[HISTOIRE] Guerres de l’opium : le futur de la France ?

Credit: Wellcome Library, London
Credit: Wellcome Library, London

Selon Alexis de Tocqueville, « quand le passé n'éclaire plus l'avenir, l'esprit marche dans les ténèbres ». Ainsi, pour éviter de réitérer les erreurs du passé, la France et ses dirigeants pourraient s’intéresser à l’Histoire, et notamment aux guerres de l’opium. Ces deux conflits majeurs du XIXe siècle opposèrent la Chine à la Grande-Bretagne, à la France et aux États-Unis autour du commerce de la drogue dans l’empire du Milieu. Ces conflits illustrent ainsi comment le trafic de stupéfiants peut compromettre la stabilité d’un État, un parallèle qui peut être tracé avec les défis posés aujourd’hui par le narcotrafic dans notre pays.

 

Les guerres de l’opium

La première guerre de l’opium éclate en 1839 lorsque la Chine, sous le règne de l’empereur Daoguang de la dynastie Qing, tente de restreindre l’importation d’opium sur son territoire. Ce produit addictif, introduit en masse par les Britanniques, est issu de la culture du pavot en Inde et exporté en Chine par la Compagnie britannique des Indes orientales. L’opium ravage ainsi rapidement la population chinoise, qui devient de plus en plus dépendante de cette drogue. Devant l’opposition des autorités chinoises, la Grande-Bretagne réagit par la force, souhaitant préserver son accès au marché de la Chine pour continuer à s’enrichir. Cette dernière, malgré une lutte acharnée, est contrainte d’accepter la défaite en 1842 et de signer le traité de Nankin, qui impose de lourdes sanctions, comme la cession de Hong Kong à l’Empire britannique, l’ouverture des ports chinois aux marchandises anglaises et le versement d’importantes indemnités de guerre. L’opium continue alors de circuler en Chine, provoquant des effets désastreux.

En 1856, les Britanniques, devenus les véritables dealers de la Chine, estiment pouvoir réclamer davantage, avec l’aide de la France et des États-Unis. Un second conflit éclate, qui se solde en 1860 par une nouvelle défaite chinoise aboutissant à la légalisation officielle de l’opium. L’empire du Milieu entame alors un long déclin, accentué par la désorganisation économique et sociale due à la drogue.

 

La France du XXIe siècle sur les pas de la Chine du XIXe siècle ?

Comparaison n'est pas raison, mais comme dans la Chine lors des guerres de l’opium, la France se trouve aujourd’hui face à des défis structurels liés à la drogue : une population vulnérable à la dépendance, une économie parallèle menaçant l’ordre public (le trafic de drogue génère 3,5 milliards d’euros et 200.000 emplois, selon Bruno Le Maire) et une ingérence étrangère. En effet, les stupéfiants consommés en France proviennent de diverses régions, principalement d’Amérique latine. Comme pour les guerres de l’opium, où des puissances étrangères imposèrent leur commerce de drogue à un pays vulnérable, les cartels internationaux exercent ainsi une pression similaire, forçant la France à mobiliser des ressources pour préserver son autorité et protéger sa population.

La Chine du XIXe siècle, démunie de moyens pour contrer l’opium, a vu ses structures politiques et sociales s’éroder, ainsi, sous la pression et la dépendance interne. De manière comparable, le narcotrafic en France menace l’équilibre économique de certains quartiers, installe des dynamiques de violence et mine la confiance entre l’État et les citoyens, qui subissent les effets de ce fléau. Des territoires et des villes comme ceux de Poitiers, Rennes ou Sète en subissent ainsi, chaque jour, les conséquences. Ces cités, comme de nombreux autres quartiers en France, se retrouvent en proie à une criminalité grandissante qui piège des habitants démunis.

 

Mener une guerre contre un narco-État

Comme la Chine qui, au XIXe siècle, entreprit une lutte acharnée contre la drogue, la France pourrait intensifier ses actions contre le narcotrafic pour éviter de céder face à la puissance grandissante des trafiquants. Dans ce but, Bruno Retailleau déclare qu’il doit y avoir « une mobilisation générale pour ce grand combat qui prendra des années ». Cette lutte pourrait, s’il le faut, prendre les allures d’une véritable guerre contre la drogue et ceux qui la répandent. À cette idée, le journaliste Vincent Roy, sur CNews, souligne l’importance de préparer l’opinion publique à cette lutte difficile, estimant qu’il faudra « assumer les conséquences, c’est-à-dire le sang […] car les bandes armées ne se laisseront pas faire ». Avec, peut-être, un jour, l'envoi de l'armée ? Sur ce sujet, il y a débat.

 

Ces guerres de l’opium nous rappellent que le fléau de la drogue impacte toute la vie d'une nation : santé publique, cohésion et stabilité sociale, économie, résilience de l’État... Tirons les leçons de l’Histoire afin que la France ne devienne pas, demain, le vassal des barons de la drogue.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

33 commentaires

  1. Suite… Lorsqu’on joue aux apprentis sorciers, lorsqu’on lâche un Golem dans la nature, immanquablement il fini par se retourner contre vous ! Ainsi le Golem immigration destiné à dissoudre la nation dans la diversité jouissive a-t-elle fini par devenir une menace à commencer pour ses promoteurs ! Idem pour la drogue que consomme sans retenues nos « élites » adeptes du « chemsex », et dont la part entre en compte dans notre PIB, gangrène notre pays, mais cela il faut être sorti de l’ENA ou de la cuisse de Jupiter pour ne pas le comprendre !

