[HISTOIRE] La chute d’Al Capone : un précédent à suivre pour Retailleau ?

Al Capone
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Le 8 novembre dernier, à Marseille, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau déclarait dans son discours de lutte contre la criminalité organisée : « Al Capone est tombé sur une enquête fiscale et non une enquête de stupéfiants, il faut frapper au portefeuille ». Ainsi, l'histoire de la chute du roi des gangsters de Chicago, vieille de près d'un siècle et évoquée par le premier flic de France, pourrait offrir une piste pour combattre le narcotrafic et mettre fin au règne des barons de la drogue dans notre pays.

L'empire de Capone

Durant les années 1920, Alfonso Capone, surnommé et connu de tous sous le nom d’Al Capone, devient l'un des criminels les plus puissants et redoutés des États-Unis. Basé à Chicago, il bâtit un empire criminel prospérant sur le trafic d'alcool, les jeux et les maisons closes, dans une Amérique marquée par la Prohibition. Ses méthodes violentes, dont il use lors du massacre de la Saint Valentin le 14 février 1929, ainsi que sa grande fortune le font connaître de tous mais entraîne aussi une longue traque à son encontre de la part des autorités américaines. Pourtant, Capone demeure insaisissable car il parvient toujours à échapper à la justice en corrompant policiers, juges et politiciens. Mais un groupe d'agents fédéraux surnommés « Les Incorruptibles », dirigé par l'agent Eliot Ness, reste insensible à ses pots-de-vin et se consacre à démanteler son empire et son réseau. Cependant, malgré les efforts de ces derniers, Capone échappe encore à la justice, protégé par ses soutiens influents.

La stratégie fiscale des autorités

C'est finalement par une voie détournée que les autorités américaines parviennent à coincer Al Capone. En 1927, la Cour suprême des États-Unis décide après l’affaire judiciaire United States c.Sullivan que même les revenus d'activités illégales doivent être déclarés et imposés. Les enquêteurs lancent alors une enquête fiscale à l’encontre de Capone et découvrent que ses revenus, majoritairement criminels, ne sont pas déclarés. Avec des preuves d'évasion fiscale en main, les autorités lancent ainsi une procédure judiciaire. Capone, cherchant à éviter une peine trop lourde, tente de corrompre les jurés et les magistrats. Pressentant ceci, le juge en charge du procès change le jury à la dernière minute pour garantir un procès équitable. Ainsi, le 24 octobre 1931, Capone est condamné pour évasion fiscale ainsi que pour 5000 violations de la loi Volstead. Il écope alors d'une peine de 11 ans de prison ferme.

La fin d’un règne

Initialement incarcéré à Atlanta, Capone est ensuite transféré à Alcatraz en 1934, une prison réputée pour sa haute sécurité. Coupé de ses réseaux habituels, de ses soutiens extérieurs et de ses contacts criminels, il ne peut plus diriger ses affaires depuis sa cellule. Durant sa détention, sa santé mentale et physique se dégrade aussi rapidement en raison de la syphilis contractée des années auparavant. En 1939, il est libéré pour bonne conduite après avoir purgé sept ans de peine, mais l'ancien seigneur de Chicago n’est alors plus que l’ombre de lui-même. Il se retire dans sa villa de Palm Island, en Floride, où il vit en reclus jusqu'à sa mort provoquée par une crise cardiaque, le 25 janvier 1947.

La chute d'Al Capone symbolise ainsi la victoire d’un État face à l'un des criminels les plus influents et puissants de son époque. Elle témoigne aussi de l'ingéniosité des forces de l'ordre, qui ont su contourner l'absence de preuves directes et la corruption en utilisant d'autres lois, comme celle concernant la fiscalité, pour faire tomber le « Roi de Chicago ». Cette leçon de l’Histoire rappelle alors que rien n’est impossible face à la lutte contre le crime organisé qui exige sagesse, patience, incorruptibilité, volonté et force pour vaincre les criminels, même les plus redoutables.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

Un commentaire

  1. Depuis le temps qu’on le dit! La drogue se refait toujours, mais pour le fric, le gros fric, les dealers tuent douaniers et gendarmes lors des opérations. Perdre le fric les rend fous. Il faut donc fiscalement s’intéresser aux sources de revenus d’un tas de monde, des gros jusqu’aux jeunes qui roulent dans ma ville en grosses voitures allemandes, genre soixante mille euros, tout en étant au RSA. Et il faut financièrement fortement punir le consommateur, cet exploitant de la misère humaine, comme l’on punit le consommateur de pédophilie, complice d’un odieux trafic.

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