Hypothèse Bayrou : un éléphant pour piloter le mammouth ?

bayrou

Un peu d’Histoire : Gabriel Attal avait tout juste quatre ans lorsque François Bayrou devint ministre de l’Éducation nationale. C’était en 1993. François Mitterrand était président de la République, Édouard Balladur Premier ministre. Autrement dit, c’était il y a une éternité, un autre siècle, une autre époque. Trente et un ans après, on parle de ce même François Bayrou pour remplacer cette pauvre Amélie Oudéa-Castéra qui n’en peut mais. Un François Bayrou relaxé dans l’affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. « Au bénéfice du doute. » Cela ne fait aucun doute : fort de cette décision de justice, le maire de Pau, bientôt 73 ans, a la vie devant lui.

Bayrou, l'homme qui ne raccroche jamais

Jamais le Béarnais n’a évoqué une tentation de Venise, à la différence de son aîné de six ans Alain Juppé. À la tête d’un petit parti, le MoDem, héritier en ligne plus ou moins patrilinéaire du giscardisme, Bayrou est toujours là, quand Juppé pantoufle au Conseil constitutionnel, que ses copains du gouvernement Balladur ont raccroché ou sont morts. En décembre, dans ces colonnes, Arnaud Florac émettait l’hypothèse d’un Bayrou à Matignon alors que les jours de Borne semblaient comptés. Une hypothèse pas plus farfelue que celle d’Attal, à bien y réfléchir. Désormais, blanc comme neige aux yeux de la Justice, le voici de nouveau sur le marché de l’emploi ministériel. Et il n’a pas traîné à remettre son CV sur le dessus de la pile en déclarant, sur le plateau de BFM TV : « Il y a beaucoup de manières de servir, j’en ai jamais éliminé aucune », a-t-il déclaré. Si vous voyez ce que je veux dire. D’ailleurs, ajoute-t-il, « je ne me suis jamais dérobé ». C’est là qu’on voit qu’on est passé, en soixante-dix ans, de l’érotisme à la pornographie. En 1958, de Gaulle, du fond de sa Boisserie, faisait au moins semblant qu’on vienne le chercher, jouant plus des silences que des déclarations intempestives. En dire (en montrer) le moins possible pour se faire désirer. C’est fini, tout ça, et il y a bien longtemps.

Et un nouveau ministre de l'Éducation, un ?

Cela dit, on imagine qu’il a dû en être question en plus haut lieu, de cette hypothèse Bayrou. Mettons, maintenant, que dans les heures ou les jours qui viennent, elle se concrétise. Alors, jamais les propos de Macron, lors de sa conférence de presse de janvier, ne prendraient autant de sens. Souvenez-vous. La valse des ministre de la Santé ? « Les ministres, c’est la vie politique. » Ce qui vaut pour le ministère de la Santé vaut pour celui de l’Éducation nationale. Si Oudéa-Castéra dégage, on en sera donc au cinquième ministre depuis 2017. On est bien d’accord que l’Éducation nationale est une priorité… Vous me direz que depuis les cinquante dernières années, il faut remonter à 1974 pour trouver un ministre qui resta rue de Grenelle plus de trois ans. C’était René Haby, qui tint quatre ans au poste. Vous me direz, aussi, qu’il fut aussi l’inventeur du collège unique…

Comme un problème de ressources humaines

Mais assez d’Histoire. De quoi cette rumeur d’une entrée éventuelle au gouvernement d’un éléphant de la politique française pour tenter de piloter le mammouth est-elle révélatrice ? Bien sûr qu’en politique, on n'est vraiment mort que lorsque les croque-morts ont fait leur travail. Mais surtout qu’en Macronie, il y a tout de même un sacré problème de ressources humaines. Si on enlève Le Maire, Darmanin, Lecornu et Dati (qui, désormais, ne tarit pas d’éloges sur son « ami » Bayrou…), tous issus des Républicains, on voit bien que Macron est à la peine pour se constituer un gouvernement politique robuste (passons sur la nomination caricaturale de Séjourné au poste qu’occupèrent dans notre Histoire Talleyrand ou Briand). Enfin, une question se pose : si l’hypothèse Bayrou prospère, que serait l’autorité d’un Gabriel Attal face à un ministre qui fit ses premières armes ministérielles sous Mitterrand et Balladur et parle autant à l’oreille de Macron qu’à celle de son cheval ?

