Hold-up sur les retraites du privé : le gouvernement persiste et signe

agirc

Une information diffusée par France Info a laissé croire que le gouvernement avait renoncé à ponctionner les réserves de l’Agirc-Arrco, comme il le souhaitait. En réalité, le pouvoir n’envisage plus d’accomplir ce hold-up… pour l’instant, et à condition que les organisations syndicales et patronales qui gèrent le régime de retraite complémentaire des salariés du privé acceptent de livrer elles-mêmes les clés du coffre : donne-moi ton argent ou je te l’arrache de force.

Résumé des épisodes précédents : fin septembre, alors que les partenaires sociaux finissent de négocier l’accord devant fixer les règles de pilotage du régime pour quatre ans, le gouvernement annonce que l’Agirc-Arrco devra participer, à hauteur d’un à trois milliards d’euros par an, à la revalorisation des plus petites pensions, promesse faite par Élisabeth Borne. Les gestionnaires de la caisse acceptent, mais seulement pour les petites retraites des salariés du privé, ce qui représente 400 millions d’euros.

Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, jette alors le masque : l’Agirc-Arrco est sommée de contribuer à « financer l’équilibre général du système de retraite », que met en péril la mauvaise gestion par l’État de ses propres régimes (on estime à 30 milliards d’euros le déficit caché des seuls régimes des fonctionnaires). Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, va encore plus loin en déclarant que l’argent de l’Agirc-Arrco servira à financer les écoles et les hôpitaux – ce qui revient à considérer les cotisations sociales prélevées sur les salariés du privé comme un impôt dont le pouvoir disposerait à sa guise !

Chantage de l'État

L’État assortit son exigence d’un chantage : si les partenaires sociaux refusent de se passer eux-mêmes la corde au cou, le gouvernement introduira dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) en préparation un amendement qui lui permettra de ne plus rembourser à l’Agirc-Arrco les allègements de charges (c’est-à-dire les exemptions de cotisations) qu’il consent lui-même à certaines entreprises, à hauteur de 6,5 milliards d’euros en 2022. Les partenaires sociaux refusent toutefois de céder et signent, le 16 octobre, un accord qui ferme la porte aux exigences du gouvernement. Celui-ci se trouve alors pris à son propre piège. Pour introduire dans le PLFSS pour 2024 l’amendement dont Olivier Dussopt a agité la menace, il devrait passer en force, en prenant le risque qu’une motion de censure ne soit déposée par les partis d’opposition, ce qui pourrait entraîner sa chute… En outre, la presse et les associations de retraite qui appuient la résistance de l’Agirc-Arrco alertent l’opinion publique.

Olivier Dussopt désavoué ?

Élisabeth Borne feint alors de désavouer Dussopt. « À ce stade, nous ne déposerons pas d’amendement réduisant les recettes du régime Agirc-Arrco », déclare le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave. Mais « à ce stade » seulement, et sous réserve que les partenaires sociaux rouvrent des discussions : tout en affirmant souhaiter « continuer à avancer par la voie du dialogue social », Cazenave leur demande « des avancées concrètes et rapides, dans le temps ouvert par la navette parlementaire, car nous demeurons déterminés à garantir l’équilibre du système des retraites d’ici 2030 ». L’objectif du gouvernement reste donc le même.

« L’État convoite depuis longtemps les réserves de l’Agirc-Arrco, nous confie Marie-Laure Dufrêche, déléguée générale de l’association Sauvegarde Retraites. Dès le premier quinquennat Macron, le projet de réforme préparé par Jean-Paul Delevoye prévoyant d’unifier les régimes du privé sous le pilotage de l’État devait permettre à ce dernier de mettre la main sur les réserves du privé. Par la suite, le gouvernement a essayé de prendre le contrôle des cotisations des salariés affiliés à l’Agirc-Arrco en transférant leur recouvrement à l’URSSAF et a dû y renoncer », précise Marie-Laure Dufrêche qui demande le vote d’une loi interdisant d’affecter les fonds destinés aux régimes de retraite du privé à un autre objet que le financement des retraites de leurs affiliés. En effet, loin de constituer un « magot », les 68 milliards d’euros capitalisés à ce jour par l’Agirc-Arrco grâce aux efforts consentis par les assurés affiliés au régime complémentaire du privé (dont le rendement baisse depuis trente ans) représentent seulement neuf mois de paiement des pensions : une sécurité qui permettra de faire face à l’augmentation du nombre des pensionnés de deux millions, d’ici à 2030, et plus de quatre millions, d’ici à 2040, venant en majorité du secteur privé, alors que le nombre de cotisants restera stable.

Insatiable, dispendieux et mal géré, l'État français ne veut rien entendre.

Éric Letty
Éric Letty
Journaliste

Vos commentaires

38 commentaires

  1. C’est quand même fort : cela fait des décades qu’est fait le constat d’une situation retraites des salariés du public particulièrement favorable par rapport à celles du privé, longtemps non préfinancée ou très partiellement, et que cela serait une bombe un jour ou l’autre, ce dans l’immense indifférence des dirigeants gestionnaires et successifs du pays.

