre : « et pas d’enfant »« Faire famille avec un chien, c’est possible », assure Le Parisien, dans l’article qui lui est consacré. Nous sommes priés de trouver cela ébouriffant, subversif et follement rock'n’roll. Comme si la stérilité choisie n’était pas devenue un marronnier pour la presse. Après le chien, moins pénible qu’un marmot et doté d’une espérance de vie plus courte (précieux, en cas d’incompatibilité de caractère, n’est-ce pas ?), viendra la plante verte, qui a l’avantage de ne pas sauter partout, devoir être promené le matin dès potron-minet avec une doudoune jetée sur le pyjama, et en sus, qui est écolo : la plante est non carnivore (sauf exception), en même temps que pourvoyeuse d’oxygène.

Attention, le plaidoyer est finement mené. Si finement que toute critique - comme celle que je suis en train de faire - a été par avance identifiée, énoncée, neutralisée. Et secrètement souhaitée car, à l’instar de l’art contemporain, la littérature supposée transgressive trouve moins son succès dans son talent propre que dans les cris d’orfraie qu’elle suscite. L’auteur dose sa provocation. Le livre se veut humoristique, distancié, capable d’autodérision. « Pas dupe », comme l’écrit Le Parisien. Rajoutez à cela qu’il est préfacé par Sylvain Tesson, que le toutou en question s’appelle Colonel et que Brigitte Bardot aurait lu le livre et « adoré » : trois mots clés susceptibles d’éteindre les préventions des plus conservateurs d’entre nous.

Un anti-spécisme chic

Néanmoins, le résultat est là : la banalisation souriante d’un anti-spécisme chic. Comme beaucoup d’autres « dog mums » (moins plouc que la version française « maman à son chien-chien »), l’auteur « assume ne pas vouloir d’enfants et vivre avec un animal domestique » : « son lien fusionnel et singulier avec son chien s'est substitué à une potentielle maternité ». Les « dog mums » emmènent-elles leur bébé poilu chez le pédiatre ? Non, sans doute, pas encore. Mais qui peut jurer que cela n’arrivera pas ? Et gare au médecin qui s’avisera alors de se déclarer incompétent.

Dans l’émission « C ce soir » du 4 octobre, sur France 5, consacrée à la baisse de la natalité, la psychanalyste et essayiste Corinne Maier, auteur du best-seller Nos kids - sachant qu’elle a elle-même deux enfants : croyante, donc, mais pas pratiquante -, s’acharne sur nos chères têtes blondes. Elle se dit « sidérée d’entendre des discours vieillots comme c’est merveilleux d’avoir des enfants » (sic) . Elle exhorte à « secouer le cocotier et dépasser l’idéalisme niais » (resic).

Si la xénophobie, l’islamophobie, la grossophobie, la transphobie et tutti quanti sont honnies, la puérophobie peut s’afficher, insolente, en toute impunité. Il est enfin là, le « citoyen idéal » décrit jadis par Ernest Renan, « naissant enfant trouvé et mourant célibataire », le monde « où les enfants sont un inconvénient pour le père » (et la mère), « où l'homme avisé est l'égoïste qui s'arrange pour avoir le moins de devoirs possible ».

En attendant, les puérophobes seraient bien avisés, eux, de mettre tout de suite leur chien au turbin. Qui d’autre, sinon, pourrait bien avoir envie de cotiser pour leur retraite ?

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

50 commentaires

  1. en effet , on est pas  » obligé » d’aimer les enfants – tout comme on n’est pas « obligé » de préférez une vie sans enfant –
    Quand au remplacement d’un enfant par un chien ou un chat, et même si j’adore l’un et l’autre, çà ne  » remplace » pas un enfant, c’est autre chose – Moi j’ai fait et élevé des enfants, je les ai amené à devenir des adultes responsables, bienveillants, équilibrés, j’ai à présent des petits enfants, et tout çà fait mon bonheur – çà ne m’a pas empêché de m’éclater au travail, j’ai eu une vie intense, joyeuse, et comme je suis encore en bonne santé, j’ai repris du service au delà de la retraite auprès d’enfants… et ce que je constate, ce sont des petits que l’on gâte parfois à outrance, mais qui manque de l’essentiel, l’attention bienveillante et l’amour inconditionnel – alors oui, j’aime beaucoup les enfants, les miens mais aussi ceux des autres pour leur spontanéité, leur joie de vivre, leur rires et les câlins dont ils ne sont jamais radin – toutes les personnes qui pour des raisons diverses ont fait le choix de ne pas en avoir se garantissent une vieillesse solitaire, triste et sans transmission – le grand néant avant l’heure en somme !

  2.  » la littérature supposée transgressive trouve moins son succès dans son talent propre que dans les cris d’orfraie qu’elle suscite.  » S’il n’y avait que la littérature! Le wokisme,

  3. Désolé Gabrielle CLUZEL, je ne vous suis pas du tout avec votre conclusion sur les Retraites ! Voyez vous , j’ai été élevé dans le Catholicisme , mais je ne suis ni croyant , ni pratiquant. J’ai 80 ans , je suis retraité , j’ai commencé à travailler à 18 ans et ne me plains pas sur ce sujet . Juste , je dis que si la Retraite par Répartition n’avait pas existé et n’avait pas été obligatoire lorsque j’ai débuté dans les années 60 , j’aurais capitalisé , comme je l’ai fait plus tard avec AGIRC-ARRCO et alors ? Cette soit disant solidarité inter-générationnelle ne correspond plus du tout aux critères actuels , elle est vouée à l’échec à court ou moyen terme et vous persistez à en faire un argument d’équilibre sociétal ! J’espère bien qu’à l’avenir , la majorité des Etres-Humains désirant procréer ne le feront pas dans l’esprit ni avec l’arrière pensée de votre conclusion.