  2. « En effet, les stupéfiants consommés en France proviennent de diverses régions, principalement d’Amérique latine » +> NPO le Maroc, second producteurs mondial, qui nous inonde de sa résine sans effets secondaires… Personne n’en a parlé à l’occasion de déplacement de la smala présidentielle à Rabat ! Pourquoi ? Bonne question…
    NPO que depuis le 10 mai 1981, le trafic des/dans les zones grises a été quasi officiellement toléré voire encouragé comme adjuvant économique à la « Politique de la ville »…

  3. Nous savons d’où part la drogue, nous savons qui la consomme et nous ne pénalisons que ceux qui font l’intermédiaire. Dans tout l’Occident il est de bon ton de se sniffer un petit rail de coke ou de se fumer un petit joint en toute impunité mais on court uniquement après les dealers. S’il n’y avait pas de consommateurs bien branchés et BCBG qui ne risquent rien il y aurait moins de dealers

  4. La différence fondamentale entre l’importation d’opium qui a été imposé à la Chine par l’Angleterre, c’est que la France doit également faire face à une immigration incontrôlée qui oeuvrent largement dans la distribution des drogues.

  5. EXCELLENT article ! Celà fait longtemps que j’ai fait ce parallèle que personne (jusqu’à maintenant) ne faisait. On peut aussi comparer avec les colons européens en Amérique qui ont vaincu les « peaux-rouges » gràce à leur « eau-de-feu » (et à la fourniture de tissus léprosés). Les indiens d’Amérique ne s’en sont pas sortis. Les chinois s’en sont sortis grâce à Mao et à sa Longue Marche qui a subjugué les jeunes. On voit que seule la dictature pourra nous sortir de cette infection.

  6. J’ai lu avec intérêt et curiosité vos arguments justifiant la persistance de la « Prohibition/Répression » décrétée par notre « Nono le Vendéen » . Merci de nous avoir rappelé qu’Alexis de Tocqueville écrivait : « quand le passé n’éclaire plus l’avenir, l’esprit marche dans les ténèbres » car depuis plus de 50 ans , nos Gouvernances ont eu plutôt tendance à se référer à Conficius , qui lui déclarait : « L’expérience est une lanterne que l’on porte sur le dos et qui n’éclaire jamais que le chemin parcouru. » ! Ainsi , nonobstant que les Américains n’ont mis que 14 ans dans les années 1920 pour abolir la « Prohibition/Répression des Alcools » , qu’ils avaient pourtant décrété auparavant , nos « Gouvernances » , depuis plus de 50 ans , persistent obstinément dans cette voie « absurde » avec les stupéfiants , au seul et unique avantage des « Narcotrafiquants. »

    • Le lien entre les trafics de drogue et le terrorisme islamique, on fait quoi ? Le Hezbollah impliqué dans le trafic de drogue en Afrique (et sans doute ailleurs) pour financer les achats d’armes qui servent à répandre la terreur, on fait quoi ? . Quel rapport avec Al Capone et la prohibition aux US des années 20 ? La colline du crack ? On continue ? Le snif dans les hautes sphères et chez les amis de Palmade ? On ferme les yeux ? La drogue est un cancer qui détruit les cerveaux et la civilisation. Que personne n’oublie l’étymologie du mot assassin.

      • La Prohibition/Répression n’a jamais marché , elle ne marchera jamais . Le Marché des stupéfiants existe , il est là , il est incontournable quoi que vous fassiez . Partant de ce constat et de celui que la Prohibition/Répression n’a fait que la démonstration de ses échecs depuis des décennies , il faut se résoudre à aller dans une direction radicalement opposée . Les États volontaires à le faire , doivent se concerter et s’orienter vers un « Contrôle exhaustif » des différentes « filières stupéfiants » , allant des « Producteurs , jusqu’aux Consommateurs » . C’est sous la « MAITRISE et le contrôle TOTAL et PERMANENT » par ces États que devra dorénavant s’articuler le Marché , avec des Objectifs bien définis : – 1) Satisfaire le Marché .- 2 ) Contrôler la Qualité et la Stabilité des Produits , ce qui en amoindrirait la nocivité au regard de la Santé Publique .- 3 ) Gérer et engranger les Recettes , les Bénéfices , la TVA , etc …. – 4 ) Enfin , utiliser les « Profits » réalisés pour organiser des Campagnes de Prévention et Sensibilisation percutantes et soutenues . – 5 ) Poursuivre plus efficacement et plus sévèrement le reliquat de « Narco’s » , devenu marginal . Je suis convaincu que ce sera la solution . Elle est tout à fait réaliste et techniquement connue , elle s’applique déjà pour Alcools – Tabac – Produits Pharmaceutiques et bien d’autres . Le plus difficile sera de convaincre la puissance des nombreux « malades de la Moralise » qui s’y opposent , « SANS » la moindre réflexion approfondie sur les sujets tels que : Les Addictions , les Coûts Police , Justice , Santé , les Enrichissements colossaux engrangés par les « Narco’s » , les Dégâts humains collatéraux induits par le trafic , le Pourrissement de quartiers entiers , etc ….