    Aujourd’hui, vu la gabegie économique qui prévaut, et la réforme des retraites qui n’a rien résolu, on se réveille avec un projet de vol qui accentuera encore, in fine, l’écart entre le public et le privé !
    Il est vrai que les technocrates qui concoctent ce montage d’escrocs relèvent essentiellement du régime public !
    Avec très probablement une majorité de sensibilités gauchistes… Et l’on sait de quoi ils sont capables.

  2. Je suis retraité du privé, entouré, dans ma famille, de beaucoup de retraités du public. Il y a vraiment de quoi être révolté à propos de ce hold-up quand on mesure les différences entre les deux régimes !

  3. Suffit de verser aux ayants droit le surplus au prorata des cotis et se mettre en perspective de déficit au vu de la démographie.

  4. C’est bien sûr un scandale mais c’est illégal et je ne comprends pas que les caisses n’attaquent pas en justice.

  5. Plutôt que de ponctionner les salariés du privé, pourquoi les caisses en question ne réduiraient-elles pas le montant des prélèvements ? Ce serait une façon d’augmenter artificiellement les salaires, mais à quoi bon se constituer une cagnotte pour prévenir les temps difficiles si l’état vous pique tout ? Rendez à César ce qui appartient à César et aux salariés ce qui appartient aux salariés, me parait une bonne devise.

  6. Gouvernement voleur ! Les caisses de l’Agir -Arrco n’appartient qu’au privé. Elle n’a pas vocation à boucher les trous des caisses du secteur public .

  7. A quand la destitution de toute cette équipe de bras cassés. Mais où passe le pognon qu’ils nous piquent tous les jours un peu plus. Cette magnifique république n’a donc aucun compte à rendre à ceux qui la financent.

  8. Il y a bien trop d’assistés et de gros rentiers de la République à financer, ceux devenus presque majoritaires qui ne cotisent à rien et qui vivent grassement avec beaucoup de temps libre sur le dos des autres de ceux qui triment. C’est cela aussi la République gauchiste laïque qui détruit tout ce qu’elle touche.

  9. Si tout cela n’ouvre pas les yeux des moutons c’est à désespérer. Projet purement socialo communiste. Récupérer les cotisations des gros bosseurs pour entretenir les fainéants et toute la misère du monde.

  10. Des voleurs ceux qui nous gouvernent ! faisons comme nos ancêtres en 1789 l’assaut non plus de la Bastille , mais de Matignon et du ministère du travail , et ensuite Bercy , ou faisons tout bonnement le blocus de ces hauts lieux du larcin populaire généralisé. Avec notre argent dû avec nos cotisations depuis des années , serait dilapidé au bénéfice de ceux qui n’ont jamais cotisé voire même travaillé . Une HONTE !!!

  11. Insatiable, dispendieux et mal géré, l’État français vole jusqu’au dernier sous des contribuables et ça nous ne pouvons l’accepter . Le peuple le plus taxé , qui paie le plus d’impôt vivote , peine à se nourrir et se soigner , se chauffer et se loger et partout l’état se sert , en effet nos caisses complémentaires sont également ponctionnées . Nous demandons que leurs salaires et avantages soient revus à la baisse , que tous les ex ne soient plus à la charge du contribuable . Nous exigeons que l’état fasse la chasse à toutes ces fraudes , que ceux qui n’ont jamais côtisés ne touchent pas de retraites dans ce pays , qu’on arrête de subventionner toutes ces associations , qu’on réduise l’AME et que les délinquants fichés S et sous OQTF soient expulsés manu militari , que les mineurs soient raccompagnés chez leurs parents . Il y a là des milliards d’économies qui permettront de renflouer les caisses de retraites , de subventionner davantage les hôpitaux , écoles etc … Et puis que chaque famille contribue à l’entretien des prisonniers comme cela se fait dans certains pays .

    • vous avez tout dit et bien dit, le privé n’a pas a payer les retraites des fonctionnaires , surtout qu’en plus il partait en retraite plus tôt que le privé , et tout ces hauts fonctionnaires qui ne se prive de rien .

    • Cet état dispendieux persiste à dépenser encore plus dans des aides à tout va. N’y aurait il pas derrière la volonté de soumettre le peuple biberonné accès aides pour satisfaire le besoin de contrôle de l’Europe. Malheur à ceux qui n’ accepterons pas .

    • Joli, programme auquel on ne peut qu’adhérer ! Mais vous avez le politique capable de faire cela ? Si oui en sera t’il capable dans un tel pays que la France ?

  12. Alors que ce gouvernement gaspille un pognon de dingue en distribuant subventions et chèques à tout va, il existe même un chèque pour faire repriser son pantalon, il a le culot de vouloir piquer dans les caisses d’un système de retraite parfaitement géré.
    Les députés de l’opposition doivent mettre fin à cette mascarade en censurant la première ministre sous peine qu’elle soit encore là avec son équipe de choc en 2027.

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