[HISTOIRE] Retailleau, dans les pas de Clemenceau ?

clemenceau

Prenant actuellement ses quartiers à l’Hôtel de Beauvau, Bruno Retailleau marche dans les pas d’hommes plus ou moins illustres. Parmi eux, certains ont marqué leur ministère par des actions courageuses et des politiques audacieuses, malgré les polémiques et les critiques. Le plus célèbre de ces ministres est sans conteste Georges Clemenceau, dont nous avons célébré l'anniversaire ce 28 septembre, et qui partage, curieusement, de nombreux points communs avec notre nouveau ministre de l’Intérieur. Vendéen et ancien sénateur, Clemenceau a inscrit son nom dans l'histoire de la République française comme « le premier flic de France », « le Tigre » ou encore « le briseur de grèves », des surnoms qui, plus d'un siècle après, résonnent toujours.

 

Faire de la politique et rien que de la politique

Homme de gauche, Georges Clemenceau a gravi au fil des années les échelons de la politique française grâce à sa forte personnalité et à son obstination. Tribun redoutable, son éloquence, son esprit acéré et sa volonté inflexible ont fait de lui un véritable prédateur politique ne lâchant jamais sa proie. Devenu député en 1876, il se fait connaître à l'Assemblée nationale en renversant tous les gouvernements dont il désapprouve la politique. Surnommé le « tombeur de ministères », son principal adversaire est Jules Ferry, avec qui il s'écharpe souvent notamment sur la question de la colonisation. Cette rivalité contribue à la chute des deux gouvernements à l’instigation de Clemenceau.

Cependant, le scandale de Panama en 1893 ternit sa carrière et l'empêche d'être réélu. Clemenceau, refusant de se taire, trouve alors une nouvelle tribune dans la presse. Devenu directeur du journal L’Aurore, il continue de faire de la politique à travers ses éditoriaux. Ainsi, c'est lui qui publie en 1898 le célèbre J'accuse d'Émile Zola, prenant ouvertement parti pour Alfred Dreyfus. En 1902, il revient en politique en tant que sénateur. Fort de cette expérience, il fait son entrée au gouvernement le 13 mars 1906, à l'appel d'Aristide Briand qui préfère l'avoir à ses côtés plutôt que de subir ses critiques. Afin de préparer la politique du gouvernement, le président du Conseil Ferdinand Sarrien invite Clemenceau chez lui. Préparant quelques boissons, l'hôte demande à notre Vendéen ce qu’il souhaiterait. Ce dernier, ne perdant pas de temps, lui répond : « l’Intérieur ». Ainsi, à 65 ans, Georges Clémenceau devient ministre pour la première fois de sa vie, à un âge presque identique à celui de Bruno Retailleau, qui, à 63 ans, accède également pour la première fois à un poste ministériel.

 

Le premier flic de France

Travaillant à l’Hôtel de Beauvau sans y vivre, Clemenceau se désigne lui-même comme le « premier flic de France ». Son époque et notre cher pays sont alors marqués par le grand banditisme et par une forte agitation ouvrière. En effet, le prolétariat des mines, des chemins de fer et de la métallurgie, manipulé par des révolutionnaires et des anarchistes, ne cesse de faire grève afin de faire avancer ses revendications. Pour Clemenceau, pourtant homme de gauche, cette menace pour la République doit être éradiquée avec fermeté. Ainsi, il n'hésite pas à réprimer sévèrement les grévistes, notamment ceux dirigés par la CGT, afin de restaurer l'ordre républicain en faisant appel à l’armée.

Méprisé et surnommé par la gauche « le briseur de grèves » ou encore « le sinistre de l'Intérieur », Clemenceau décide de réorganiser et moderniser les forces de police en collaboration avec l'armée afin de maintenir sa politique. Des unités spécialisées sont ainsi créées pour enquêter et maîtriser les débordements lors des manifestations. D’autres forces de police sont aussi dotées de véhicules rapides afin de rivaliser avec le grand banditisme, donnant ainsi naissance aux célèbres « Brigades du Tigre ». En souvenir de cette époque, la Direction centrale de la Police judiciaire porte encore aujourd'hui la tête de ce félin comme emblème. Une fois l'ordre rétabli et l'autorité de l'État consolidée, Clemenceau entame enfin un dialogue avec les forces ouvrières pour améliorer leurs conditions de travail de manière raisonnable. Cette volonté et cette détermination lui permettent de devenir président du Conseil des ministres le 25 octobre 1906, tout en conservant le portefeuille de l'Intérieur jusqu'à sa chute en 1909. Républicain laïque et anticlérical, Clemenceau veille également à l'application stricte de la loi de séparation des Églises et de l'État de 1905, n'hésitant pas à risquer une crise diplomatique avec le Vatican pour affirmer la primauté de la République partout sur son territoire.

Ainsi, Georges Clemenceau a su, tout au long de son ministère, faire preuve d'un très grand pragmatisme pour asseoir l'autorité de l'État, sans se laisser détourner par les critiques ou les pressions politiques. Il avait compris que pour assurer la cohésion sociale, la France devait s'appuyer sur un pouvoir fort, capable de faire respecter et appliquer ces lois. Reste alors à l'homme de droite Bruno Retailleau, partageant déjà de nombreux points communs avec Clemenceau, de marcher dans les pas de son auguste prédécesseur afin qu’un jour soit à nouveau restauré l’ordre républicain et la laïcité dans tous les territoires perdus de la République.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

Un commentaire

  1. A propos de « gauches » !
    Il y a un océan de différence entre la gauche française de Clémenceau et la gauche mondialiste issue des « socialisteries » de la rue de Solférino et du communisme de la place du colonel Fabien.
    La première était une gauche d’ordre et de méthode œuvrant dans l’intérêt de la France et dans l’intérêt général.
    La seconde est une gauche de désordre et de bouleversements subversifs méthodiques œuvrant dans l’intérêt indéfendable d’une infime minorité mondialiste ultra-libérale.

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