    • Le tabac et l’alcool ce n’est pas la même chose que la drogue qui est un facteur infiniment plus puissant et plus rapide de destruction cérébrale et de désocialisation. Je rappelle ici une fois de plus que le mot assassin dérive de haschischin. Au surplus, Le THC, ou Delta-9-tétrahydrocannabinol, est la principale molécule psychoactive du cannabis, et son taux ne cesse d’augmenter depuis des décennies. Une étude publiée dans la revue Molecular Psychiatry révèle que la consommation de cannabis dit puissant, défini par une teneur en THC supérieure à 10 %, laisse une signature distincte sur l’ADN. Mettant ainsi en lumière l’impact biologique jusque-là mal compris de cette drogue « récréative », notamment sur la santé mentale. Vous pouvez être certain que ce n’est pas le « produit » réglementé » que les trafiquants se feront un plaisir de vendre. Le problème posé par le cannabis ne peut être dissocié du problème global posé par TOUTES les drogues. On permet tout ou on interdit tout Si on permet « un peu » on ouvre la porte de tout. Et c’est bien ce qui se passe dans les pays « légalisateurs » Quant à mettre en place une bureaucratie (une de plus) pour « gérer et normaliser » la drogue …. je vois très bien ça …. à Bruxelles.

    • « Donc oui, je plaide pour la légalisation du cannabis. Vous pouvez continuer à vous attaquer aux petits consommateurs, mais ça ne produira aucun résultat ». Manuel Bompard LFI. Une référence, que dis-je ? une autorité, indiscutable.

  7. Quand on entend le discours de certains dirigeants du pays on peut se demander quelquefois s’ils n’ont pris quelques substances nocives parce que ça me fait penser à un présentateur de télévision qui quelquefois perdait un peu la notion du bon sens, on a su ensuite que ce n’était de la farine qu’il se mettait dans le nez.

    • Vous avez tout à fait raison,
      Il faudrait que l’état fasse de la pub genre « consommer de la drogue vous rend fou » ou « si vous prenez de la drogue vous ne vivrais pas vieux  » au lieu de nous bassiner avec la pub  » je baisse, je décale etc  » qui ne sert à rien.

    • C’est relativement simple. Après la chute du « Dernier empereur » au début du XX ième siècle il y a eu un en Chine un immense « bordel politique ». Est apparu le minuscule PC chinois, la « longue marche » de Mao qui est entré à Pékin en 1949 tandis que son concurrent trop faible se réfugiait à Taïwan avec se qui lui restait de son armée. Taïwan soutenu par les USA n’a jamais été reconnu par la Chine de Pékin ni par l’ONU. Aujourd’hui le PC chinois a reconstitué l’Empire millénaire chinois, il ne pardonnera jamais aux occidentaux d’avoir essayé d’éliminer la population par l’opium, il continuera à revendiquer Taiwan. Macao, Hongkong sont redevenus chinois. En Chine la dictature ne doit pas être très complaisante avec les drogués.

      • Le drame commence bien avant la « Chute du dernier empereur ». On peut se faire une idée de ses causes en lisant l’Empire Immobile et la Tragédie Chinoise d’Alain Peyrefitte. On y voit bien les faiblesses de ces fameuses élites mandarinales recrutées sur concours (ça ne vous rappelle rien ?) qui se laisseront aller aux plaisirs des paradis artificiels …. et de la corruption.

      • Revoyez votre histoire, je me souviens précisément avoir vu à la télévision l’expulsion de l’ONU du représentant de formose au profit d’un représentant de la Chine communiste. Il était effectivement peu cohérent pour un organisme sensé représenter la planète de se passer du pays le plus peuplé.

  8. Et pendant ce temps nos illuminés de Bruxelles au dépens de nos agriculteurs sont prêts à signer un accord avec l’Amérique latine pour l’importation de milliers de tonnes de viande et de céréales.
    Combien de tonnes de cette « m » seront cachées dans ces cargaisons Bon courage à notre ministre Retailleau

  9. Ça fait des années que c’est en cours. Dans chaque famille on a un ou des toxicos irrécupérables avec des neurones attaqués, plus de dialogue possible, agressivité en manque,la pénalisation des consommateurs devrait ne plus être un tabou.

  10. Quand on voit les ravages que font les drogues de synthèse en Amérique, qui transforment des rues entières de San-Francisco ou de Los Angeles en mouroirs et où déambulent des zombies, on imagine aisément qu’une société même très avancée peut très facilement s’autodétruire en s’empoisonnant. Le combat contre le narcotrafic est donc un combat existentiel qu’il faut impérativement gagner, sans s’encombrer d’états d’âme superflus à propos des droits des criminels, si chers aux adeptes d’une société permissive.

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