[HISTOIRE] Christophe Colomb : Juif espagnol ou catholique génois ?

Statue de C. Colomb à Barcelone (capture d'écran)
Statue de C. Colomb à Barcelone (capture d'écran)

Après 22 ans d'enquête menée par des chercheurs de l’université de Grenade, une véritable bombe a éclaté dans les milieux historiques, bouleversant peut-être à jamais nos connaissances établies : Christophe Colomb, le célèbre explorateur et découvreur des Amériques en 1492, pourrait être en vérité un Juif séfarade et non un catholique génois, comme le suggèrent nos manuels d’histoire. Cette hypothèse est née de l’analyse ADN des restes de Colomb et de ceux de son second fils. Les résultats de cette étude ont été présentés dans un documentaire diffusé sur RTVE, la chaîne publique espagnole, affirmant l’idée que Colomb aurait volontairement caché ses origines pour échapper aux persécutions religieuses.

Des analyses ADN surprenantes

Pour comprendre cette conclusion surprenante, il faut revenir aux détails de l’enquête. L'équipe dirigée par le professeur de médecine légale Miguel Lorente a analysé des fragments d'ADN prélevés sur les restes de Christophe Colomb et de son second fils, qui reposent encore aujourd’hui au cœur de la cathédrale de Séville. Ces échantillons, bien que partiels, ont révélé au professeur Lorente des marqueurs génétiques compatibles avec ceux retrouvés dans les populations juives séfarades. Pour étayer sa découverte, le professeur Lorente déclare dans le documentaire : « Il y a des traits compatibles avec une origine juive […] tant dans le chromosome Y (mâle) que dans l'ADN mitochondrial (transmis par la mère) d'Hernando. » Cela signifierait ainsi que Christophe Colomb et Beatriz Enriquez de Arana, les parents de Hernando Colomb (appelé aussi Fernand), auraient été tout deux d’origine juive. Cette découverte soulève cependant des questions : comment l’explorateur qui a servi la très catholique couronne d’Espagne a-t-il pu vouloir dissimuler sa véritable identité ?

Un contexte historique de persécutions religieuses

Pour comprendre pourquoi Christophe Colomb aurait caché ses origines, il faut replacer cette découverte dans le contexte historique de l'Espagne du XVe siècle. À cette époque, la Reconquista, menée par les rois catholiques Isabelle et Ferdinand, atteignait son apogée. En effet, après des siècles de domination musulmane sur la péninsule Ibérique depuis 720, l'Espagne s'unifiait sous la bannière du catholicisme. Les Juifs séfarades, qui représentaient environ 300.000 personnes, étaient alors considérés comme des infidèles, dans un climat de ferveur religieuse et de tensions politiques. Ceux qui refusaient de se convertir au catholicisme étaient ainsi pourchassés par l’Inquisition et contraints à l’exil. Ainsi, Christophe Colomb, pour éviter d’être marginalisé et perdre l’occasion de financer ses rêves d’expéditions, aurait pu choisir de dissimuler son identité juive en adoptant une apparence de fervent catholique en prétendant être né à Gênes. Cette thèse, si elle venait à être réellement confirmée, bouleverserait l’image de Colomb, car cette nouvelle interprétation ne se fait pas sans résistances et sans avis divergents.

Vérité ou mensonge ?

En effet, malgré les révélations du professeur Lorente, cette hypothèse reste sujette à débat au sein de la communauté scientifique. Antonio Salas, un généticien de l’Institut de recherche en santé de Saint-Jacques-de-Compostelle, a exprimé des réserves, soulignant que les résultats de l’équipe de Grenade n’ont pas encore été validés par leurs pairs. Il rappelle aussi que le chromosome Y n'est qu'une fraction de l'ADN total et qu’il est possible que des erreurs d'interprétation aient été commises. Cette controverse n'est pas sans rappeler d'autres affaires similaires, comme celles d'Anna Anderson, qui prétendait être la grande-duchesse Anastasia Romanov, ou de Charles-Guillaume Naundorff, qui se déclarait être Louis XVII, où les résultats des tests et des contre-tests ADN entraînaient souvent débats et polémiques entre partisans et détracteurs.

Ainsi, bien que cette étude sur l’identité de Christophe Colomb ouvre de nouvelles perspectives, la vérité reste encore à découvrir. Le mystère perdure et seul le temps, avec des recherches plus approfondies, permettra peut-être de lever définitivement le voile sur les véritables origines de l'explorateur.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

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