[HISTOIRE] Canicule estivale et eau glacée : ces rois morts brutalement
Avec les canicules et les vagues de chaleur qui frappent chaque été la France, les injonctions se répètent : il faut s'hydrater. Boire de l’eau fraîche est un geste si simple, si apaisant lorsqu’on est assoiffé. Et pourtant, dans l'Histoire, un seul verre a suffi à certains princes ou rois pour passer tragiquement de vie à trépas.
Louis X le Hutin
L’une des malheureuses victimes, morte pour s'être rafraichie, fut l’un des fils du roi de France Philippe IV le Bel : Louis X le Hutin. Après avoir joué une partie de jeu de paume dans le bois de Vincennes, près du château de Vincennes où il réside, il est en nage. Le jeune roi de 27 ans avale un grand verre d’eau ou de vin (selon les versions) pour se rafraîchir. Quelques instants plus tard, il décède, le 5 juin 1316.
Les rumeurs vont alors bon train. Certains contemporains prétendent que la boisson du souverain était trop glacée et qu'elle a provoqué un refroidissement. D’autres osent parler d’un empoisonnement. Cette thèse est reprise au XXe siècle par Maurice Druon dans sa légende des Rois maudits : la terrible Mahaut de Bourgogne aurait provoqué la mort de Louis X par quelque poison. Maladie ou meurtre, le décès du Hutin entame toutefois la disparition progressive de la dynastie des Capétiens directs, avant que la branche cadette des Valois ne la remplace en 1328 en la personne de Philippe VI.
Philippe Ier le Beau
Partons, maintenant, de l’autre côté des Pyrénées, dans le chaud et beau royaume de Castille, en Espagne. En 1506, ce dernier devient le domaine d'un roi à la grande beauté, Philippe Ier. Il est le premier des Habsbourg à hériter de la couronne ibérique, qui s'ajoute ainsi à ses possessions de Bourgogne et de Hollande. Hélas, ce roi ne profitera pas de son pouvoir très longtemps, car il décède après seulement deux mois de règne, le 25 septembre 1506, à Burgos, à 28 ans. Comme Louis X, il aurait bu une eau trop glacée après une partie de jeu de paume épuisante. Et comme pour le Hutin, si certains évoquent la maladie, l'empoisonnement est aussi soupçonné sans que l’on puisse véritablement le prouver.
Sa mort provoque le grand désarroi de son épouse, Jeanne de Castille, qui ne se remettra jamais du décès de son mari. Celle qu'on surnommera « la Folle » est enfermée en 1509 à Tordesillas, où elle décède en 1555. Par chance, le fils et héritier du couple, le grand Charles Quint, n’a pas connu le même destin mais fut néanmoins mêlé à une autre histoire d’eau trop glacée... et fatale.
François de France
En 1536, François Ier envoie son fils et dauphin, François de France, en Savoie afin de s’emparer de ce territoire au nom de la couronne. En chemin, le jeune prince fait un court séjour à Lyon afin de s’y reposer. Durant cette halte, il lui prend soudainement une envie de jeu de paume, histoire de se détendre. Échauffé par ce sport, François se met à boire - lui aussi ! - une eau trop fraîche et décède quelques jours plus tard, le 10 août 1536. Il a 18 ans.
Furieux et aveuglé par le chagrin, François Ier crie au meurtre et à l’assassin. Tous les regards se tournent alors vers l’écuyer du prince qui lui a apporté le soi-disant breuvage meurtrier, le jeune comte Sébastien de Monteculli. Italien et spécialiste des poisons. On le soupçonne d’être à la solde de Charles Quint. Il avoue sa trahison après avoir été passé à la question, avant d’être écartelé sur la place de Grenette, à Lyon.
Les causes réelles de ces décès royaux et princiers ne purent être officiellement et scientifiquement prouvées, mais le point commun entre ces trois décès est clair : l’absorption de quelque rafraîchissement et la pratique du jeu de paume. La disparition de ces souverains reste un mystère dont nos scientifiques et historiens devraient se saisir.