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

98 commentaires

  1. La meilleure solution pour la Macronie et la France serait de nommer Bayrou tête de liste aux Européennes. Ca fournirait une explication commode à la claque annoncée et permettrait de l’achever en douceur en lui offrant une préretraite dorée pendant 6 ans.

  2. L’éducation nationale en voit de toutes les couleurs tant elle est tiraillée par le bas et par le haut et de droite à gauche. L’école souffre car elle fut biberonnée par le socialisme qui a démontré que pendant plusieurs décennies que ce socialisme n’a pas de résultats probants . La haine de l »Excellence ne résoudra pas le manque de travail et d’autorité qui plombe cette institution qui est politisée c’est le même schéma de écologie politique . Mais diable pourquoi ne pas prendre exemple sur l’école privée quand des ministres sont issus de cette excellence ???

  3. Déjà ministre de l’EN, il y a plus de 30 ans, il n’en a pas laisser un souvenir impérissable, bien au contraire puisque totalement aux ordres des syndicats, il n’a pas fait grand chose de constructif pour les élèves. Alors, aujourd’hui, est-ce bien nécessaire de le remettre aux « affaires », même s’il en connait un bout quoiqu’en dise un tribunal téléguidé, sachant que ce chibani sait à peine diriger la bonne ville de Pau, demandez-donc ce que les Palois en pensent.

  4. Ils ne doutent vraiment de rien (c’est d’ailleurs à ça qu’on les reconnaît) et sont prêts à tout, absolument tout pour se maintenir au pouvoir.
    Rappelons-nous les mensonges de Bayrou à ses électeurs, à 2 reprises, en assurant la main sur le cœur qu’il n’abandonnera jamais son poste s’il devait être élu maire de Pau (en 2014 et 2020).
    Sans oublier sa traîtrise en appelant à voter Hollande en 2012 !
    Et pourquoi ne pas recycler Ségolène ou le capitaine de pédalo ?
    Au point où nous en sommes…

  5. Pourquoi nommer et payer encore des ministres, puisque ce sont les ayatollahs de Bruxelles qui commandent ?
    L’EU a fixé des objectifs et programmes pour la jeunesse et l’éducation

  6. Je ne vois pas en quoi la nomination de Dati renforce la robustesse de ce gouvernement.
    Elle n’apporte ni majorité supplémentaire ni expérience en matière culturelle.
    Son seul argument est de rappeler ses origines modestes. C’est un peu court…

  7. En parlant des Béarnais, leurs voisins Basques disaient d’eux : les Béarnais sont naturellement trilingues :
    1°/ ils parlent le Béarnais – 2°/ le Français et 3°/ le sous-entendu. En cela le béarnais Bayrou de la charrette en est le parangon. Lorsqu’il dit qq chose il faut toujours chercher le sous-entendu de ce qu’il cache ! CQFD !

  8. « Il y a beaucoup de manières de  » me  » servir, j’en ai jamais éliminé aucune », a-t-il déclaré. « je ne me suis jamais dérobé ». et là dessus , on peut lui faire confiance il s’est grassement servi , aucune colonne vertébrale , compatible avec tous les systèmes c’est le type même qui vous fait vomir la politique .

  9. Le Bal des Maudits , ce légumes a mangé a tous les râteliers si le pauvre Attal le prend au gouvernement il va perdre de sa personne ,cet homme est le vitriol pour qui s’en approche .

  10. Pour ma part, au vue de la conclusion de l’article concernant l’autorité du premier ministre face à Bayrou, je pencherais plutôt pour une manoeuvre de Macron afin de couper les ailes d’un redoutable concurrent… Un peu tordu certes mais…

  11. Ah ! Quelle belle macronie ! Combien de ministres en fonction ou non, en cours de procédure judiciaire ou finalement innocentés ? Difficile à dire… Oui, vraiment, le bon exemple est offert à la jeunesse de notre beau pays.

    • « Combien de ministres en fonction ou non, en cours de procédure judiciaire ou finalement innocentés ? » à la surprise générale, ne pas oublier.

  12. Manifestement, la retraite à 62 ans n’est pas applicable aux professionnels de la politique. Ce personage qui ne représente plus que lui-même ou presque est à coup sûr une recrue de choix pour ce gouvernement !

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