Il est né un 20 mars : l’Aiglon, l’espoir d’un empire

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Quelle vie n’est pas aussi incroyable que celle de Napoléon II ? Cet enfant presque du miracle était promis à l’un des plus beaux destins de son siècle. Seul héritier de l’Empire napoléonien, il aurait succédé à son père pour perpétuer son œuvre et, qui sait, le sublimer. Enfant plein de promesse, son épopée commença avant même sa naissance.

Le mariage de l’ogre corse et d’un ventre autrichien

La conception de l’Aiglon est un enjeu politique pour le jeune Empire napoléonien. En effet, il doit garantir la pérennité de la dynastie des Bonaparte et, ainsi, la continuité de l’ordre nouveau qui s’est instauré en France. L’Empereur, conscient de cela, décide de divorcer de la malheureuse et stérile impératrice Joséphine afin d’épouser ce qu’il considère comme un ventre. Ce dernier doit seulement l’aider à lui donner un héritier et, si possible, quelques avantages politiques. Et pour les sentiments, me demanderiez-vous ? Point de place pour cela dans le cœur d’un empereur aux nombreuses conquêtes féminines.

Ainsi Napoléon Ier fait le choix de se marier avec la toute jeune archiduchesse Marie-Louise d’Autriche, de 22 ans sa cadette, et qui se trouve être la propre nièce de la pauvre reine Marie-Antoinette. Cette union doit garantir ainsi la paix en Europe grâce à une alliance avec l’Autriche, mais aussi fait rentrer l’Empereur dans le cercle des vieilles monarchies d’Europe. En effet, ces dernières considèrent toujours l’ogre corse comme un usurpateur.

Une naissance compliquée

Une fois le mariage célébré en 1810 avec Marie-Louise, un premier enfant est prévu pour l’an prochain. L’accouchement, ayant lieu le 20 mars 1811, est une épreuve pour la jeune mère et pour le nourrisson. Face aux difficultés rencontrées, le médecin demande à l’Empereur qui il doit sauver ? Ce dernier répond : « Sauvez la mère, ne pensez qu'à la mère... La nature n'a pas de loi, Monsieur : faites comme s'il s'agissait d'une petite bourgeoise de la rue Saint-Denis. Conduisez-vous exactement comme si vous attendiez le fils d'un savetier. » Si cet enfant ne survit pas, au moins son épouse pourra lui en donner d’autres. Enfin, au milieu de la nuit, la délivrance est faite mais le petit garçon semble mort-né. Selon la légende, on l’aurait alors posé sur un tas de couverture sans y prêter attention pour s’occuper de sa mère jusqu’à entendre, à la stupéfaction de tous, les premiers cris du nourrisson. Pour l’Empereur, aucun bonheur n’est plus grand : il a enfin son héritier. Résonne alors dans tout Paris 101 coups de canon afin d’annoncer au peuple français la bonne nouvelle.

L’enfance d’un prince impérial

L’enfant est baptisé quelques mois plus tard à Notre-Dame de Paris sous le nom de Napoléon François Charles Joseph Bonaparte et titré roi de Rome. Le jeune garçon est confié aux bons soins de sa gouvernante, Madame de Montesquiou, qu’il surnomma affectueusement « Maman Quiou ». Elle lui apporta l’éducation et la tendresse que sa mère ne put lui procurer à cause de l’étiquette impériale. Véritable souffrance pour sa jeune mère, qui déclare : « On me vole mon fils, mon bien cher enfant, je voudrais tant pouvoir le bercer, le promener, le montrer moi-même à l'Empereur. »

Mais l’existence et la légitimé de ce jeune prince est une chose bien fragile. Napoléon en est tristement conscient, à son retour de la désastreuse campagne de Russie, en 1812, et du coup d’État raté du général Malet. Cet officier avait tenté de s’emparer du pouvoir en faisant croire à la mort de l’Empereur et nombre de personnes avaient accepté ceci sans penser au petit prince comme successeur de son père. Pour ce dernier, c’est un cruel aveu d’échec : personne n’avait pensé à son héritier. La tradition monarchique « Le roi est mort, vive le roi » ne s’était pas appliquée à la dynastie des Bonaparte.

En 1814, le crépuscule tombe sur l’Empire napoléonien et son maître. Ce dernier s’engageant pour la campagne de France dit au revoir à son épouse et à son fils sans savoir qu’il s’agit, en réalité, d’un ultime adieu. Dès lors, Napoléon II grandit sans son auguste père mais chercha jusqu’à sa mort à connaître cet homme qui l’avait tant désiré.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

6 commentaires

  1. Triste destin de celui qui sauva la France de la Révolution et qui fit passer l’intérêt de son pays avant sa propre vie. N’oublions jamais que toutes les puissances Européennes s’étaient liguées contre lui et qu’en 1815, la France fut mise sous contrôle de ces puissances. Sans le génie de Richelieu, la France n’aurait pu se relever.

  2. Une petite correction. Joséphine Tascher de la Pagerie, épouse d’Alexandre de Beauharnais, n’était pas stérile car elle a eu plusieurs enfants de son premier mari (guillotiné) et a été l’aïeule de Napoleon III et des rois de Suède. C’est peut être l’association Napoléon/Joséphine qui était stérile, mais ni l’un ni l’autre.

  3. Une tragédie émouvante, si bien racontée en vers par Edmond Rostand (écrite à Cambo-les- Bains ), qu’elle m’a tiré des larmes à l’adolescence…

  4. Quelle vie triste: « Entre ma naissance et ma mort il y a un grand zéro », disait-il peu avant son décès.

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