  4. Vision mortifère de la Vie et de l’Amour l’égoïsme forcené tout azimuts et puis quand va arriver le crépuscule de leur sombre vie il seront peut être heureux de trouver un EHPAD avec quelques jeunesses pour les servir dans les meilleurs cas en attendant la funeste mort . Quelle vie de chien ! Ils ne comprennent rien à l’Amour car l’amour c’est partager et donner la vie Ne vous trompez pas c’est influenceurs sont les premiers qui feront l’inverse de leurs turpitudes.

  5. J’ai huit-z-enfants !

    Et c’est le bonheur … ils sont grands … ils sont diplômés ( sauf le « petit dernier » aux études ) …. aucun n’est « délinquant » aucun ne se drogue et aucun ne vote à gauche ! Merci la Sainte Providence et touchons du bois pour la suite !

    La seule solution que la Vie a trouvé « pour ne pas mourir complètement » …. c’est la descendance !

    Lorsqu’en Famille, nous visitions des musées …. dans le musée d’Histoire Naturelle …. devant les imposants squelettes des dinosaures …. je rappelais une évidence scientifique : l’étincelle de Vie qui nous anime existait déjà à l’époque de ces animaux … et c’est justement parce que la totalité de nos Ancêtres ont « fabriqué » de la descendance …. que, nous, nous sommes vivant aujourd’hui …. et cela en dépit des difficultés, des maladies, des guerres …. Merci donc à Nos Valeureux Ancêtres qui n’ont pas baissé les bras .

  6. Ne faudrait il pas s’interroger sur les causes ayant conduit à cette phobie et essayer d’en trouver un remède? Un monde sans enfant est voué à disparaître et il est insupportable de se croire immortel car l’avenir est dans le cycle normal de la vie. Je plains de tout mon coeur ceux qui ont peur des enfants car ils passent à côté des meilleurs moments de la vie. Mais je hais ceux qui entretiennent cette peur.

    • « Ne faudrait il pas s’interroger sur les causes ayant conduit à cette phobie » La cause principale crève les yeux : la Franc-Maçonnerie, dont l’idéologie glorifie la personne isolée, qui ne peut effectuer son accomplissement que seule, déliée de toute entrave sociale. Ce qui nie toute vie en société, enfants y compris. Rappelons que 80% de notre personnel politique est FM, les 20% restants n’étant que sympathisants empressés.

  7. Ne plus procréer et laisser la démographie de la France aux mains de l’immigration est un acte de suicide caractérisé. Quand les Sandrine Rousseau, Corinne Maier, Hélène Gâteau et consort sucreront les fraises dans leur EPAHD, ce ne sont pas les Français de papier – encore moins les sans papiers – qui viendront s’occuper d’elles. Quant à celles en âge de procréer qui font le choix revendiqué de ne pas vouloir d’enfant, elles illustrent parfaitement le nihilisme hédoniste de notre société de consommation uniquement obsédée par les frivolités. Comme l’a écrit José Manjón de l’Institut géopolitique espagnol : « La vieille Europe n’a peut-être même plus deux générations à vivre ».

  8. En tant que misanthrope assumé, j’avoue que je n’aime guère les enfants non plus… Bon, je suis vieux, seul et con mais ça n’excuse pas tout. Cela dit, si je n’aime pas les enfants, c’est surtout à cause de la manière dont on les élève, l’enfant – roi, tout leur est permis. Non, je n’ai pas oublié mon enfance, la pire période de ma vie puisque je pouvais même pas la ramener sous peine de m’en prendre une. Et aujourd’hui que je suis vieux et que je pourrais enfin me venger, ils ont plus de droits que moi, quelle injustice. Cela dit, je connais un jeune couple qui ne veut pas avoir d’enfants et dont l’homme s’est imposé une vasectomie. J’avoue que là, il y a quelque chose qui me répugne
    encore plus que mon désamour des enfants.

  9. Et pendant ce temps la une certaines population qui , dit on n’ont pas une attirance particulière pour les chiens, font des enfants sans se poser de questions « existentielles »

  10. Mes enfants – depuis leur naissance et adultes maintenant – sont la source de mes plus grandes joies de mon existence.

    • Enfants et petits enfants, ce sont mes trésors de vie. Nous sommes une famille unie et aimante des plus âgés 92 ans à la plus jeune 4 mois et j’en rends grâce au ciel. Je plains vraiment ceux qui ne connaissent pas ce bonheur ou qui ne peuvent s’y projeter

  11. Que pense cette » essayiste  » de la GPA , que l’on promeut allègrement ? Je suis sûre que elle trouve ça merveilleux. De plus elle a eu 2 enfants, facile, le  » faites ce que je dis mais pas ce que je fais « .

  12. A défaut d’avoir réussi à vaincre la surpopulation et surnatalité d’une Afrique immature, la solution de nos « zélites » est donc de promouvoir l’immigration et la croissance du tiers-monde d’une main tout en la compensant par une promotion de la stérilité et de la décroissance pour les peuples les plus évolués d’une autre main.
    Je dirais que ça n’a pas dû leur faire trop mal à la tête mais qu’ils risquent de le payer extrêmement cher, surtout si leur plan venait à se concrétiser.

  13. Et tous ces « puérophobes » de bas étage pensent-ils que s’ils n’avaient eu de parents ils ne seraient pas là à écrire ou à parader sur des plateaux de télé en débitant des conneries plus grosses qu’eux ?

  14. Et dire qu’il y a des jeunes parents, qui découvrent avec effroi, qu’ils ne pourront pas procréer pour une raison ou une autre.

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