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13 commentaires
Personnellement, je pense surtout à ceux qui subissaient « la Question » sans être coupables et qui avouaient pour que les tourments cessent. Enfin, presque… C’est inouï que l’humain soit capable de telles horreurs !
On a dit que le dauphin François était tuberculeux et que l’eau fraîche de Montecuculli n’avait fait que précipiter sa mort. Il avait été détenu très jeune en Espagne avec son petit frère Henri, comme otages , garants du versement de la rançon de leur père exigée par Charles Quint pour libérer François 1er après la défaite de Pavie. Les deux enfants ont été très mal traités. On a tué leurs suite sous leurs yeux, on ne leur faisait pas suivre les cadeaux envoyés par la cour de France pour adoucir leur captivité et on ne leur parlait pas français au point qu’ils sont rentrés hésitants sur leur propre langue. C’est peut-être en Espagne que le petit dauphin aurait contracté la tuberculose. Son frère Henri qui le remplaça sur le trône en garda peut-être une fragilité affective qui le précipita dans les bras de Diane de Poitiers qui avait l’âge d’être sa mère.
Il existe une autre hypothèse médicale, que j’ai pu évoquer pour Alexandre le Grand : les témoins directs, rassemblés pour un banquet, sont unanimes : il boit d’un seul trait la coupe d’Héraclès remplie de vin pur. Il ressent immédiatement une vive douleur le forçant à quitter la table et se met à délirer. Il meurt quelques jours après dans un tableau de délire fébrile sans pouvoir ingurgiter liquide ni solide.
Pour un clinicien, il pourrait s’agir d’une rupture spontanée de l’œsophage par ingestion rapide et massive de liquide. Cet accident, rare mais non exceptionnel, peut survenir chez tout homme en bonne santé qui ingurgite trop rapidement une grande quantité de liquide : Lorsque la pression hydraulique dépasse les capacités mécaniques de l’œsophage, celui-ci se rompt, juste au-dessus de la traversée du diaphragme et le décès survient par surinfection massive. C’est l’expérience du crève-tonneau de Pascal mise en œuvre chez l’Homme.
La même hypothèse pourrait être évoquée pour les exemples précédents.
Je regrette que vous n’ayez pas ici, évoqué la mort du Grand Connétable, Bertrand du Guesclin qui, assiégeant les anglais à Châteauneuf de Randon en Lozère actuelle, et au mois de juillet, accablé par la canicule (déjà à l’époque…) s’abreuvait à l’eau d’une source (trop) fraîche, en mourut peu après.
Les anglais remirent les clefs de la cité sur le corps de Bertrand du Guesclin ce mois de juillet 1380.
Un magnifique tombeau gisant, et une superbe statue du Grand connétable subsiste toujours à Châteauneuf de Randon.
C’était de l’eau de la Seine…
Ils ne savaient pas régler leur réfrigérateurs, certainement.
Intéressant
Poison certainement , il n’avait pas d’eau glacée à ce point , comment auraient ils eu de l’eau aussi froide à l’époque .
La glace existait sous forme de blocs ou barres et ces éléments étaient entreposés dans des « glacières », justement.Les châteaux en ont une dans les caves, ça c’est pour la certitude, mais pour la fabrication, je crois que la glace venait des glaciers et était transportée le plus rapidement possible, un peu comme le poisson depuis la mer, justement, sur un lit de glace.
Réserves de glace souterraines ( dans le Doubs et le jura, par exemple, dans des grottes profondes) ; sous forme de très gros blocs, pas le temps de fondre dans les calèches..
Ensuite, entreposées dans des pièces avec des coffres dédiés, renforcés : tous les épiciers et autres poissonniers en avaient, à l’instar de nos épiciers des années 1920/50..
C’est la question que je me suis toujours posée, car la glace, si elle existait en effet, fond rapidement. Mais il est vrai qu’à l’époque ils étaient plus « inventifs » que nous qui avons tout sans réfléchir.
Une lourde peine infligée à deux algériens. Faut pas rêver ! Au pire in rappel à la loi avec les excusés de la PAF de Roissy et un porte- clé souvenir Aéroport de Paris.